Les Canaries : laboratoire du déconfinement ou pas ?

Considéré dès l'Antiquité comme le bout du monde connu, l'archipel des Canaries, abritant initialement des populations berbères, fut conquis aux 14eme et 15eme siècles par les Européens.

La pandémie de Covid-19 n'a pas la même incidence sur les Îles Canaries que sur le continent. Foto: Mysid / Wikimedia Commons / PD

(Jean-Marc Claus) – On se souvient de ces images TV d’un grand hôtel du Sud de Tenerife, où étaient confinées fin février plusieurs centaines de touristes. Le 19 avril 2020, le ministère régional de la Santé du gouvernement des Îles Canaries annonçait 2.047 cas de Covid-19 identifiés depuis le début de la crise. Tenerife (1.305) et Gran Canaria (525), les plus peuplées, comptabilisaient le plus de malades. Pour l’ensemble de l’archipel, 119 décès étaient alors à déplorer, El Hiero, La Gomera et Fuerteventura n’en comptant aucun. Le nombre de cas (confirmés – décédés -guéris) ainsi que les chiffres de l’ensemble du pays et du monde, sont régulièrement mis à jour sur le site de Canarias7, le quotidien canarien.

C’est à La Gomera, en la personne d’un citoyen allemand, que le premier cas positif a été détecté. L’hôpital de Tenerife a, lui, accueilli jusqu’à 700 patients Covid-19 alors que sa capacité est de 1.000 lits standards et 45 de soins intensifs.

Le caractère insulaire de ces territoires fait que, l’état d’urgence décrété le 14 mars associé à l’efficacité des mesures déployées localement, la pandémie régresse au point qu’il est depuis peu question d’y opérer une expérimentation de déconfinement, avant de l’appliquer à l’Espagne continentale. Ce qui ne fait pas l’unanimité ; d’où l’annonce par Ángel Víctor Torres (PSOE), président du gouvernement des Îles Canaries, de ne rien engager avant le 26 avril et de ne démarrer qu’une fois les conditions appropriées réunies. Il a notamment interpellé Pedro Sánchez (PSOE), président du gouvernement espagnol, quant à la nécessité d’obtenir plus de matériel de protection.

Le docteur Lluís Serra-Majem, porte parole de l’équipe scientifique participant à la gestion de l’urgence sanitaire, a déclaré que la réduction des mesures de contrôle ne se fera jamais de manière unilatérale, mais dans le cadre d’accords entre les administrations centrales et autonomes. Les protocoles de retour à la normalité sont à l’étude. Ainsi, des mesures telles que le port du masque et la prise de température pour les passagers des avions et bateaux semblent pertinentes.

Sur ces îles où le tourisme constitue un pan majeur de l’économie, le confinement a évidemment un impact considérable. Mais comme l’affirme Román Rodríguez (NCa), le vice président du gouvernement de l’archipel, les Îles Canaries ne seront pas le laboratoire du déconfinement. Il précise que la santé des citoyens l’emportera sur l’économie, et il s’engage à se battre contre d’éventuelles coupes budgétaires qui affecteraient les services publics et la santé. Ce leader d’un parti qualifié de nationaliste progressiste, car au centre gauche de l’arc politique, se veut optimiste sans pour autant minimiser la gravité de la situation.

Yaiza Castilla (ASG), la ministre du Tourisme, de l’Industrie et du Commerce de l’archipel, qui avait déclaré précédemment « Aux Canaries, nous espérons accueillir à nouveau des milliers de touristes à bras ouverts », affirme dorénavant : « Les Îles Canaries doivent être un laboratoire mondial de la sécurité touristique. ». Ce qui nécessite de repenser tant l’organisation générale des services  que la gestion des flux et l’occupation des espaces. Un défi relevable sous conditions pour des îles peu touristiques comme El Hiero ou La Gomera, mais en revanche très compliqué à assumer pour Tenerife ou Gran Canaria.

Le concept de « laboratoire mondial de la sécurité touristique » va bien au delà de celui de « laboratoire espagnol du déconfinement ».  Face à ce challenge, les Canariens, comme à leur habitude, ne manqueront pas de courage et d’inventivité. Cependant, le tourisme  ne s’inscrivant pas par nature dans une dynamique à visée autarcique, ils auront besoin du soutien tant de l’Espagne continentale que du reste de l’Europe.

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