Marcelo Rebelo de Sousa réélu, mais encore ?

Le scrutin du 24 janvier a donné la victoire au président sortant, mais ce qui se joue en arrière plan, n’a rien de réjouissant...

Marcelo Rebelo de Sousa aux cérémonies du 102e anniversaire de l’armistice de la Grande Guerre. Foto: Agência Lusa / Wikimedia Commons / CC-BY 3.0

(Jean-Marc Claus) – Pour des raisons sanitaires, le vote avait débuté dimanche dernier par anticipation, pour ceux qui le souhaitaient. Mais point de conspirationnisme et de réactions immatures chez les candidat(e)s à la présidence du Portugal, car nombre d’entre eux sont intervenus hier pour exprimer leur confiance en la fiabilité du système. Visiblement, le mouvement QAnon n’a pas encore pris sur la Péninsule Ibérique, mais la montée en puissance de l’extrême-droite reste préoccupante.

C’est pourquoi une « levée de rouge à lèvres » porté par le hashtag #VermelhoemBelem (Rouge à Belém), avait été lancée afin de dénoncer les propos sexistes d’André Ventura (Chega) envers Marisa Mathias, la candidate du Bloc de Gauche (BE). Le candidat du parti d’extrême-droite arrivé sur la scène en 2019, étant tout de même crédité de 10% d’intentions de vote, ce mouvement de résistance via internet n’avait rien d’anecdotique dans un pays demeuré sous la dictature fasciste de l’Estado Novo de 1933 à 1974.

Ce scrutin se déroulant le lendemain du décès du communiste Carlos Autunes (1938-2021), chef des Brigades Révolutionnaires, a pris dans ce contexte une coloration particulière. La députée socialiste (PS) Sofia Canha soulignait avec justesse le matin même dans un journal madèrois que « Tous les régimes autorisent le vote, mais tous les votes ne produisent pas des régimes démocratiques. ».

Comme beaucoup de sondages l’avaient annoncé, le président sortant issu du centre droite (PSD), Marcelo Rebelo de Sousa, est effectivement réélu pour un second mandat de cinq ans. Ce qui, dans l’actuel contexte (pandémie de covid-19, 54,5% d’abstention, 7 candidatures), n’était malgré sa forte cote de popularité, pas forcément gagné d’avance. Avec 61,6% des suffrages exprimés, il échappe au second tour, laissant loin derrière lui tous les autres candidats.

Ce scrutin est, malgré le classement en seconde position d’Ana Gomez (PS) avec 12,9%, un échec pour la gauche, Marisa Matias arrivant à 3,94% pour le Bloc de Gauche (BE) et João Ferreira à 4,33% pour le Parti Communiste Portugais (PCP). Une gauche rassemblée pouvait ambitionner d’atteindre, voire même de dépasser les 20%, ce qui l’aurait avantageusement positionné face au candidat d’extrême-droite André Ventura. Obtenant 11,9% à la présidentielle, alors qu’il est arrivé sur la scène politique en 2019 avec 1,29% aux législatives, il apparaît maintenant comme un incontournable du paysage politique.

Évidemment Rui Rio, le président du parti de centre droite (PSD), dont est issu Marcelo Rebelo de Sousa, se frotte les mains en se réjouissant de l’écrasement de la gauche et de la victoire du candidat modéré. Ce même Rui Rio qui ne dédaigne pas les alliances avec l’extrême-droite, et dont le résultat observé aux Açores en novembre dernier n’est qu’un avant-goût de ce qui peut advenir.

Du côté des libéraux (IL), Tiago Mayan Gonçalves a été félicité par le président de son parti pour sa campagne remarquable aboutissant à un résultat que personne n’attendait (3,2%). Ce qui peut aussi inquiéter quand, revenant à l’exemple des Açores, on observe la capacité de ce petit parti à s’allier avec plus grand que lui pour abattre la gauche. Reste Vitorino Silva (RIR), bon dernier avec 2,95% et aussi bon perdant, qui a félicité le gagnant en souhaitant que son second mandat soit différent du premier.

S’exprimant depuis son domicile à Cascais, ville côtière située 30 km à l’Ouest de Lisbonne, Marcelo Rebelo de Sousa a déclaré « les circonstances changent, mais la personne est la même ». Ce qui n’est guère étonnant, compte tenu du caractère humble de cet ancien professeur de droit, vivant depuis 1975 dans sa modeste maison, et qu’il est possible de croiser dans la file d’attente à la caisse d’un supermarché. Souhaitons-lui alors de continuer, à fédérer ses concitoyens, autour de son attachante personne, car le pays a besoin d’un président qui ne tombe pas dans le piège du clivage.

Depuis 1976, les présidents élus au Portugal ont été : António Ramalho Eanes (1976-1986), Mário Soares (1986-1996), Jorge Sampaio (1996-2006), Cavaco Silva (2006-2016) et Marcelo Rebelo de Sousa (2016-2026).

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