L’intégration est une question de volonté

Pendant que la majorité des pays européens fait tout pour éviter d’accueillir des réfugiés, l’intégration des migrants se passe plutôt bien en Allemagne. Quand on veut, on peut…

L'intégration commence par le dialogue et le respect mutuel. Quand on veut, on peut... Foto: Fraktion DIE LINKE. im Bundestag / Wikimedia Commons / CC-BY 2.0

(KL) – 306 574. Voilà le nombre de réfugiés ayant trouvé un travail en Allemagne. Sur les 1,5 millions de réfugiés accueillis en Allemagne depuis 2015, environ 20% ont trouvé un poste de travail qui leur permet de se relancer dans une « vie normale ». Pendant que les autres pays européens estiment encore et toujours que « le bateau est plein », l’intégration des réfugiés avance bien en Allemagne.

« On ne peut pas accueillir la misère du monde entier », voilà une phrase que l’on entend un peu partout en Europe ces jours-ci. Mais cette phrase sert surtout à justifier le refus d’accueillir ne serait-ce qu’une partie infime de cette misère mondiale. L’égoïsme des peuples européens est affligeant, surtout lorsque l’on considère que quasiment tous les pays européens ont dû expérimenter des situations de guerre et de déplacement. Dans une région du monde où presque toutes les familles ont dû un jour se réfugier, ce manque de solidarité et d’humanisme est choquant. La France, pays où on se plaint particulièrement de l’impossibilité « d’accueillir toute la misère du monde », ne figure certes pas sur la liste des pays qui accueillent le plus grand nombre de réfugiés. Sur ce ranking, on trouve des pays comme l’Ouganda, la Jordanie ou le Liban – mais pas la France. Le bateau est-il vraiment plein, ou bien assistons-nous à la renaissance du super-nationalisme, ce nationalisme identitaire qui n’est autre qu’un repli sur soi dangereux ?

L’Allemagne, qui souffre des effets du changement démographique, est une société vieillissante. L’arrivée massive de réfugiés donne un véritable coup de pouce à l’économie du pays. Dès le début de l’arrivée massive de réfugiés, principalement en provenance de 8 pays (Syrie, Irak, Afghanistan, Iran, Pakistan, Somalie, Erythrée et Nigéria), l’Allemagne a investi dans de vastes programmes de formation linguistique permettant aux réfugiés de s’intégrer par le biais du travail. Pendant que d’autres pays se sont limités à regarder la création de bidonvilles inhumains comme à Calais ou à Paris, l’Allemagne a investi dans ces programmes, et grâce à d’innombrables bénévoles, ces programmes d’intégration portent maintenant leurs fruits.

Cette évolution invalide aussi une autre proposition des xénophobes et extrémistes identitaires : les réfugiés ne viennent pas pour abuser de nos sacro-saintes prestations sociales (qui ne permettent pas non plus aux pauvres « de chez nous » de vivre décemment…), mais il s’agit de personnes déplacées contre leur gré qui aspirent à mener une vie normale, digne et solidaire. Permettre aux réfugiés d’être logés, de travailler, de participer à la vie de la société, voilà le meilleur moyen pour amoindrir les tensions interculturelles.

« Oui, mais l’Allemagne n’a accueilli les réfugiés que pour parer à sa pénurie de main d’œuvre », disent de nombreux Européens avec un brin d’arrogance. Comprendre : l’Allemagne aurait accueilli des réfugiés par intérêt économique. Ceci est faux. L’ouverture des frontières, en Août 2015, était la seule décision politique spontanée d’Angela Merkel pendant ses trois mandats à la tête du gouvernement allemand. Dans une situation où plus de 10 000 réfugiés étaient bloqués, pendant un week-end, entre l’Autriche et l’Allemagne, Angela Merkel avait décidé spontanément de laisser ces personnes entrer en Allemagne, au lieu de les laisser exposées dans le no man’s land entre l’Autriche et l’Allemagne. Il s’agissait d’un geste purement humanitaire, et pour de nombreux Allemands, de la première occasion de montrer au monde que l’Allemagne n’est plus le pays qu’elle était.

Avec 1,5 millions de réfugiés en Allemagne, le bateau n’est pas plein. Il ne sera pas plein tant qu’il y aura des gens qui devront quitter leur pays, leur ville ou leur village pour fuir la guerre, la guerre civile ou la famine. Ceux qui nous rabâchent que le bateau est plein nous mentent. Le meilleur moyen pour assurer le vivre-ensemble, c’est l’intégration.

Cette intégration dépend de deux facteurs : de la volonté du pays hôte et de l’attitude des réfugiés. Plus de 300 000 réfugiés qui travaillent aujourd’hui en Allemagne, qui paient leur impôts, qui participent activement à la vie de la société, constituent la preuve que l’intégration est une question de volonté et non pas de capacité. Pour l’instant, les pays européens sont loin « d’accueillir toute la misère du monde », au contraire. Les pays européens font partie de ces pays qui occasionnent les vagues migratoires, soit en étant partie prenante dans les guerres actuelles, soit en exploitant les richesses des pays du tiers monde – le refus de participer à gérer les conséquences de notre politique cynique dans le monde, constitue un dépôt de bilan du « fief des Droits de l’Homme », un titre que l’Union Européenne ne mérite plus actuellement.

Intégrer les réfugiés est sans doute une meilleure approche que de les mépriser, de les combattre, de les opprimer. L’exemple allemand prouve sur fond de chiffres solides que l’intégration est possible dès lors que tout le monde participe activement à cette intégration. Les discours xénophobes que l’on entend aujourd’hui un peu partout en Europe sont tout simplement honteux et écœurants. Ce ne sont pas les réfugiés qui mettent en péril nos pays européens, mais les extrémistes identitaires qui veulent nous faire croire que les Européens sont des « Übermenschen ». Vous ne lirez pas souvent cette phrase sur Eurojournalist(e), mais en ce qui concerne les réfugiés, l’Europe serait bien conseillée de suivre l’exemple allemand.

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