Les financiers de Francfort osent tout, c’est à ça qu’on les reconnaît !

Après trois années de lourdes pertes, le directoire de la Deutsche Bank voulait s’accorder un bonus d’un milliard. En récompense de l’échec ?

La Deutsche Bank - des scandales à répétition. Foto: Rocio Olalla / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL/AK) – La Deutsche Bank, c’est un peu le Volkswagen des banques. Elle enchaîne les scandales et acquitte des pénalités pharaoniques pour toutes sortes de manipulations des marchés financiers. Piètres manipulations d’ailleurs, puisque pour la troisième année consécutive, la banque enregistre de lourdes pertes, ce qui n’empêche pas les grands patrons de vouloir s’accorder un bonus encore plus colossal que les pertes opérationnelles en 2017. Le directoire avait prévu de récompenser les 500 millions d’euros de pertes en 2017 par 1 milliard d’euro de boni à ses membres.

Un milliard d’euros pour se féliciter de n’avoir perdu que 500 millions, c’est l’expression la plus perverse du capitalisme. Régulièrement, les banques doivent être sauvées par des deniers publics lors de crises qu’elles ont elles-mêmes provoquées. A se demander si in fine ce ne sont pas les contribuables qui payent ce bonus qui ne peut que choquer le citoyen lambda. Mais pour une fois, les actionnaires n’ont pas suivi.

Après les pertes historiques des années précédentes (6,8 milliards d’euros en 2015 et 1,4 milliard en 2016), le résultat 2017 est effectivement meilleur, mais cela reste une grosse perte. Ces déficits à répétition sont dus en bonne partie aux pénalités versées en raison de comportements criminels. Ainsi, la filiale Deutsche Bank Securities vient de se faire condamner à une amende de 70 millions de dollars pour avoir essayé de manipuler l’indice « Isdafix » en fournissant des rapports falsifiés entre 2007 et 2012, comme l’avait dévoilé la commission du commerce américaine CFTC. Quelques jours auparavant, l’amende pour des manipulations dans le cadre de transactions avec des produits dérivés s’élevait à 30 millions de dollars. Alors, un milliard de bonus pour les dirigeants, ça fait tache.

Après que ce projet ait été dévoilé par les médias, le groupe s’est empressé de déclarer que ces boni n’étaient pas destinés aux membres du directoire, mais aux meilleurs éléments parmi les traders de la banque. Car, comme l’expliquait le grand patron de la Deutsche Bank John Cryan, les traders s’attendent à ces boni et s’ils n’en percevaient pas, les plus performants iraient travailler pour la concurrence. Vu les résultats passés, John Cryan aurait pu se demander s’il ne serait pas préférable que ses spéculateurs d’élite aillent continuer à brûler des millions et des milliards ailleurs que chez lui.

Il y a actuellement un problème dans les grandes entreprises allemandes. Toutes les semaines, on découvre des pratiques scandaleuses, voire criminelles. Généralement, les entreprises s’en sortent avec des pénalités fortes, en sacrifiant à chaque fois un pion à qui elles font porter toute la responsabilité. Pourtant, contrairement à ce que disent les Volkswagen, Deutsche Bank, Siemens et autres, le fond du problème ne réside pas dans des comportements individuels. Il y a quelque chose de pourri dans le royaume des grandes firmes allemandes qui, derrière un discours officiel prônant l’éthique, se comportent comme des gangsters sur les marchés internationaux.

Comme dans le monde politique, on constate que toutes les bonnes intentions exprimées dans des règles de bonne gouvernance ne servent strictement à rien. Il convient d’adapter nos systèmes, tant politiques qu’économiques, aux réalités du 21e siècle, où on n’accepte plus que des chefs de banque puissent s’auto-récompenser pour avoir perdu de l’argent.

2 Kommentare zu Les financiers de Francfort osent tout, c’est à ça qu’on les reconnaît !

  1. HEMMERLÉ Pierre // 6. Februar 2018 um 13:10 // Antworten

    Peut-on se laisser aller à la pensée corrosive et définitive qu’un nettoyage à occurence stochastique ou ostracique puisse servir là où toute velléité docimastique aurait échoué dans les tentatives parénétiques?
    Pierre Hemmerlé

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