No, Mister Johnson

Le premier ministre Boris Johnson voulait rencontrer les représentants européens le week-end dernier pour discuter de sa « proposition » concernant la question irlandaise. Mais l'UE a refusé.

"J'vous jure, les gars, après le hard Brexit, ce sera cool ! Promis, juré !" Foto: Prime Minister's Office / Wikimedia Commons / OGL v.3

(KL) – La proposition de Boris Johnson était ridicule, autant en ce qui concerne le contenu que son format d’ultimatum. Son idée de déplacer les postes de contrôle de la future frontière irlando-irlandaise à l’intérieur des terres, est dépourvu de sens et ne règle en rien les tensions qui renaissent actuellement entre l’Irlande du Nord et l’Irlande. En plus, la présentation de cette « proposition » (« c’est ma dernière proposition concernant cette question ») était aussi ridicule que la « proposition » en elle-même – Boris Johnson s’est manœuvré dans une situation où la dernière sortie sera le « hard Brexit » – et pourtant, c’est exactement ce que le parlement britannique lui a interdit par voie législative.

Pour la Commission Européenne, cette « proposition » ne valait même pas le sacrifice de quelques heures le week-end dernier pour en discuter avec le fantasque chef du gouvernement britannique. Et la Commission Européenne a raison de refuser de faire office de figurant dans la quête de Boris Johnson de son « hard Brexit ». C’est aujourd’hui, lundi, que Johnson aura l’occasion de s’expliquer sur ses plans – et le compte à rebours s’accélère.

Le « Backstop », qui prévoit le maintien de l’Irlande du Nord dans le marché intérieur de l’Union Européenne, le temps que les Britanniques arrivent avec une vraie idée sur la gestion de cette question (et ça pourra durer : pendant plus de 3 ans, les Britanniques n’avaient pas une seule idée concernant cette question), est non-négociable pour l’Union Européenne, qui est obligée de respecter la situation de l’Irlande, état-membre, de sécuriser ses frontières extérieures (en cas de Brexit, l’une de ses frontières extérieures traversera l’Irlande!) et qui a très clairement indiqué de ne pas revenir sur ce point crucial. Mais le « Backstop » est exactement ce que refuse à son tour Boris Johnson qui craint qu’une telle solution maintiendrait la Grande Bretagne pour un temps indéfini dans l’Union.

On sent une irritation grandissante dans les institutions européennes face à cette mise en scène shakespearienne de Boris Johnson – qui se moque autant de l’Europe que de son propre peuple. Jamais élu, dépourvu d’une majorité parlementaire, Boris Johnson est en train de se transformer en Don Quichotte du Brexit, qui se bat contre des moulins à vent européens.

Le refus des institutions de discuter avec Johnson le week-end passé prive le premier ministre de sa communication mensongère : depuis des semaines, il fait miroiter aux Britanniques qu’il serait en train de négocier avec l’Union Européenne, en disant à ses compatriotes qu’il y aurait d’excellents progrès dans ces négociations. Est-ce qu’on a coupé internet en Grande Bretagne ? Comment est-il possible qu’une partie des Britanniques pense réellement qu’il y a des négociations et des progrès ?

Il est grand temps que les Britanniques réagissent en mettant ce feu follet de la politique britannique au placard. Boris Johnson et les Tories organisent attaque sur attaque sur la démocratie britannique et la cohésion du Royaume Uni, tout en obligeant le reste de l’Europe à s’occuper depuis des années des états d’âme d’un pays qui ne sait pas ce qu’il veut. L’Union Européenne ne dispose que de peu de moyens pour neutraliser Boris Johnson – c’est aux Britanniques de régler cette question. Destituer le premier ministre, organiser des élections anticipées, faire voter les Britanniques une deuxième fois sur le fond de la question – toutes ces solutions ne pourront être mis en œuvre que par les Britanniques eux-même.

Il faut maintenant que l’Union Européenne reste ferme dans les discussions qui vont suivre. Depuis plus de 3 ans, les Britanniques accaparent une bonne partie des ressources européennes, et en vue des innombrables dossiers à traiter au niveau international, il est inconcevable que l’on continue à perdre du temps avec des Britanniques qui ne savent plus où ils veulent aller. Que Boris Johnson présente ses « propositions » ridicules, qu’il fasse d’autres propositions – le 19 octobre, et c’est la loi britannique qui le dit, soit il présente un accord avec l’Union Européenne, soit il revient à Bruxelles pour demander poliment la nième extension du délai du Brexit. Mais l’Union Européenne devrait faire une contre-proposition : soit, la Grande Bretagne signe le traité négocié encore avec Theresa May et prend ses responsabilités, soit elle retire tout simplement la demande de sortie de l’Union selon l’article 50. Et on oublie toute cette histoire le plus vite possible.

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