Non, ce n’est pas une compétition

Les premiers classements apparaissent pour déterminer quel pays gère « le mieux » la corona-crise. Ces classements ne servent strictement à rien et ne font que stimuler les nationalismes malsains.

La lutte contre le Covid-19 n'est pas une compétition entre les pays - elle se gagne ou perd ensemble. Foto: Kassandro / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – Ah, on est content, du côté allemand. Le magazine hebdomadaire STERN a publié un classement qui indique que l’Allemagne serait le 2e pays le mieux classé, au niveau mondial, s’il vous plaît, en ce qui concerne la gestion de la corona-crise. Mais on est en droit de se poser la question à quoi servent ces classements, si ce n’est pour stimuler ces vieux sentiments nationalistes qui sont en train de pourrir la cohésion européenne qui elle, est déjà assez malmenée comme ça.

Déjà, il est quasiment impossible de comparer la situation entre les pays. Les systèmes de santé sont différents, les moyens sont différents, les politiques sont différentes et en plus, même à l’intérieur des pays, les différences régionales sont énormes. Certaines régions, comme la Lombardie, l’Alsace, la région de Madrid ou la Rhénanie-Westphalie du Nord, sont devenues des « régions martyres », tandis que d’autres régions, dans les pays concernés, ont été largement épargnées par le SARS-CoV-2. Pour l’instant, personne ne sait si cela restera ainsi ou si ces autres régions essuieront encore ce virus.

Ensuite, les chiffres publiés sont relevés partout de différentes manières et ne peuvent, par conséquent, ne représenter qu’une approximation. Comprendre : on compare des pommes et des poires. A quoi bon ? A quoi pourrait bien servir ce genre de « compétition » ?

Ces classements ne sont pas seulement vains : ils versent de l’huile sur le feu des nationalismes qui se répandent déjà partout. Les frontières fermées, le combat contre cette terrible maladie est mené à l’intérieur non pas de l’Europe, mais de chaque pays. Si l’Union Européenne veut déployer des programmes de sauvetage économique (qui consiste principalement à injecter des crédits dans l’économie dont tout le monde sait qu’aucun pays ne sera jamais en mesure de les rembourser), il n’y a aucune approche commune en ce qui concerne la façon de combattre ce virus (confinement, immunisation de groupe, etc.), aucune approche commune en ce qui concerne le « déconfinement », aucune approche commune au niveau social où certains pays du sud de l’Europe opèrent actuellement de véritables petites révolutions sociales, tandis que les pays du nord de l’Europe font leur possible pour revenir le plus rapidement dans les systématiques d’avant-crise.

S’il ne faut pas surestimer l’impact de ce genre de classements, force est de constater qu’ils contribuent à approfondir le mépris de l’Autre, à renforcer des sentiments de supériorité ou d’infériorité nationales, et ainsi, à ce terrible repli national auquel on assiste actuellement et qui défait en peu de temps beaucoup des acquis des dernières décennies.

L’avenir ne peut pas se situer dans le retour vers les égoïsmes nationaux ; au contraire, il faudra une autre Europe avec une solidarité toute autre que par le passé. Donc, ces classements sont non seulement intrinsèquement faux, mais même dangereux, car ils contribuent à cette évolution qui, déjà à moyen terme, sera toxique pour tout notre continent. Et c’est pour cela que nous ne vous donnons pas ce classement – il est totalement inintéressant et faux…

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