L’inversion de la courbe du chômage…

… moins hors d'atteinte qu'il y a quelques mois ? Alain Howiller se pose la question.

L'inversement de la courbe du chômage devrait se faire ressentir d'abord ICI... Foto: Ksiamon / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Par Alain Howiller) – A vrai dire, on ne s’y attendait guère et ce sera une divine surprise après les mauvais résultats affichés après le mois d’août. Les bons résultats du mois de septembre tombent à pic au moment où François Hollande subit le contrecoup des révélations de « Un président ne devrait pas dire ça !… » et de la publication des derniers sondages de popularité qui révèlent que…. seuls 4% des Français sont satisfaits de sa gestion ! Et voilà que le chômage a connu en septembre (-1,7% sur un an, -1,9% sur un mois) un recul : tel qu’on n’en avait plus connu depuis des années ! Oh, il n’y a rien de rien de bien spectaculaire dans les chiffres : mais ces derniers marquent une tendance (déjà relevée avant l’été) que certains n’hésitent pas à qualifier de véritable inversion de la courbe du chômage !… Cette inversion que le Président de la République (qui fait mine de rester prudent pour la suite) attendait pour annoncer sa candidature aux prochaines élections.

Il est vrai qu’il voulait une « inversion significative » : les chiffres correspondent-ils à cette définition ? Il vaut mieux attendre qu’elle se confirme tout en relevant le « mieux » qui s’est concrétisé, même en Alsace (-1,5% dans le Bas Rhin, 0,5% dans le Haut-Rhin pour -1,9 % dans Grand Est, sur un an et respectivement -2,1%, -1,4% et -1,3% sur un mois) qui avait plutôt tendance à rester à la traîne ! L’évolution du marché du travail semble coïncider (refléter ?) l’embellie que connaît l’économie française : celle-ci crée à nouveau des emplois (eurojournalist.eu des 21 et 29 Septembre).

Un mieux salutaire, mais des conditions délicates pour l’emploi ! – Les dernières notes de conjoncture confirmaient que l’économie française connaissait un mieux salutaire. La France, en effet, cesse de perdre des usines en essayant d’annuler les effets de ce handicap : les créations de postes souffrent du fait que les établissements existants forcent sur la productivité et que les nouveaux sites industriels emploient entre 30 et 40% de personnel en moins que les activités anciennes !

L’économie de la région « Grand Est » -et de l’Alsace en particulier- laisse, elle aussi, entrevoir des signes d’amélioration qu’il faut néanmoins continuer à interpréter avec prudence. Le 10ème baromètre de conjoncture établi par la Chambre Régionale de Commerce et d’Industrie avait relevé que les chefs d’entreprise alsaciens prévoyaient, après un premier semestre décevant, « une amélioration globale des indices au deuxième semestre 2016 ». Ils restaient néanmoins prudents quant à un redressement de l’investissement. Pour la majorité des entrepreneurs alsaciens, interrogés par « l’Ecole de Management Strasbourg Partenaires » pour le compte de l’Observatoire de l’Economie Alsacienne, l’activité, les effectifs et la rentabilité vont se maintenir dans les derniers mois de l’année.

Pour le « Conseil Economique, Social et Environnemental » (CESER) Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine qui a publié le 10 Octobre sa troisième note de conjoncture : « L’indicateur composite de conjoncture du CESER Grand Est (exportations, emploi, intérimaire et demandeurs d’emploi de moins de 25 ans) marque une stagnation. La légère évolution positive constatée au trimestre précédent (ndlr : le deuxième trimestre) ne s’est pas confirmée : pause conjoncturelle ou essoufflement ?… »

Après quatre années, reprise des emplois en Alsace. – Pourtant, relève la note, si on assiste à une quasi-stagnation des effectifs en Lorraine et en Champagne-Ardenne, on constate une amélioration en Alsace où « les créations d’emplois reprennent après quatre années de baisse ». Le taux d’utilisation des outils de production reste inférieur dans le Grand Est aux taux d’avant la crise, mais, constate le CESER, la région bénéficie sur le plan de l’emploi, de l’activité et des exportations, des « dynamiques économiques des pays frontaliers ». L’Alsace apparemment s’en tire mieux que le restant du Grand Est !

