Merkel – Macron : l’âge de la glace

Le courant ne passe ni personnellement, ni politiquement... Foto: The Kremlin, Moscow / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – On aurait pu penser que tout le monde était de bonne humeur à l’occasion de la grande fête des 30 ans de la chute du Mur à Berlin. Mais, comme l’a divulgué le « New York Times », la chancelière allemande et le président français se sont livrés à une dispute qui démontre l’incompréhension et l’antipathie qui se sont installées entre les deux personnages qui théoriquement, devraient former le « moteur européen ».

Selon le quotidien américain, Angela Merkel aurait dit à Emmanuel Macron « Je comprends votre besoin de mener une politique disruptive, mais j’en ai marre de devoir ramasser les morceaux. A chaque fois, je dois recoller la vaisselle que vous cassez pour que nous puissions encore nous asseoir et boire une tasse de thé ensemble ». Une telle phrase dans un contexte diplomatique, c’est fort.

La raison de cet amer reproche ? La déclaration du Président français concernant l’OTAN, dont il estimait qu’elle était « en état de mort cérébrale ». Emmanuel Macron, lui, a répondu à Merkel qu’il ne pouvait pas se rendre au sommet de l’OTAN début décembre et « faire semblant que les Etats-Unis et la Turquie agissent au nom de tout le monde ».

Le Président français a sans doute raison de critiquer l’OTAN, mais la forme de cette altercation est surprenante, surtout publiquement. Force est de constater que le clivage entre Emmanuel Macron et Angela Merkel s’approfondit de semaine en semaine, et que les chances qu’il puisse se produire un rapprochement pendant la mandature en cours s’amoindrissent. D’un côté, une Angela Merkel en fin de course et qui cherche juste à terminer son dernier mandat sans trop de heurts, de l’autre côté, un Président français sous pression et dans l’obligation de résultats après les nombreuses annonces faites au début de son mandat. Les deux ne regardent plus du tout dans la même direction et on constate que les deux s’énervent mutuellement.

Si cette année, le Traité d’Aix-la-Chapelle et la création du « Parlement Franco-Allemand » ont crée un cadre exceptionnel permettant de conduire les relations franco-allemandes à une toute nouvelle dimension, la cheffe du gouvernement allemand et le chef de l’état français qui n’arrivent plus à s’entendre. L’antipathie personnelle s’explique en partie par un conflit de génération, mais pas seulement. Force est de constater que les intérêts et la vue sur le monde diffèrent de plus en plus entre Paris et Berlin et les acteurs régionaux et locaux auront fort à faire pour sauver l’esprit de ces innovations franco-allemandes lancées cette année.

Cette mésentente franco-allemande vient au plus mauvais moment, à un moment où l’Union Européenne devrait se présenter unie face au « Brexit », face aux « guerres économiques » sur l’échiquier international, dans un contexte marqué par de nombreux conflits graves dans le monde. L’interpellation publique de la chancelière va à l’encontre de tout usage diplomatique et montre que la chancelière est vraiment en fin de course.

Il y a des chances à ce que Macron et Merkel n’arriveront plus à se rapprocher pendant ce mandat – il serait temps que la chancelière passe le témoin et que le Président français apprenne aussi à se passer de l’une ou l’autre déclaration publique. Quoi qu’il en soit, les interférences entre Paris et Berlin commencent à hypothéquer l’Union Européenne. Angela et Emmanuel devraient effectivement s’asseoir et prendre une tasse de thé ensemble…