Les libraires espagnols résistent à la pandémie

La pandémie de Covid-19 mène la vie dure aux libraires, mais leur vitalité est exemplaire.

La Barceloneta, quartier central de Barcelone. Foto: Acountries / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(Jean-Marc Claus) – Le 24e Congrès des Libraires Espagnols, événement bisannuel qui s’est tenu du 4 au 6 Mars 2020 à Malaga (Andalousie), avait, peu avant le confinement, démontré leur volonté farouche de résister aux géants de la vente en ligne. Plus de 300 professionnels du livre réunis à cette occasion, s’associent désormais pour lancer une plate-forme de vente en ligne. Partant d’un portail existant nommé todostuslibros.com, soutenu par l’Union Européenne, alimenté par les données de 750 libraires espagnols, comptabilisant actuellement 2 millions de visites mensuelles, ils projettent d’y adosser un site de vente en ligne d’ici la fin de l’année. D’où le titre d’une des thématiques d’échange du congrès : « No es Amazon, somos nosotros » (Ce n’est pas Amazon, c’est nous.).

Des décisions arrivant à point nommé, tant pour défendre la profession de libraire indépendant que pour diffuser une littérature non standardisée par la pensée unique, et qui plus est en cette période de Covid-19, si profitable à Amazon & Consorts. Par contre, les libraires qui ont ouvert peu avant ou en plein dans la pandémie, luttent pour survivre. Mais ils ne désarment pas, comme par exemple Azra Ibrahimovic et Sergio Lledó qui ont créé en 2019 « Fahrenheit 451 », un concept de librairie itinérante, qui a ouvert le 13 octobre dernier une librairie en dur à La Berceloneta. C’est la fermeture en 2016 de la célèbre « Libreria Negra y Criminal », suivie du décès de son emblématique libraire militant Francisco Camarasa Yanez deux années plus tard, qui les a motivé à s’installer dans ce quartier central de Barcelone.

A vocation généraliste, « Fahrenheit 451 » n’est pas juste un  commerce, mais aussi une expérience militante ambitionnant de faciliter tant l’accès à la culture que de promouvoir des auteurs peu connus. Les talents d’Azra Ibrahimovic, qui a derrière elle une carrière de chorégraphe des arts du spectacle, et de Sergio Lledó qui travaille dans le monde de l’édition depuis une vingtaine d’années, se combinent dans cette librairie sise au n° 5 de Calle de la Sal. Tout comme ceux de Kiko Amat, Camila Enrich, Marina Espasa, Àurea Perelló et Mireya Valencia, tous enfants des seventies, qui, dans un quartier universitaire de Barcelone, installent au n° 249 de la Carrer de la Diputació 249 , la Librairie Finestres à vocation internationale, soutenue par la fondation de l’homme d’affaire Sergi Ferrer Salat et dont l’ouverture est prévue début 2021.

Autre exemple de la combativité des libraires espagnols, Elena Picó Chausson se démène en pleine pandémie pour assurer la pérennité de Mármara, la maison d’édition qu’elle a fondé avec Luis de Dios en 2015. Tous deux libraires indépendants, ils ont ajouté à leur activité initiale, la publication de textes qu’ils jugent intéressants, quitte à sortir des sentiers battus. Comme elle le disait dans El País deux ans après la création de Mármara, les livres sont des portes et des jalons ; choses précieuses dont on a d’autant plus besoin actuellement.

La mobilisation des libraires espagnols met vraiment du baume au cœur quand, de l’autre côté des Pyrénées, les librairies sont jugées en période de (re)confinement commerces non-essentiels, a contrario des papeteries et des revendeurs de presse. Le prétendu Génie Français s’avère décidément de moins en moins à la hauteur de ses ambitions…

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