Lisbonne : relogement et bicyclette !

Le maire de Lisbonne souhaite résoudre les problèmes d'accès au logement - qu'il a contribué à créer - et incite ses concitoyens à se déplacer à vélo.

A Lisbonne, la révolution passera-t-elle par le vélo et le retour des populations locales dans ses quartiers touristiques ? Foto: Maria Eklind / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 2.0

(Jean-Marc Claus) – Successeur d’António Costa, Fernando Mediana (PS) réélu premier magistrat de Lisbonne en 2017, voit dans la pandémie de Covid-19 une opportunité pour résoudre les problèmes d’accès au logement que connaît la population de la ville. L’agence de Presse Lusa relaie un discours aux accents militant, affirmant une volonté de ne pas sortir de cette crise avec les mêmes problèmes qu’à son début, et notamment pour ce qui est du logement, transformer les difficultés en opportunités. Des propos qui pourraient laisser sous-entendre une politique de gauche offensive ; or, le maire lisboète, convié au Groupe Bilderberg en 2019, est fortement contesté pour sa stratégie d’aménagement urbain, entre autres par ses opposants communistes.

Une stratégie qui a fait la part belle aux investisseurs financiers. Ainsi, Lisbonne est devenue en 2018 la ville européenne comptant le plus de résidences Airbnb par habitant. Fin 2019, la capitale portugaise ne figurait pas au nombre des huit grandes villes européennes saisissant la Commission Européenne pour lui demander « une nouvelle directive sur le commerce électronique visant à garantir une évolution plus équilibrée des locations de meublés touristiques ». Pas plus qu’elle ne figurait sur la liste de vingt-deux villes européennes appelant en mars 2020 la Commission et le Parlement Européens à mieux encadrer les locations de type Airbnb. Rien que dans le quartier historique de l’Alfama, plus de 55% des logements ont été transformés en meublés touristiques selon le Financial Times du 05/09/2019.

Cette croissance phénoménale du locatif touristique a inévitablement provoqué une crise du logement pour les populations locales. Il y a cinq ans, un édifice public sur trois de la capitale était en ruine ou pour le moins dégradé. Depuis, le marché de réhabilitation confié au privé, c’est l’immobilier de grand standing qui s’en est emparé.

Aujourd’hui, alors que le tourisme traverse une période difficile, Fernando Mediana envisage de louer les logements n’ayant pas trouvé de locataires, pour les sous-louer à des gens modestes, des classes moyennes ou à des jeunes. En fait d’opportunité créée par la pandémie de Covid-19, il souhaite inverser la tendance privilégiant jusqu’ici le locatif de passage, pour y favoriser l’installation de populations locales, sans pour autant perdre de vue que le tourisme constitue une part importante de l’économie du pays et de sa capitale.

Un pari osé et un équilibre difficile à tenir, mais avec au crédit de Fernando Medina le fait qu’il aurait peut être saisi les multiples avantages du maintien des populations locales au cœur des villes touristiques, notamment pour ce qui est de leur bilan-carbone, la réduction des trajets domicile-travail ayant un impact immédiat sur la pollution.

C’est aussi dans cet esprit que la municipalité soutient l’achat de vélos pour les résidents, les étudiants et les travailleurs de la capitale en mettant 1,5 million d’Euros sur la table. Ce qui signifie le remboursement de 75% de l’achat d’un vélo classique jusqu’à un maximum de 200€ et 50% de la valeur d’un vélo à assistance électrique jusqu’à un maximum de 350€. Des dispositions concernent aussi les vélos adaptés (75% jusqu’à 500€) et les vélos cargo (50% jusqu’à 500€). L’obtention de ces soutiens est conditionnée par un dépôt de candidature par mail à la municipalité jusqu’au 30 novembre 2020 et l’achat dans un commerce local.

Une initiative louable mais excluant certains ménages aux faibles revenus pour qui par exemple, l’achat d’un vélo-cargo associé à des vélos avec ou sans assistance électrique pourrait être une réelle alternative à la voiture. Idem pour les vélos adaptés destinés aux personnes ayant un handicap et dont pour beaucoup s’ajoute à leurs difficultés quotidiennes un déficit de moyens. Subordonner et adapter ces aides aux ressources des ménages se serait avéré un peu plus complexe, mais socialement plus juste. D’où le choix des élus PCP de voter contre cette mesure lorsqu’elle fut mise aux voix. Fernando Medina a encore du chemin à faire pour revenir à gauche, mais est-ce son ambition ? Il n’en demeure pas moins que ces choix des dernières semaines, aussi contestables soient-ils par certains côtés, signent une volonté d’avancer et comme à tout péché il y a miséricorde, accordons-lui le bénéfice du doute !

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