Monsieur Robert Fico, nous vous avons pas bien compris…

Le premier ministre slovaque a lancé une nouvelle attaque de fondamentalisme chrétien – qui verse de l’huile dans le feu qu’entretiennent les extrémistes.

Robert Fico, le premier ministre slovaque, compte parmi les pires incendiaires en Europe. Foto: Michal Cupka / Wikimedia Commons / CC-BY 2.0

(KL) – Monsieur Fico, vous êtes le premier ministre d’un petit pays européen, la Slovaquie, et visiblement, vous ne vous retrouvez plus dans ce que nous appelons communément «les valeurs européennes». Vous savez, ce sont des choses que nous autres européens, on a mis des siècles à inventer, à imposer contre la volonté des puissants de l’époque et le tout se résume par ce que nous désignons comme «Les Droits de l’Homme». Malheureusement, le document qui contient ces «Droits de l’Homme», n’a pas été rédigé en langue slovaque et c’est probablement pour cela que vous les ignorez. Mais franchement, Monsieur Fico, ce que vous nous avez sorti ce week-end lors d’un point-presse dans votre belle capitale Bratislava, on n’a pas très bien compris.

Vous craignez, comme vous l’avez dit, «que les femmes slovaques soient molestées sur les places publiques», à l’instar des incidents de Cologne que vous attribuez aux réfugiés qui viennent actuellement en Europe parce que les Etats-Unis, la Russie, la France, la Grande-Bretagne, le dictateur Bachir al-Assad et d’autres bombardent leurs pays. Mais là, nous nous posons la question qui pourrait bien molester les femmes slovaques sur les places publiques dans votre joli pays ? Vos compatriotes ? Les touristes ? Vous ne pouvez pas parler de réfugiés là, car il n’y en a pas chez vous. En 2015, Monsieur Fico, 169 réfugiés avaient l’étrange idée de demander asile chez vous et dans votre grâce, vous avez accordé le droit de séjour à 8 d’entre eux. A 8. Huit. Est-ce que vous craignez réellement que ces 8 pèlerins puissent molester vos femmes slovaques ? On a du mal à y croire…

Et vous avez annoncé, Monsieur Fico, ne plus vouloir participer financièrement aux opérations humanitaires en faveur des réfugiés, mais uniquement aux opérations visant à fermer les frontières européennes. Pardi ! On ignorait que la Slovaquie contribue financièrement à quoi que ce soit en Europe, Monsieur Fico, on pensait au contraire que votre pays recevait tous les ans un peu plus de 2,3 milliards d’euros des caisses bruxelloises…

Et vous avez également déclaré que désormais, vous ne laisserez plus entrer des réfugiés musulmans dans votre pays, car vous craignez «l’islamisation» de ma Slovaquie. Euh, «l’islamisation» ? Par les 8 réfugiés musulmans que vous avez accepté et qui doivent trembler de peur dans cette ambiance xénophobe que vous avez su installer dans votre pays ? Faudra qu’ils fassent fort, ces 8, pour transformer votre forteresse du fondamentalisme chrétien en pays musulman.

Et, pour que l’Europe vous entende, vous avez annoncé poursuivre votre plainte contre l’Union Européenne par tous les moyens à votre disposition. Vous savez, Monsieur Fico, normalement, nous éprouvons de la sympathie lorsque «les petits» se rebiffent contre «les grands», mais là, vous vous mettez en dehors de ce qui reste de la «famille européenne». Vous avez porté plainte parce que l’Union Européenne avait décidé que sur les 120 000 réfugiés qu’elle voulait distribuer sur les états-membres de ce club auquel votre pays adhère, la Slovaquie devait en accueillir 802. Sur 120 000. Sachant que bien plus d’un million de réfugiés sont réellement arrivés en Europe en 2015. Il est vrai que par rapport à vos propres actions de solidarité en 2015, cela paraît énorme. Ah oui, vous avez souligné que vous aviez affrété un avion en fin de l’année 2015 qui est allé chercher 149 réfugiés syriens en Syrie – tous de croyance chrétienne. Un bel exemple de «l’apartheid chrétienne» ! Juste pour votre information : le bourg de Bad Krozingen en Pays de Bade (ça se trouve au sud de la ville de Freiburg) a accueilli en 2015, trente fois plus de réfugiés que tout votre pays. Et ce, sans porter plainte devant la Cour Européenne à Luxembourg.

Vous savez quoi, Monsieur Fico, nous ne voulons plus de vous dans ce club que nous appelons «l’Union Européenne». Des gens comme vous et vos amis Orban, Zeman, Kaczynski et les autres extrémistes nationalistes, vous pourrissez les derniers restes de ce que nous voulons défendre. Ce sont des choses que vous et vos amis ne connaissent pas – la démocratie, la solidarité, la compassion. Et puisque vous trouvez notre club aussi insupportable, pourquoi vous et vos amis, vous ne rejoignez pas d’autres partenaires qui eux, défendent des valeurs beaucoup plus proches de votre vision du monde ? La Russie de Vladimir Poutine se ferait un plaisir d’accueillir la Hongrie, la République Tchèque, la Pologne et votre Slovaquie en son sein et vous y seriez très bien ! Beaucoup mieux que dans l’Union Européenne dont les valeurs vous semblent si injustes… Un peu comme à la bonne vieille époque du Bloc de Varsovie. Et vous savez quoi, Monsieur Fico, si vous quittez notre club, l’Union Européenne, personne ne le remarquera, car les contributions de votre pays à l’Europe se sont résumés, jusqu’alors, à ouvrir votre portefeuille pour y engloutir les milliards européens. Vous pensez réellement que nous ne pourrions pas nous passer de vous ?

A moins qu’on ait mal compris vos vociférations de Bratislava, Monsieur Fico, à ce moment-là, nous vous présentons toutes nos excuses. Mais un moment donné, nous pensions réellement que vous vouliez prendre l’argent européen, tout en refusant de mettre en œuvre le petit peu de politique européenne qui reste encore. Nous nous sommes trompés, Monsieur Fico ? Hein ?

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