Mehr Licht ! ou Itinéraire d’un enfant bâté (20)

Avec ce 20e numéro se termine la série de Jean-Marc Claus – une déclaration d'amour à notre belle région du Rhin Supérieur et à l'Europe, une Europe des citoyens et citoyennes.

« Les mains de l'amitié », sculpture d'Ara Harutyunyan, transportée en 1967 de Carrare (Italie) à Erevan (Arménie), villes jumelées en 1973. Foto: 23artashes / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Par Jean-Marc Claus) – Sur son lit de mort, Victor Hugo affirmait « Je vois de la lumière noire », alors que dans la même situation, un demi-siècle plus tôt, Johann Wolfgang von Goethe s’exclamait « Mehr Licht ! Mehr Licht ! ». Je me suis trop longtemps réclamé du premier, tout en méprisant le second. Trop longtemps, c’est mon enfance, mon adolescence et une partie de mon âge adulte, période rapportée ici par l’ex-enfant bâté que je suis.

Épisode Vingt : KL & EJ

Tout commence un matin de Janvier 2017 avec une voix entendue fortuitement sur France Bleu Alsace, alors que sur l’autoroute, je suis coincé dans un bouchon à proximité de Strasbourg. Deux à trois minutes d’une rubrique intitulée « De l’autre côté du Rhin », des intonations qui me renvoient à Novembre 1986, début d’une période de dix mois passés à Freiburg im Breisgau. C’est ainsi que je découvre l’existence de Kai Littmann, puis un peu plus tard, d’Eurojournalist.

Le nom du premier m’est plutôt familier alors que son prénom, je le trouve disons quelque peu… exotique. Quant à la dénomination de la publication en ligne, comme c’est bizarre ! Eurocorps, Euro-Mir, Europol, Eurosat, Eurodéputé(e), Eurovision, Eurostat, je connais ! Mais Eurojournalist, quelle est donc cette usine à gaz ? Une officine lobbyiste, peut être ? Oui, mais non, même si je n’adhère pas à tous les points de vue, exprimés tant sur les ondes que sur le web, je ne peux pas l’accuser pour autant de servir les intérêts du Grand Kapital. Bon, mais dans ce que j’entends et lis, s’il y a entre nos analyses des points de convergences, il n’en demeure pas moins certaines divergences.

C’est justement à propos d’un point de divergence que j’écris un courriel à Kai Littmann. Il est alors question de la division de la Gauche en vue des présidentielles de 2017, et de cet intéressant article d’un certain Charles Nouar, intitulé en mode putaclic « Le Pen, Macron, Mélenchon : la même promesse de révolution. ». Autant le contenu est propre à alimenter la réflexion, autant le titre, à mon sens, a quelque chose de putassier. Je ne suis déjà plus très en phase avec Mélenchon, et cela bien avant son texto ordurier du mois de Mai 2017 à l’adresse du Parti Communiste Français. Texto qui m’atteindra personnellement, mais tout de même, le placer sur la même ligne que Le Pen et Macron ! Mon courriel donne très rapidement lieu à une invitation à discuter de vive voix. On se rencontre un après-midi de Février 2017, dans cette brasserie strasbourgeoise où s’était quelques mois plus tôt réfugié Manuel Valls après son mémorable enfarinement.

Pause café d’un côté, tea time de l’autre, ce n’est pas gagné d’avance ! Nous savons fort heureusement dépasser ces visions diamétralement opposées pour nous concentrer sur l’essentiel. De nos échanges naît un article car il m’invite à exprimer mon point de vue dans les colonnes d’Eurojournalist. Plus qu’une proximité de pensée, nous avons ce sentiment de nous connaître depuis toujours. Étonnamment, quand j’ai vécu une dizaine de mois à Freiburg im Breisgau, ville dont il est originaire, Kai Littmann se trouvait alors à Nice où il étudiait la littérature et la civilisation…  anglaises. Mais, son domicile fribourgeois était à proximité du 352eme Hôpital des Armées Alain Limouzin, auquel je fus affecté, lors de mon année consacrée à l’occupation militaire de l’Allemagne. Il arrive parfois de ces coïncidences…

Autre coïncidence, nous tenons tous deux en très haute estime Georges Federmann. Lui le connaît par une  crèche parentale à laquelle ils ont tous deux participé ; moi par ma formation d’infirmier de secteur psychiatrique, époque où Georges était interne en médecine. Chose d’autant plus troublante que je suis alors en plein dans la relecture de « La prophétie des Andes », roman de James Redfield autant adulé que critiqué, mais qui me rend depuis sa découverte, très attentif aux coïncidences. Tenant cet ouvrage pour un sain livre, sans que j’en fasse pour autant un Saint Livre, je me dis que cette rencontre n’a rien de fortuit. Elle marque la clôture d’une époque et le début d’une nouvelle période de ma vie. Même s’il faut ensuite attendre décembre 2019 pour qu’après en avoir lu régulièrement les publications en ligne de divers contributeurs, je me mette à participer activement à Eurojournalist.

Cette rencontre, ainsi que ma participation à ce journal en ligne, témoignent du caractère effectif et irréversible de ma guérison. Finies la germanophobie et l’europhobie, mais aussi la méfiance envers celles et ceux dont je ne partage pas la totalité des idées et idéaux. Comme l’a si justement souligné Jeanne Barseghian, lors de sa campagne des municipales 2020 à Strasbourg : « Personne n’a raison tout seul. ».

Eurojournalist se distingue par sa ligne éditoriale humaniste et progressiste se voulant également pluraliste. Ainsi, les auteur(e)s des articles ne sont pas forcément tou(te)s du même avis ou de la même orientation politique. Mais de cet ensemble de textes, quotidiennement enrichi, se dégage une même ambition de construire une Europe de l’humain et non de la spéculation boursière, une société où les officines privées ne détruisent pas les services publics, un monde où chacun peut se faire sa petite place au soleil sans avoir à liquider son voisin pour y parvenir.

Par ailleurs, ne pas reconnaître la valeur des idées de celles et ceux dont on ne partage pas la couleur politique, alors que ces mêmes idées sont moteurs de progrès social, relève de la pire malhonnêteté intellectuelle. Lucien Neuwirth (1924-2013) et Simone Veil (1927-2017) n’étaient pas de gauche, mais leurs victorieux combats pour l’accès à la contraception (1967) et la légalisation de l’IVG (1975) dépassaient le clivage droite/gauche. En revanche, ils étaient tous deux très loin de cet actuel « En même temps » macronien, au double sens particulièrement immonde.

Merci d’avoir suivi cette série, dont l’intégralité des 20 épisodes sera bientôt téléchargeable en format PDF, libre de droits d’auteur.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste