Les patronnes de la CDU se font démonter

Après l'élection régionale en Thuringe, la chancelière Angela Merkel et sa dauphine, la cheffe de la CDU Annegret Kramp-Karrenbauer se font démonter – aussi par leur propre parti.

Après les échecs électoraux en série, la CDU s'en prend maintenant à ses deux cheffes... Foto: Eurojournalist(e) / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – Jamais la CDU n’avait fait un aussi mauvais score que lors de l’élection régionale en Thuringe. Avec 21,8% des votes, la CDU ne se positionne plus qu’à la troisième place des partis politiques en Thuringe – derrière Die Linke et derrière l’AfD. Dans une telle situation, les partis ont l’habitude de désigner des boucs émissaires. Cette fois, ça tombe sur la chancelière Angela Merkel et la cheffe de la CDU, Annegret Kramp-Karrenbauer.

C’est « l’éminence grise » de la CDU, Friedrich Merz, qui a ouvert les hostilités. Pour lui, le mauvais résultat en Thuringe constitue « l’expression du manque de confiance en la Grande Coalition à Berlin ». Lors de la campagne, il aurait observé « un grand mécontentement avec la CDU et le SPD » et ce mécontentement concerne surtout Angela Merkel, qui n’affiche pas « un leadership politique et des positions claires ».

L’autre cible des critiques : la cheffe de la CDU Annegret Kramp Karrenbauer. Déjà massivement critiquée par le chef des « Jeunes Chrétiens-Démocrates » (JU) Tilman Kuban, AKK fait maintenant l’objet de toutes les critiques. Ainsi, Wolfgang Kubicki, du FDP, a déclaré qu’AKK « n’aurait pas le format pour être cheffe de la CDU et encore moins pour être candidate à la chancellerie » lors des prochaines élections législatives.

Le rôle de la CDU nationale est de plus en plus mal vécu dans les Länder. La tête de liste de la CDU en Thuringe, Mike Mohring, s’est positionné ouvertement contre la direction de son parti en indiquant qu’il allait entamer des discussions avec le vainqueur de l’élection, le ministre-président sortant Bodo Ramelow (Die Linke), malgré le fait que depuis dimanche, tous les ténors de la CDU à Berlin ne cesse de répéter qu’il n’y aura aucune coopération avec les partis extrémistes, donc, l’AfD et Die Linke. « La décision concernant la Thuringe sera prise en Thuringe », a déclaré Mohring, au grand dam du reste de la CDU. Pour revenir sur ses paroles peu après, les cadors de la CDU l’avaient recadré…

Pourtant, Mohring n’a pas tort. Bodo Ramelow a démontré pendant son mandat comme ministre-président et chef d’une coalition Die Linke-SPD-Verts qu’il était tout sauf un extrémiste et qu’il représentait dans les faits, des positions social-démocrates et pas du tout extrémistes. Ce n’est qu’à Berlin qu’on peut le mettre dans le même sac que le fasciste Björn Höcke de l’AfD ; et Mohring l’a dit clairement : « On prendra une décision dans l’intérêt de la Thuringe ».

Après le SPD qui, depuis des mois, n’arrive pas à désigner sa future équipe dirigeante, la CDU se dirige, elle aussi, dans une crise majeure. A deux ans des prochaines élections législatives, le chaos qui règne au sein des deux anciens grands partis ne fait qu’arranger les affaires de l’AfD qui remporte depuis quelque temps, les votes que perd la CDU.

Il est évident que dans la CDU, comme dans le SPD, un changement de génération s’impose. Mais ce changement de génération est mal préparé – dans les deux partis, aucun acteur ne se serait imposé comme potentiel successeur, et ce manque structurel se traduit maintenant dans des résultats comme en Thuringe.

La Grande Coalition à Berlin semble toucher à sa fin ; et il y a de fortes chances pour que ces prochaines semaines, lorsque CDU/CSU et SPD présenteront leur bilan de la moitié de cette mandature, cette Grande Coalition soit enterrée.

Les chiffres sont cruels : CDU et SPD ont remporté ensemble 30% des votes en Thuringe, les partis dits « extrémistes », plus de 54%. Soit, CDU et SPD arrivent maintenant à se réformer depuis l’intérieur, soit les deux partis disparaîtront de la scène politique. Il leur arrive exactement la même chose qu’au PS et aux Républicains en France – à force de maintenir les « vieux crocodiles » au pouvoir, les électeurs et électrices se tournent vers d’autres partis, y compris les pires extrémistes.

Les prochains mois s’annoncent houleux dans la politique allemande. De grands changements sont à prévoir…

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