«Les méthodes de surveillance menacent les Droits de l‘Homme»

Le Conseil d’Europe critique vivement les pratiques des services secrets en Europe. Dommage que cela n’engage personne à rien.

Si c'est louable que le Conseil d'Europe condamne les pratiques de surveillance, cette prise de position n'engage personne à rien. Foto: Claude Truong-Ngoc / Eurojournalist(e)

(KL) – Le Conseil d’Europe à Strasbourg (CoE) est une institution diplomatique. Comprendre : une institution qui observe, qui commente et qui n’a aucune incidence sur la politique menée par ses états-membres. Au niveau diplomatique, et les responsables du CoE ne se lassent pas de le souligner, il s’agit de la plus grande institution européenne, regroupant 47 pays (donc beaucoup plus que l’UE compte d’états-membres) et qui constitue l’un des rares canaux diplomatiques permettant de communiquer avec des états qui autrement, ont une discussion difficile, comme la Biélorussie ou la Russie. Sa Commission des Droits Civiques vient de publier un rapport de 32 pages qui souligne que la surveillance pratiquée par les services secrets constitue «une menace pour les droits fondamentaux des citoyens». Si tout le monde le savait déjà, il est toutefois bien que ce fait soit exprimé ouvertement par une institution européenne.

Suite aux révélations d’Edward Snowden, que le même Conseil d’Europe n’a pas voulu inviter à Strasbourg, ni pour l’entendre devant ses commissions, ni à l’occasion du «Forum Mondial de la Démocratie» (tout en organisant une sorte de vidéo-conférence où l‘on se demande encore aujourd‘hui comment Snowden ait pu accepter une telle farce), le CoE s’est donc penché sur les méthodes des services secrets qui agissent à leur guise en ayant coupé court aux droits individuels pour lesquels des générations de citoyens engagés ont du se battre.

Le CoE demande dans ce rapport (qui se trouve en état de projet et qui n’a pas encore été validé par les instances du CoE) à ce que les législations nationales ne permettent pas la collecte de données personnelles qu’à condition que la personne concernée l’autorise expressément ou bien, si un tribunal l’ordonne sur la base d’un soupçon fondé. Les pratiques actuelles seraient donc considérées comme illégales. Ce qui ne risque pas de perturber la bonne marche des opérations de la NSA et des services européens qui agissent comme agents pour le compte des services américains.

Et une nouvelle fois, il faut constater les faiblesses des institutions européennes. Car si le CoE publie un tel rapport (qui est actuellement discuté au sein de l’Assemblée Parlementaire du CoE), il n’aura aucune incidence. Les deux institutions européennes qui pourraient obliger les gouvernements nationaux à prendre des mesures, donc la Commission et le Parlement, s’abstiennent de toute action qui pourrait froisser les Américains et les décisions ou recommandations du Conseil d’Europe n’engagent personne à rien. Dans le meilleur des cas, les gouvernements qui ne se conforment pas aux recommandations du CoE, sont invités à expliquer leur position, mais personne ne peut les obliger même à ces explications. C’est donc à prendre ou à laisser.

Le Conseil d’Europe est donc une sorte d’instance morale, observant la politique dans le monde, ayant le droit de commenter, mais n’ayant pas de poids politique. Pour nous, dont les droits fondamentaux sont bafoués par les services secrets, il ne reste que le triste constat que ceux qui pourraient intervenir, ne le font pas et ceux qui s’expriment, n’ont pas d’influence sur la politique menée. Et après, on s’étonne que les Européens aient de moins en moins confiance en leurs institutions ?

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