Aujourd’hui, l’Europe mise sur la Turquie

La Turquie se comporte actuellement comme un état totalitaire – mais l’Europe ferme les yeux devant toutes les violations des Droits de l’Homme en Turquie. En espérant qu’Erdogan veuille bien résoudre nos problèmes.

Oui, les bâtiments européens à Bruxelles sont beaux. Mais dedans, c'est pourri... Foto: Samynandpartners / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – Aujourd’hui, la tension en Europe est palpable. Tous les regards se tournent vers Bruxelles où a lieu le nième sommet sur la question des réfugiés et en l’absence de solidarité européenne et même d’idées, toute l’Europe espère que ce soit notre nouveau meilleur ami Erdogan qui s’occupera de nos problèmes. Pour cela, l’Europe est même prête à accepter des incidents comme l’occupation policière du quotidien de l’opposition «Zaman» et d’autres. Pour ne pas perturber les négociations bruxelloises, le ministre de l’intérieur allemand, Thomas de Maizière, interpellé sur cette nouvelle attaque contre la liberté de la presse, n’a rien trouvé de mieux que de déclarer que «l’Allemagne ne doit pas toujours se comporter en arbitre sur ce qui se passe ailleurs». C’est lamentable.

Sur la question des réfugiés, l’Europe a échouée. Malgré la volonté de la plupart des grands états-membres de l’Union Européenne, ce sont les petits états comme ceux dits de «Visegrad» (Hongrie, République Tchèque, Slovaquie et Pologne), mais aussi l’Autriche, la Grande Bretagne, les pays baltiques et d’autres qui ont imposé leur vue – les frontières en Europe sont fermées, devant les barbelés des Balkans, de dizaines de milliers de réfugiés vivent une tragédie humanitaire et puisque nous préférons tous fermer les yeux devant cette catastrophe, il ne reste que la Turquie pour sauver l’Europe. Du moins, c’est ce que pensent les responsables européens.

La situation a un côté «faustien» – l’Europe est en train de vendre son âme à Erdogan dans l’espoir vague que la Turquie veuille bien résoudre notre problème. Et Erdogan, ce chef d’état soupçonné de commercer avec le Daesh, de vouloir déclencher une guerre avec la Russie, ce chef d’état qui malmène la liberté de la presse, qui bombarde (à l’instar du dictateur syrien Assad) les Kurdes, qui est soupçonné de ne pas être étranger à de nombreuses attaques terroristes, qui poursuit sans merci tous ceux qui pensent autrement que lui et qui est sur le point d’abandonner la voie laïciste du fondateur de la Turquie Kemal Atatürk, ce Erdogan, il se frotte actuellement les mains. Car il sait qu’il pourra dicter ses conditions à cette Union Européenne incapable de trouver une ligne commune pour faire face à ses problèmes.

Bien sûr, il est question de milliards d’euros qu’Ankara percevrait pour accueillir et surtout garder les réfugiés syriens, il est question de faciliter l’obtention de visas pour les ressortissants turcs et il est même question de raviver les négociations sur une éventuelle adhésion de la Turquie à l’Union Européenne. Considérant que la Turquie ne remplit en rien les conditions de base pour une telle adhésion, considérant que les valeurs démocratiques n’ont pas cours à Ankara, tout cela s’apparente à un dépôt de bilan définitif de l’Union Européenne.

Les réactions européennes sur les incidents en Turquie des derniers jours sont molles, extrêmement molles. On veut surtout éviter d’embêter la Turquie, puisque sans la Turquie, l’Europe risque de se désintégrer sur la question des réfugiés. On vend donc notre âme au diable, on ferme les yeux devant toutes les violations des Droits de l’Homme de Recep Tayyip Erdogan et le réveil risque d’être dur. Car la Turquie ne va pas résoudre ce problème pour nous, au contraire, elle utilisera les 2,5 millions de réfugiés syriens comme moyen de pression sur l’Europe pour obtenir ce qu’elle veut. Avons-nous déjà oublié les déclarations d’Erdogan d’il y a tout juste deux semaines, lorsqu’il avait menacé de laisser partir tous les réfugiés syriens vers l’Europe ?

Les institutions européennes se montrent incapables d’avancer ensemble pour le bien de notre continent. Elles acceptent tout de la part de la Turquie qui elle, joue un jeu étrange dans le conflit syrien. Et puisque l’Europe n’arrive pas à résoudre ses problèmes sur la base de valeurs communes, pourquoi ne pas demander gentiment au «Daesh» de venir à notre secours… ?

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