Plus optimiste pour le Grand Est en général, la note de conjoncture de la Banque de France qui relève pour la région : « En Septembre, la production industrielle et les livraisons poursuivent leur progression. La demande conserve une orientation positive à l’exception de l’industrie automobile. Les carnets, proches de la normale, revêtent néanmoins des situations contrastées. Dans les services, l’activité et la demande ne montrent pas d’évolution significative. A court terme, les chefs d’entreprise tablent sur une croissance modérée de la production industrielle et de l’activité des services ». Dans quelle mesure la période traditionnelle de Noël, généralement favorable aux emplois intérimaires qui donnent déjà des signes de redressement, aura-t-elle son effet habituel sur la consommation, sur les ventes et les chiffres d’affaires ? On devrait rapidement être fixé sur ce plan.

Le « transfrontalier » au secours des chômeurs du Grand Est ! – Ce sur quoi on peut déjà être fixé : c’est sur l’effet bénéfique des mesures prises en faveur de l’emploi transfrontalier et tout particulièrement en faveur de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Près de 6.000 chômeurs ont trouvé un emploi grâce aux accords Pôle Emploi Strasbourg et Agence allemande pour l’emploi. Le Grand Est compte sur deux projets nouveaux : le premier est baptisé « Réussir sans Frontières – Erfolg ohne Grenze », le deuxième a été baptisé « Eurodistrict Strasbourg-Ortenau : un marché de l’emploi à 360° » (il faut savoir que 3.000 offres d’emplois environ sont ouvertes dans l’Ortenau, face à Strasbourg).

Selon la région Grand Est, le projet « Réussir sans frontière » concerne « 33 partenaires et s’articule autour de quatre actions-clés : améliorer la visibilité des opportunités de formation transfrontalières (ndlr : le manque d’information sur ces plans est un obstacle pour le développement de ce type de formation), assurer un accompagnement adapté aux candidats à un projet professionnel transfrontalier… améliorer la cohérence et l’articulation entre l’offre de formation et la demande des entreprises… renforcer la gouvernance et la coordination de la formation transfrontalière… ».

Un projet « Strasbourg-Ortenau ». – Porté par la Maison de l’Emploi de Strasbourg avec 14 partenaires français et allemands (le projet « Eurodistrict ») vise à rééquilibrer le marché de l’emploi dans l’Eurodistrict Strasbourg-Ortenau (10,2 % de taux de chômage du côté du bassin de l’emploi strasbourgeois contre 3,5 % du côté de l’Ortenau). Le projet veut assurer une meilleure visibilité des opportunités d’emplois dans l’Ortenau, constituer une équipe dédiée au marché de l’emploi transfrontalier et mobiliser les employeurs de l’Ortenau.

Alors qu’un certain nombre de régions passées à droite lors des élections régionales de Décembre dernier ont hésité à s’engager dans le plan « 500.000 formations » lancé par le gouvernement pour lutter contre le chômage, le « Grand Est », faisant abstraction de l’aspect politique de l’opération (aider François Hollande à « inverser la courbe du chômage ! ») a été l’une des premières régions à s’engager dans le plan : elle espère pouvoir former (et donc retirer du chômage pendant la durée de la formation) 75.000 personnes (25.000 de plus qu’en 2015).

Lorsqu’on prend en compte le fait que dans la campagne pour les élections présidentielles, 64% des Français privilégient à nouveau les thèmes économiques et sociaux plutôt que les thèmes identitaires et de sécurité, on comprend que le gouvernement étudie de près la situation économique dans le Grand Est et tout particulièrement en Alsace. L’enjeu politique est de taille (voir eurojournalist.eu du 26 Octobre) et « l’inversion significative » de la courbe du chômage reste un objectif qu’il sera malgré tout difficile à garantir, même s’il semble moins hors d’atteinte qu’il y a quelques mois !

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