« Merci, Madame Merkel… »

De milliers de collaborateurs de l’armée allemande en Afghanistan avaient fait confiance en la promesse de la chancelière de les évacuer du pays. Cette confiance risque de leur coûter la vie.

La ville de Kaboul s'est transformée en trappe mortelle pour de milliers de personnes. Foto: Gerd Eichmann / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – Le monde entier suit l’évolution en Afghanistan et en particulier, à Kaboul. Un courrier rédigé par un ancien traducteur afghan qui travaillait pour l’armée allemande, illustre tout le drame qui s’y passe actuellement. Faisant confiance en la promesse de la chancelière Angela Merkel qui, il y a trois semaines, avait promis d’évacuer le personnel civil afghan de l’armée allemande, l’homme avait été content de se trouver, avec sa famille, sur la liste officielle des personnes autorisées à être acheminées vers l’Allemagne. Aujourd’hui, il doit se cacher dans une maison à Kaboul, avec trois anciens collègues et leurs familles, où ils attendent la suite. Ou leur fin. Les promesses faites hier par les Taliban lors d’une conférence de presse ne suffisent pas pour rassurer les personnes concernées.

« Nous ne pouvons ni sortir de la maison, ni y rester, ni essayer de nous rendre à l’aéroport, car les Taliban ont installé des points de contrôle partout. Et là, les Taliban vont de maison en maison, en cherchant des gens comme nous. Qu’allons-nous devenir ? »

La situation est la même pour de nombreux collaborateurs de NGOs qui se trouvent encore à Kaboul. Certains étaient logés dans des « Safe House », des « maisons sûres », mais les Taliban disposent de listes de ces maisons et les fouillent actuellement. La plupart de ces « Safe Houses » ont été évacuées quelques heures avant l’arrivée des Taliban, comme l’a relaté Marcus Grotian, le coordinateur du « Réseau de Partenaires », et les habitants se cachent actuellement là où ils peuvent.

Le traducteur écrit : « Nous ne savons pas quoi faire. Nous disposons de tous les papiers nécessaires pour un visa allemand, nous avons gardé nos anciens badges de service pour pouvoir prouver que nous avons droit à ce visa, mais si les Taliban nous trouvent en possession de ces documents, ils nous tuent sur le champ. On fait quoi, alors ? On détruit ces documents ou on les garde dans l’espoir que la Bundeswehr vient nous chercher pour nous acheminer vers la sécurité ? » Cet espoir est vain. Aucun soldat étranger ne s’aventurera dans les quartiers de Kaboul, dans une situation où il devient, d’heure en heure, plus difficile de garder au moins le contrôle de l’aéroport.

« Si Madame Merkel ne nous avait pas promis de nous sortir d’ici, on aurait eu trois semaines avant l’arrivée des Taliban pour essayer de quitter le pays par d’autres moyens. Mais nous avions fait confiance en cette promesse. Maintenant, nous sommes dans une trappe et il n’y a plus de sortie pour nous et nos familles. Nous sommes condamnés à mort. Merci, Madame Merkel… »

Ce courrier d’un traducteur afghan illustre toute la défaillance de la politique allemande qui avait des semaines pour effectuer cette évacuation. Si les Taliban ont promis de ne pas persécuter les fonctionnaires du gouvernement afghan déchu en les invitant à reprendre le travail, il n’en est pas pareil pour les milliers de citoyens afghans qui avaient travaillé pour les armées occidentales.

L’inertie du gouvernement allemand pendant les dernières semaines, coûtera la vie à de milliers de personnes. La faible excuse du ministre des affaires étrangères Heiko Maas, qui avait déclaré « nous n’avons pas évalué la situation correctement », devrait conduire immédiatement à la démission du ministre, ainsi qu’à celle de la ministre de la défense, Annegret Kramp-Karrenbauer. Des ministres qui portent la responsabilité pour de milliers de morts, ne peuvent, en aucun cas, rester en poste. Le « pont aérien » que les Allemands tentent de mettre en place entre Kaboul et Taschkent, ne fonctionne pas vraiment et ne servira plus à rien. Les personnes à évacuer n’ont aucune chance de rejoindre l’aéroport. L’Allemagne porte la responsabilité pour le destin de ces milliers de personnes et un jour, il faudra que ces responsable expliquent pourquoi, ces dernières semaines, ils ont évacué et rapatrié en Allemagne, non pas les personnes menacées, mais les stocks de bière en cannettes qui restaient encore aux centres militaires allemands. Il y a des moments où on a honte d’être allemand.

Mise à jour : le traducteur dont il est question dans cet article et sa famille, a été miraculeusement sauvé par le deuxième avion de la Bundeswehr qui a pu évacuer 120 personnes de Kaboul. Si ce drame se termine heureusement bien pour cette famille, de milliers d’autres personnes dans la même situation n’auront pas la chance d’être évacuées.

1 Kommentar zu « Merci, Madame Merkel… »

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