Les citoyens sont plus européens que leurs responsables politiques

Contrairement aux politiques, les européens ont compris qu'il faille aider les réfugiés. Qui sont des êtres humains comme toi et moi. Foto: (c) Raimond Spekking / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0

(KL) – Ce sondage a de quoi surprendre. Mené par le géant médiatique Bertelsmann et l’institut «Dalia Research», 11410 personnes dans les 28 états-membre de l’Union Européenne ont été interrogées sur l’actualité européenne – ce sondage est représentatif pour les six plus grands états-membres, donc l’Allemagne, la France, la Grande Bretagne, l’Italie, l’Espagne et la Pologne. Et contrairement à ce qu’on pourrait penser, les citoyens ne sont pas «fatigués» d’Europe, mais ils veulent une autre Europe, une Europe plus juste, plus solidaire.

En ce qui concerne la question clé du moment, la question des réfugiés, les citoyens européens ont un point de vue bien différent de leurs gouvernements. Tandis que les gouvernements travaillent d’arrache-pied sur des «digues», des «mécanismes de défense» et des moyens d’empêcher les réfugiés de venir chercher de la sécurité en Europe, les citoyens européens font preuve de bien plus de compassion. Le sondage montre clairement que la grande majorité des européens est favorable à une approche commune et, surprise, à une distribution des réfugiés sur les états-membre.

Ainsi, 87% des sondés s’expriment en faveur d’une politique commune en ce qui concerne la sécurisation des frontières extérieures de l’Union Européenne, 79% seraient pour une distribution des réfugiés sur l’ensemble des états-membres et 79% voudraient sauvegarder la libre circulation, donc l’Espace Schengen, que la politique a déjà aboli dans les faits. Et, mauvaise nouvelle pour les états de l’est de l’Europe qui refusent la solidarité avec les réfugiés, 69% serait favorables à ce qu’on coupe les subventions aux pays qui continuent à refuser d’accueillir des réfugiés.

Contrairement au discours de haine et de peur pratiqué par de nombreux responsables politiques européens, contrairement aux déclarations des politiques des «états de Visegrad», les européens s’attendent à un comportement solidaire de la part de l’Europe. «L‘Europe n’est pas une communauté de solidarité», avait martelé en début de semaine l’eurodéputé slovaque Richard Sulik – et il se trompe. L’Europe, du moins l’Europe dont rêvent les 500 millions d’européens, devrait être exactement cela – une communauté de valeurs partagées, de solidarité, d’entre-aide. Et la mission que formulent les européens à l’adresse de leurs responsables est aussi clair – trouvez des solutions européennes, trouvez des solutions solidaires et humanitaires et n’abolissez pas les acquis européens des dernières décennies.

Impressionnant – tandis que 79% des sondés s’expriment pour une politique d’asile et de migration européenne, seulement 22% préfèrent laisser la compétence pour ce dossier au niveau des gouvernements nationaux. Aux institutions européennes de se montrer digne de cette confiance…

Et pour finir, les européens sont, dans leur majorité, favorables au célèbre «plus d’Europe» – 60% estiment que la coopération européenne et l’intégration politique et économique doivent être renforcées – et ce, à un moment où plusieurs pays européens sont sur le point de quitter la voie de l’intégration européenne, de la démocratie et de la solidarité.

Ce qui conduit à une question – si nous sommes tous si mécontents avec la politique européenne, si nous voulons majoritairement une Europe solidaire, humaine et humaniste, pourquoi alors votons-nous systématiquement pour des candidats et des partis qui sabotent le projet européen ? A croire ce sondage, ce n’est pas le «projet Europe» qui serait en cause, mais le personnel désigné à le mettre en œuvre. Pourvu que les chefs des gouvernements prennent connaissance de ce sondage avant le début du sommet à Bruxelles…