Les manipulations de l’extrême-droite

Les candidats de l'extrême-droite crient au scandale – 25% des personnes incarcérées en France, sont des étrangers. Mais la conclusion présentée par les Zemmour, Le Pen & Cie., est fausse et manipulatrice.

Oui, 25% des détenus en France sont des étrangers. Il y a des raisons à ça... Foto: User:Simio / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 1.0

(KL) – La révélation a fait grimper le pouls aux néo-nationalistes de l’extrême-droite. « 25% des détenus dans les prisons françaises sont des étrangers », martèle Eric Zemmour et considérant que seulement 7,6% de la population vivant en France, sont des étrangers, la conclusion est claire pour les extrémistes : les étrangers sont criminels. En tout cas, ils viennent pour nous « voler, escroquer, menacer et violer », comme l’estiment certains cadors de l’extrême-droite. Un regard au-delà des frontières et sur les travaux des sociologues montre que ces prises de position de l’extrême-droite relèvent de la manipulation.

Mais est-ce que les extrémistes n’ont pas raison ? Si les étrangers ne représentent que 7,6% de la population française, mais 25% des détenus, est-ce que cela ne veut pas dire que les étrangers sont « plus criminels » que les Français pure souche ? Non, disent les sociologues, la criminalité n’a rien à voir avec la nationalité, la croyance ou la couleur de la peau, elle relève exclusivement de questions sociales. Plus les gens vivent dans la précarité, plus il courent un risque de devenir criminels. Et puisque les étrangers se trouvent, la plupart du temps, parmi les plus faibles groupes au niveau social, il est malheureusement avéré qu’ils commentent davantage de délits et de crimes.

Ailleurs, ce n’est pas différent et dans beaucoup de pays, les chiffres sont encore pires qu’en France. Ainsi, la part d’étrangers vivant en Allemagne, est de 12%, mais les étrangers représentent 32% de la population carcérale. En Suisse, où 25% de la population sont des étrangers, on compte 71,4% d’étrangers parmi les détenus dans les prisons helvètes. Mais là, c’est pareil – ce sont les conditions sociales qui déterminent si une personne devient criminelle et non pas une « nature ou génétique plus criminelle ».

Le problème du fort taux de criminalité parmi les étrangers est effectivement un problème social dont beaucoup de monde porte la responsabilité. Depuis les années 60, les états occidentaux avaient pris l’habitude de faire venir des travailleurs étrangers, dans la vague espoir que ces travailleurs allaient rester quelques années pour ensuite repartir. Et puisqu’on pensait qu’ils n’allaient pas rester longtemps, on les a mis dans des « cités », des HLM à l’extérieur des centres, là où on ne les voit pas. Résultat : dans ces quartiers, une monde parallèle s’est crée, avec une jeunesse sans perspectives, stigmatisée sur le marché de l’emploi, sans aucune possibilité de grimper les échelons sociaux.

Evidemment, tout le monde est conscient de cette erreur d’urbanisme. Ce n’est pas pour rien que quasiment tous les pays européens aient des lois sur la « mixité dans les quartiers d’habitation », mais malheureusement, personne ne respecte ces lois.

Mais que faut-il faire face à ces chiffres ? Cette question devrait faire l’objet d’un débat public avec toutes les parties concernées, mais pas pendant une campagne électorale. Utiliser le malheur de cette population pour faire son gras électoral, risque d’approfondir davantage le clivage entre les communautés.

Evidemment, il faut combattre la criminalité et traduire les criminels en justice. Evidemment. Mais en parallèle, la répression ne sert pas à grande chose, si on ne mène pas beaucoup plus d’actions de prévention. Il faudra les deux et ce, de manière intelligente, pour pouvoir espérer obtenir un résultat.

La façon dont l’extrême-droite présente ces chiffres, n’est autre qu’une manipulation bête et méchante. Il est évident qu’il faudra totalement revoir la question des « cités », qu’il faut agir contre ces « zones de non-droit », mais ni avec des propositions à la Zemmour et pas non plus avec le « Kärcher ». Il faut un débat posé, intelligent et cherchant des solutions, au lieu d’aggraver les problèmes. Mais en vue du niveau lamentable de cette campagne électorale, espérer un débat intelligent, relève du vœu pieu…

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