Mutti et ses quatre présidents

Elle était quand même un peu amoureuse de Nicolas Sarkozy, non ? Foto: Sebastian Zwez / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0de

(KL) – Hier soir, Angela Merkel était l’invitée d’Emmanuel Macron à Beaune pour y déguster les spécialités bourguignonnes et pour y être distinguée par la Grande Croix de la Légion d’Honneur. Si les relations franco-allemandes ont progressé pendant ces 16 ans, surtout en ce qui concerne les instruments mis en œuvre pour faciliter la coopération franco-allemande, le « moteur franco-allemand » tousse ces derniers temps. Malgré une grande proximité affichée avec Emmanuel Macron, Angela Merkel n’a jamais vraiment développé un Amour avec un grand A avec le voisin occidental. La native de l’Uckermark à l’est de l’Allemagne, avait davantage d’affinités avec les pays et cultures de l’est et – les Etats-Unis.

Le premier président français que fréquentait Angela Merkel, était Jacques Chirac. Elue en 2005, année où Chirac perdait le référendum sur le Traité sur une Constitution Européenne. Chirac, habitué des soirées « knack-bière » avec Helmut Kohl Chez Yvonne à Strasbourg, ne savait pas trop faire de cette jeune femme venue de l’est. Et Angela Merkel ne savait pas quoi penser du charmeur Chirac qui visiblement, avait dégoûté son électorat de l’Union Européenne. Mais cette question ne se posait pas très longtemps, en 2007, arrivait Nicolas Sarkozy à l’Elysée.

Avec Nicolas Sarkozy, le courant passait. D’une part, Merkel et Sarkozy étaient politiquement assez proches et Merkel était visiblement amusée par le côté « Louis de Funès » du président français. Les deux se voyaient souvent, s’entendaient bien, organisaient quelques sommets franco-allemands et ensuite, avaient surtout à gérer la crise des marchés financiers de 2008, ce qui mit, pendant un certain temps, une halte aux relations franco-allemandes. Les gouvernements avaient d’autres chats à fouetter.

En 2012, Nicolas Sarkozy est remplacé par le socialiste François Hollande. Les relations furent d’abord polies et distantes, mais cela allait changer au fur et à mesure. Lors des attentats de Paris, lorsque François Hollande se comportait dignement en chef d’état, Angela Merkel se tenait à ses côtés, partageant un instant authentique, unis dans la douleur des attentats terroristes. En Allemagne, on se souvient également de la visite commune avec François Hollande au Parlement Européen à Strasbourg, lorsque Marine Le Pen ne trouvait rien de mieux que d’insulter le président français – Angela Merkel avait alors pris, avec une élégance que l’on le lui soupçonnait pas, la défense de François Hollande. Exit François Hollande, entrée sur scène Emmanuel Macron.

Malgré le fait que des mondes séparent Emmanuel Macron et Angela Merkel, c’est pendant ce mandat que les relations franco-allemandes ont connu un tournant. Non pas parce que les dites relations seraient au beau fixe, loin de là. Actuellement, les intérêts de la France et celles de l’Allemagne ne sont pas toujours les mêmes et « Mutti » Merkel et le président aux attitudes féodales vivent dans deux mondes différents. Pourtant, c’est pendant ce quinquennat que le Traité d’Aix-la-Chapelle a été signé, le Parlement Franco-Allemand a été crée, tout comme d’autres institutions qui pourraient, un jour, faciliter la coopération franco-allemande. Le pire moment pendant les années Merkel-Macron était la fermeture de la frontière franco-allemande au mois de Mars 2020, sans aucune concertation entre les deux pays.

Le bilan franco-allemand d’Angela Merkel est relativement terne. Lorsque l’on pense aux relations cordiales entre Helmut Kohl et Jacques Chirac ou l’inoubliable accolade avec François Mitterrand sur les tombes de Verdun ; les relations amicales entre Giscard d’Estaing et Helmut Schmidt, ou même les relations créatives entre le Général de Gaulle et Konrad Adenauer, les 16 années d’Angela Merkel n’étaient pas marquées par des images franco-allemandes fortes.

Ce sera aux historiens d’évaluer l’ère Angela Merkel et il n’y a pas d’urgence pour ce faire. Mais pendant ces 16 ans, le « moteur européen » était souvent en panne, les deux pays n’ont pas non plus donné les bonnes impulsions à l’Europe, beaucoup de choses auraient pu être faites. Mais, si ces prochaines années, la régions frontalière pouvait se développer grâce à des instruments mis en œuvre pendant cette ère Merkel, son bilan franco-allemand pourrait encore s’améliorer. Aux successeurs d’utiliser ces instruments avec intelligence.

Tschüss « Mutti » !