«Nur Bares ist Wahres !», dicton encore valable ?

A l’aube d’une société où le numérique sera totalement incontournable, une nouvelle cybermonnaie risque d’isoler davantage les citoyens européens les plus précaires.

Se passer d’argent liquide nuirait à une part de la population qui ne dispose d’aucun autre moyen de payement. Foto: Antischokke / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Anouchka Braig) – Le numérique a plus que jamais le vent en poupe ! La pandémie et les mesures sanitaires qui en découlent, ont permis aux citoyens européens, même aux plus réticents, d’adopter un mode de vie davantage immatériel.

Économiquement parlant, l’Allemagne, qui était jusqu’à récemment le pays où régnait l’agent liquide, a dépensé plus par carte bancaire durant la pandémie. En Suède, on constate que 80% des transactions sont déjà électroniques. Cette tendance au « tout numérique », a conduit la Banque Centrale Européenne à imaginer une nouvelle monnaie : l’euro numérique. Mais qu’en est-il des personnes exclues du monde numérique ?

En France, un habitant sur cinq constitue cette population aux profils variés : personnes handicapées, âgées, sans domicile fixe, immigrées, vivant en zone rurale, en grande précarité. Il est vrai que le matériel (hardware) a un coût, et nécessite un certain savoir faire, une fois la connexion établie. Ca a l’air simple, intuitif… quand on y est habitué !

Pourtant, cela a nécessité un apprentissage préalable. Il suffit de voir la réaction d’une personne âgée, lorsqu’on lui explique ce qu’est Internet, Facebook, Youtube, pour comprendre qu’il n’est pas si évident de s’en servir de façon intuitive ! Imagions qu’il lui faille alors payer un achat, effectuer un virement, télécharger un RIB…

Passer à l’euro numérique et supprimer l’argent liquide, rendrait la vie quasi impossible aux personnes éloignées du numérique. Certaines en ont déjà fait les frais, notamment face aux commerçants qui refusent le paiement en espèces en raison de la crise sanitaire ! Pratique, rappelons-le, illégal en plus d’être discriminatoire. Qu’adviendrait-il aussi des personnes bénéficiant d’une mesure de protection, disposant, chaque semaine ou chaque mois, d’une somme précise à retirer en liquide dans un Guichet Automatique de Banque (GAB), mais n’ayant pas de carte de payement ?

C’est en faisant ce constat que la Suède, alors en bonne voie pour se passer du cash et dont 60% des banques ne sont déjà plus en mesure de délivrer des espèces, a adopté une nouvelle loi. Depuis l’an dernier, les banques du pays ont obligation « d’assurer l’approvisionnement d’un niveau suffisant de services pour obtenir de l’argent liquide ».

Pour quelle raison la BCE envisage-t-elle de passer à l’euro numérique ? En réalité, il ne s’agirait pas de remplacer l’euro de notre quotidien, par cette version exclusivement virtuelle. La BCE assure que l’euro numérique existerait en parallèle des espèces, sans les remplacer. Heureusement pour nos concitoyens les plus précaires !

Cette nouvelle monnaie rendrait les transactions instantanées, plus faciles, plus sûres… Mais les personnes isolées du numérique, déjà fragilisées par la crise sanitaire, ne le seraient-elles pas encore d’avantage ? Pour créer un monde toujours plus rapide, plus instantané, faut-il les laisser de côté ? Bien qu’un plan de relance accordera 800 millions d’euros pour faciliter l’accès au numérique pour tous les citoyens français, les résultats ne sont pas gagnés d’avance et risquent de se faire attendre…

La BCE prendra sa décision au cours de ce printemps, pour le lancement, ou non, de l’euro numérique dans les années à venir.

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