Les jeux-vidéo : remède ou poison ?

Est-ce que les jeux-vidéo rendent la jeunesse violente ou au contraire, permettent aux jeunes de dégager leur agressivité ? Lyacine Boulakhras propose des réponses.

Jouer aux jeux-vidéo ne mène pas forcément à de telles situations... Foto: Office of Public Affairs / Wikimedia Commons / CC-BY 2.0

(Lyacine Boulakhras) – Depuis sa création dans les années 70, les jeux-vidéo ont connu une véritable révolution technologique, impliquant la montée en puissance des consoles et des ordinateurs, des graphismes hyperréalistes, une scénographie élaborée, et l’utilisation de la réalité virtuelle pour favoriser l’immersion… Ce saut technologique s’accompagne du développement de produits. Désormais, il n’y a pas que des simulations sportives, des jeux de plateforme, des jeux d’aventure, mais aussi des jeux plus violents. Tout comme la série « GTA » qui offre une immersion dans le monde des gangs américains, les jeux « Mortal Kombat » et leur avalanche d’hémoglobine, et même les jeux FPS, dans une perspective à la première personne, comme « Doom », les joueurs doivent lutter contre des hordes de démons, sans oublier « Call Of Duty ». Les joueurs incarnent un soldat qui doit éliminer des terroristes. Le réalisme est criant.

Beaucoup de sang et de violence dans certains jeux… Les jeux-vidéo sont une pratique culturelle qui a actuellement le vent en poupe. Or, est-ce que les jeux-vidéo rendent violent ?

Plusieurs études ont tenté de déterminer si les jeux-vidéo aient des effets néfastes sur la santé psychologique des joueurs. Même si bon nombre d’études sont d’avis que les jeux-vidéo augmenteraient l’agressivité, il y a tout de même beaucoup d’études qui affirment que c’est faux. Certaines vont même jusqu’à avancer qu’ils aideraient à contrôler cette violence, car les jeux violents donnent l’occasion de se défouler.

Columbine en 1999, Wall Street Center en 2001, Virginia Tech en 2007, El Paso en 2019, ou encore Ivry en 2021 – systématiquement les jeux-vidéo sont pointés du doigt pour tenter d’expliquer les tueries de masse. Pourtant, aucune étude scientifique n’est parvenue à prouver les liens entre jeux-vidéo et violence.

Revenant sur Columbine en 1999. Pour essayer de comprendre cette tragédie, les enquêteurs tentent de trouver une explication en étudiant les centres d’intérêt des auteurs de la tuerie (musique métal, jeux-vidéo de tir, jeux-vidéo violant…). Leurs conclusions font l’objet de biais d’observation.

Plusieurs analystes ont montré que les jeux-vidéo sont très répandus et se vendent partout sur la planète. Ils ont procédé à une comparaison entre les Etats-Unis et le Japon qui est le premier pays consommateur de jeux-vidéo. Et ils ont constaté que le taux d’homicides par armes à feu (pour 1 000 000 habitants) était de 0 au Japon pour plus de 4 aux Etats-Unis. Par conséquent, le lien de causalité entre jeux-vidéo et violence ne peut être démontré, sinon il y aurait eu des meurtres similaires au Japon.

Yann Leroux, psychologue travaillant sur les jeux-vidéo, explique que « c’est moins les jeux-vidéo en soi que le contexte social dans lequel il est joué qui peut déterminer les comportements juste après la partie ». Il cite d’ailleurs les travaux de Brad Bushman, professeur à l’Ohio State University, qui défend l’idée que l’accusation portée contre les jeux-vidéo est une stratégie délibérée pour éviter de parler du port d’armes aux Etats-Unis. Selon lui, la violence des jeux-vidéo est récupérée politiquement.

Le 15 mars 2019, un Australien de 28 ans, Brenton Tarrant, commettait 2 attentats contre des mosquées de Christchurch en Nouvelle Zélande. Bilan : 50 morts et 50 blessés. Juste avant de passer à l’acte, l’homme publiait en ligne un manifeste de 74 pages où il tentait de justifier son geste. Il y expliquait que c’est un jeux-vidéo populaire, qui lui « a appris à devenir un tueur »…

Scientifiquement, deux camps s’opposent donc pour confirmer ou infirmer que les jeux-vidéo produisent un comportement violent. Si le comportement violent dû aux jeux-vidéo n’a pas été prouvé, les jeux-vidéo présentent toutefois des risques, notamment en termes d’addiction qui peuvent avoir des conséquences sur la vie d’un individu (sociabilité). L’OMS a d’ailleurs reconnu en mai 2019, que l’addiction aux jeux-vidéo était une pathologie. Mais cela est globalement vrai pour toutes les pratiques excessives qui peuvent aboutir à des conduites addictives

Alexis Blanchet, Maître de conférence à l’Université Sorbonne-Nouvelle explique qu’un procès injuste est fait aux jeux-vidéo. Les jeux-vidéo ne sont pas le seul média à montrer des scènes de violences. Le cinéma en est également rempli. C’est pourquoi il est nécessaire, selon lui, de dédramatiser la violence dans les jeux-vidéo. La violence s’exprime partout sous des formes différentes qui vont être incarnées notamment à travers le jeu. Il cite l’exemple de deux enfants qui jouent au gendarme et au voleur. Les deux enfants évoluent dans un cadre en dehors de la réalité, défini par des règles communes.

L’auteur de cet article étant lui-même un « Gamer » qui a déjà passé des nuits blanches sur son PC à jouer à « GTA », « Call Of Duty » ou même « Counter Strike », et ce n’est pas pour ça qu’il aurait envie de prendre un flingue, sortir dans la rue et dégommer tous les pigeons sur les toits… Les gens accusent les jeux-vidéo, mais c’est la société qui rend les gens (et donc les jeunes) violents. Car la violence est partout : à la télé, au cinéma, dans les rues, au travail, dans un parc… Les jeux-vidéo servent surtout de défouloir pour la jeunesse.

Et pourtant, bien utilisés, les jeux-vidéo peuvent avoir un effet positif sur la santé comme le jeu « Sea Hero Quest » qui a été développé pour diagnostiquer précocement Alzheimer.

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