Migrants : L’aide de l’UE à Athènes

Une situation absurde et tragique

Le Pont à Edirne, en Thrace (frontière gréco-turque) Foto: Fatalflex/Wikimédia Commons/CC-BY-SA/3.0Unp

(Marc Chaudeur) – Hier, plusieurs enfants sont morts de froid, dont un bébé d’un an et demi. Il faisait autour de zéro degré sur la frontière entre Grèce et Turquie. L’Union Européenne annonce qu’elle va aider plus conséquemment la Grèce, alors que les ONG humanitaires réclament un traitement plus humanitaire du problème. Les îles grecques concernées sont déjà engorgées, et cela depuis bien longtemps. Il faut, en effet, aider la Grèce. D’une manière ou d’une autre. Et il aurait fallu l’aider depuis au moins cinq ans. Mais comment ? En un sens sécuritaire, ou en un sens humanitaire ? Et ces deux perspectives sont-elles incompatibles ?

A Edirne, en Thrace, ce mercredi, les Turcs de la frontière ont accusé les douaniers grecs d’avoir ouvert le feu sur 6 réfugiés qui essayaient de passer les barbelés.Ils les ont blessés tous les 6 ; l’un d’entre eux est mort plus tard à l’hôpital.

Un événement caractéristique de la situation tragiquement bloquée à la frontière : les Turcs précipitent les réfugiés qu’on dit Syriens (mais cela demanderait plus ample information puisqu’ un certain nombre de journalistes présents sur le terrain ne s’accordent pas sur ce point), ils les précipitent sur la frontière, où ils restent fixés pour une durée indéterminée, risquant la faim, la soif, les maladies, la mort.

Après la mort à Idlib de 34 soldats turcs bombardés par les Syriens et les Russes, Erdoğan a décidé d’ouvrir ses frontières, comme on sait, laissant une bonne part potentielle des 3,6 millions de réfugiés se jeter sur la pauvre Grèce à peu près sans assistance, ni de l’UE ni de personne depuis au moins 2014. Les chiffres des réfugiés ne concordent cependant pas avec ceux que donne le gouvernement turc, qui utilise cette tentative organisée (il a affrété des taxis pour le trajet vers les barbelés, notamment) de fuir le pays comme un moyen de pression et de chantage.

Ursula von der Leyen, en visite mardi, a déclaré que « la première des priorités, c’est d’assurer l’ordre sur les frontières de la Grèce, qui sont aussi les frontières de l’Europe ». La présidente de la Commission Européenne a promis une aide de 700 millions d’euros à la Grèce.

La sécurité des frontières européennes, oui. Des Syriens ? Not in my backyard. Le premier ministre grec (droite conservatrice) a déclaré qu’il suspendait tout octroi d’asile durant un mois. Au début de cette semaine, on a vu des garde-côtes grecs tirer sur des canots pour empêcher des réfugiés de s’approcher des frontières.

Qu’en est-il de la souffrance de ces milliers de personnes et de l’aspect humanitaire de ce problème ? Le Conseil Européen pour les réfugiés et les Exilés (CERE) a déclaré que les réfugiés demandant asile et protection ne devaient pas être traités d’abord comme une menace pour la sécurité, avec d’ailleurs un langage militaire, comme s’il s’agissait d’une invasion militaire. Il ne s’agit pas là d’une guerre, dit le CERE. Le Conseil ajoute que toute violence envers des personnes demandant asile et protection devait être condamnée et punie, et non pas favorisée par l’UE !

C’est pourquoi plusieurs organisations humanitaires, dont HRW (Human Rights Watch) ont rappelé que la base même de toute activité de l’Union Européenne devait être le partage des responsabilités entre les Etats de l’UE, le doit d’asile pour tous et l’assurance que toute personne est et sera traité avec humanité.

Les chiffres dont parlent journalistes et autorités turques ou grecques varient considérablement. Les Turcs parlent de 130 000 personnes qui auraient déjà atteint la Grèce. Quant aux autorités grecques, elles avancent que 24 000 personnes auraient été fixées sur la frontière depuis samedi dernier. Et que très peu nombreuses sont celles qui seraient parvenues à la franchir.

Un problème récurrent se pose là : celui des ajustements des principes humanitaires avec les réalités sociales. Il convient de trouver un juste équilibre et surtout, d’anticiper raisonnablement les futurs risques de ghettoïsation et les problèmes d’intégration. Nous reviendrons bientôt sur ces questions in concreto à propos de quelques pays européens.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste