Les petits champions de la diplomatie

Emmanuel Macron s'est rendu à Moscou, Olaf Scholz à Washington. Mais au lieu de discuter sérieusement avec les représentants du « moteur européen », on a indiqué leur place aux Européens.

L'image traduit parfaitement la considération qu'expriment Moscou (et Washington) à l'égard des Européens... Foto: Kremlin.ru / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – La photo fait le tour du monde, à l’instar de cette photo où Ursula von der Leyen se rend compte que le président-dictateur Erdogan n’avait pas prévu de chaise pour elle. Dans la diplomatie, les détails ont leur importance. Vladimir Poutine et Olaf Scholz ont du apprendre quelque chose pendant leurs déplacements à Moscou et Washington : les puissants du monde se fichent pas mal de ce que les Européens peuvent bien penser ou vouloir. Et Olaf Scholz a du se rendre compte que la décision concernant l’ouverture du gazoduc « Nord Stream 2 » ne se prend pas à Berlin, mais à Washington. Et du coup, les présumés leaders européens se trouvent réduits à leur taille réelle.

La visite d’Olaf Scholz à Washington était sensée clarifier les relations transatlantiques. Mais lors de la conférence de presse avec le président américain Joe Biden, le chancelier allemand n’était guère plus qu’un figurant, tandis que Joe Biden répétait ses menaces habituelles en direction de Vladimir Poutine. Olaf Scholz ne pouvait qu’acquiescer. L’annonce faite par Biden, à savoir qu’en cas d’agression en Ukraine, « Nord Stream 2 » n’allait pas pouvoir être exploité (« nous avons les moyens d’empêcher cela »), constituait un désaveu pour Olaf Scholz. Ce dernier se réfugiait dans des déclarations générales, soulignait « l’amitié » entre l’Allemagne et les Etats-Unis, et il était évident que les Américains se fichent pas mal de ce que l’Allemagne ou l’Europe souhaitent.

En parallèle, Emmanuel Macron, qui voulait se présenter non seulement comme le leader français, mais aussi comme le leader européen, était remis à sa place par le président russe. Résultat de 5 heures de discussions : Poutine souligne ce qu’il souligne depuis des mois, à savoir qu’il n’acceptera pas d’extension de l’OTAN vers l’est et Macron se réjouissait que Poutine avait écouté poliment ses propositions. Ces propositions qui ne semblent pas trop impressionner le patron du Kremlin, Macron les discutera maintenant avec le président ukrainien Zelensky. Mais, au moins, on discute. Et généralement, lorsque l’on discute, on ne se bat pas.

Une fois de plus, on doit constater que l’Europe, la France et l’Allemagne ne pèsent pas beaucoup dans le concert des grands. On les écoute plus ou moins poliment, mais les positions européennes n’intéressent ni la Russie, ni les Etats-Unis, ni la Chine. L’Europe, encore et toujours paralysée par son manque d’unité (il sert à quoi, au juste, le « ministre des affaires étrangères de l’Union Européenne » Josip Borrell ?), n’est plus qu’un marché intéressant pour les « super-puissances », mais l’UE, elle, est loin, très loin d’être considérée comme une « super-puissance » elle-même.

Si le nouveau chancelier Olaf Scholz voulait montrer aux Allemands (et aux Européens) qu’il saura diriger l’Allemagne avec force et détermination, c’est raté. Et si Emmanuel Macron voulait montrer aux électeurs français qu’il fasse partie des leaders du monde, c’est raté aussi. L’Europe, c’est un géant qui s’ignore et qui s’auto-paralyse. Mais ce géant qui s’ignore, sur l’échiquier politique international, n’est autre qu’un pion. Du moins, c’est ce qui s’est avéré à Moscou et à Washington. Et si on se mettait à réfléchir à Bruxelles et Strasbourg comment réformer cette Union Européenne qui pourrait avoir sa place dans la politique mondiale, si seulement elle avait le courage de se donner un règlement interne à la hauteur de ses ambitions ?

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