Les Projets du Maire écologiste de Budapest

Budapest, ville verte !

Budapest by night Foto: The Photographer/Wikimédia Commons/CC-BY-SA 1.0PD

(Marc Chaudeur) De quoi l’avenir de la capitale hongroise sera-t-il fait ? La belle victoire du candidat vert, Gergely Karácsony, avec 51 % des suffrages, fait espérer de belles choses pour Budapest. Un premier pas pour la (re)conquête du pays tout entier ? Peut-être… Avec un certain nombre de réserves et de nuances.

Karácsony Gergely, co-dirigeant de la formation écologiste Párbeszéd (Dialogue) maintes fois mentionnée dans Eurojournalist, a mené avec son parti une campagne exceptionnelle avant les élections municipales du 13 octobre : parcourant le terrain – à savoir les différents arrondissements de Budapest ; faisant du porte-à-porte, appelant au téléphone environ 200 000 électeurs de la ville et, last but not least, organisant des primaires citoyennes… Et tout cela envers et contre le parti national-conservateur-populiste au pouvoir, le Fidesz, qui a mené une campagne d’une bassesse et d’une dureté sans égales dans l’histoire récente de la Hongrie. Párbeszéd a d’ailleurs eu affaire à des pratiques policières dignes d’un Etat dictatorial, voire totalitaire, qui témoignent d’un durcissement fort inquiétant : descente de police sans explication ni motif, écoute des partis de gauche dans les bâtiments du Parlement, diffamations…

La gauche a bénéficié du mouvement social relativement important de décembre et janvier derniers, notamment la protestation des travailleurs contre les lois anti-sociales que le Fidesz espérait faire voter – ou imposer, et qui comprenaient un volet dirigé directement contre la législation du temps de travail et la distribution annuelle des heures supplémentaires. Une grande partie de la population a appelé cette tentative la « loi esclavagiste »… Or, cette loi précisément a été l’occasion pour l’opposition démocratique de coordonner son action pour atteindre un but précis – avec Jobbik, parmi d’autres.

Comme le rappelle fort bien Karácsony dans une excellente interview du 18 octobre au Courrier d’Europe Centrale https://courrierdeuropecentrale.fr/, les primaires citoyennes organisées par la gauche, et principalement par la formation écologiste, ont joué un rôle précieux dans la discussion de points concrets et d’objectifs à atteindre pour et par les citoyens. Intéressant et qui demanderait à être généralisé. Karácsony lui-même précise que bien des points de son programme pour la capitale avaient été proposés par ses concurrents.

Alliance de l’opposition contre le Fidesz : cela a signifié, entre autres, alliance avec Jobbik, un parti qui a été d’extrême-droite au moins jusqu’à 2014. L’est-il resté ? Les Verts et leurs alliés, les socialistes du MszP, se sont-ils donc alliés avec le Diable ? Les avis se partagent et s’opposent sur ce point. Karácsony qualifie le Jobbik actuel de parti de centre-droit : peut-être est-ce un peu excessif…

Certes, les 7 ou 8% que représente Jobbik depuis 2014 ont montré à son dirigeant, Gábor Vona, que la démagogie fasciste ne payait pas ; et certains gestes, qui ont d’ailleurs sidéré la population hongroise, indiquent que Jobbik va dans le sens d’une droite, euh, démocratique : la scission d’une partie de Jobbik, des gens qui considéraient Jobbik comme « trop à gauche » (!), qui a produit le Mouvement Notre Patrie (Mi Hazánk) en juin 2018 ; le recentrage du parti dès 2014, avant le flux migratoire de 2015 donc, alors qu’on eût pu s’attendre à une surenchère visant à dépasser le Fidesz sur sa droite. Et l’espèce de mea culpa que Vona a adressé à la communauté juive, cependant refusé par le rabbin Slomó Köves, dirigeant de la congrégation juive hongroise avec somme toute d’excellentes raisons (et par delà le fait que le rabbin appartient aux loubavitch…)

Il n’empêche que de grandes personnalités intellectuelles et culturelles ont appelé à cette alliance, et que Karácsony ne rate aucune occasion d’affirmer que Jobbik a changé, beaucoup changé. Tout le monde ne le croit pas, mais Párbeszéd a gagné les élections.

Le nouveau maire de Budapest a un vaste programme à réaliser. Mesures anti-corruption, état d’urgence climatique, arrêt des projets d’ «urbanisme» délirants (et corrompus), mesures sociales et extension du nombre de bénéficiaires de celles qui existaient encore, amélioration de la politique du logement et arrêt des expulsions et réduction de la pauvreté en ville…

Bien évidemment, la victoire de Karácsony aura des incidences directes sur les relations de la Hongrie avec l’Union européenne – surtout lorsqu’on constate que les grandes villes d’Europe Centrale sont aux mains de partis démocratiques : Budapest, Varsovie, Prague et Bratislava vont désormais, ensemble, contrevenir à l’euroscepticisme de leurs gouvernements nationaux, au Groupe de Visegrád !

En 2022 auront lieu les élections législatives … Allons, tout n’est pas perdu.

 

 

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