Les ASH, ces Agents Secrets de l’Hygiène

Profession trop souvent déconsidérée, les Agents de Service Hospitalier ont un rôle d'autant plus important en période de pandémie.

L'Hôpital Civil de Strasbourg où, durant les étés 1982 et 1983, l'auteur a exercé les fonctions d'ASH, avant de commencer sa formation d'Infirmier de Secteur Psychiatrique. Foto: Tilman2007 / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Jean-Marc Claus) – Postes les plus souvent occupés par des femmes, que l’on nommait autrefois avec ambiguïté « Filles de Salle » et que l’on dénomme aujourd’hui improprement « Femmes de Ménage », les Agents de Service Hospitalier (ASH) exercent très paradoxalement sans diplôme une profession à part entière. Les séances quotidiennes et vespérales d’applaudissements des 55 jours du premier confinement initialement adressées aux soignant(e)s, ne les incluaient pas d’emblée. Quelques femmes courageuses et fières de leur travail, se mobilisant sur les réseaux sociaux, firent heureusement sortir un peu de l’ombre les ASH. Mais ne sauvant pas directement de vies, à contrario des héros des séries télévisées made in USA, la profession retomba dans l’oubli.

Ne sauvant pas directement de vies, mais en sauvant indirectement, car depuis les observations du bon docteur Ignace Philippe Semmelweiß (1818-1865) et les découvertes du génial chimiste Louis Pasteur (1822-1895), nous savons combien l’hygiène, hospitalière qui plus est, a une importance fondamentale dans la lutte contre la propagation des maladies. Or, en période de pandémie, telle celle que nous connaissons actuellement, qui osera encore banaliser le rôle joué par les Agents de Service Hospitalier, véritables agents secrets de l’hygiène, car agissant dans l’ombre au point de devenir invisibles pour certains, tant usagers que décideurs de l’hôpital ?

Les ASH ne sont pas plus des femmes de chambre que des femmes de ménage, mais des agents formés aux techniques de bio-nettoyage. Autant dans les parties communes des unités de soins, que dans les locaux dédiés à des activités spécifiques et bien sûr, dans les chambres des patients, leurs interventions ne consistent pas à juste faire le ménage, comme des employés de maison à temps partiel payés intégralement par CESU. A la propreté s’ajoute l’asepsie, deux notions trop confuses dans l’esprit d’un trop grand nombre de nos contemporains. Les ASH ont donc aussi pour mission d’éliminer un maximum de germes sur les surfaces inertes, les soignants se chargeant des « surfaces vivantes ».

Ces agents secrets de l’hygiène ont aussi une autre fonction, non définie dans leur cahier des charges, mais pourtant importante : créer du lien avec les personnes hospitalisées. Ce lien, d’une affligeante banalité hors de l’hôpital, que nous entretenons avec la vendeuse, le facteur, la buraliste, l’employé communal. Ce lien banal qui devient essentiel quand, reclus dans une chambre aseptisée, chaque minute de présence humaine est alors infiniment précieuse. Manquant de formation aux techniques relationnelles, car ce n’est pas leur cœur de métier, les ASH font dans ce domaine de leur mieux, avec empirisme et en y mettant souvent beaucoup de cœur.

Passant quotidiennement du temps dans les chambres, les agents secrets de l’hygiène peuvent y collecter nombre d’informations d’une grande utilité à l’équipe soignante. D’où l’importance de leur présence et de leur participation aux temps de transmissions et de réunions. Ce qui n’est malheureusement pas perçu de cette manière dans beaucoup d’hôpitaux. Pourtant leurs échanges informels avec les patients et leurs observations, tant de leur environnement que de leur comportement, pourraient donner du grain à moudre à l’équipe pluridisciplinaire, s’il leur était donné voix au chapitre lors des discussions cliniques. Mais il est bien connu qu’en France, seuls comptent les diplômes et la position hiérarchique. Or, n’ayant pas de diplôme spécifique et se trouvant tout au bas de la pyramide, les ASH n’ont qu’à se taire et bien se tenir. A ceci près que dans la pyramide, le sommet tient grâce à la base, et nombre de grands inventeurs n’avaient soit pas de diplômes, soit pas les bons diplômes, comme ce chimiste de Louis Pasteur qui en remontra à toute l’Académie de Médecine !

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