On n’arrive presque plus à suivre…

Le Bade-Wurtemberg décrète pour plusieurs de ses districts (Kreise) un couvre-feu qui entre en vigueur aujourd'hui. Rien ne semble pouvoir arrêter la vague actuelle.

Couvre-feu... le Bade-Wurtemberg vient de décréter un couvre-feu pour les 3 premiers districts. Foto: Silanoc / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – La Bavière, la Saxe et la Thuringe étaient, ces derniers jours, les trois Länder présentant des taux d’incidence et de hospitalisations les plus élevés en Allemagne, forçant les responsables politiques de prendre des mesures draconiennes. La Bavière a décrété l’annulation de tous les marchés de Noël (dont le célèbre Christkindlsmarkt à Nuremberg), ainsi qu’un confinement général dans les districts présentant des incidences au-delà de 1000. Pour le reste, la Bavière est en mode « 2G » (vacciné – guéri), ce qui revient dans la pratique, à un confinement des personnes non-vaccinées. La Saxe, elle, se met en confinement général dès aujourd’hui et la Thuringe ne tardera pas non plus, puisque son ministre-président Bodo Ramelow avait déjà annoncé vouloir calquer ses mesures sur le modèle saxon. Et maintenant, c’est le tour au Bade-Wurtemberg.

Actuellement, trois district du Land jouxtant l’Ortenau et donc, l’Alsace, présentent un taux d’incidence frôlant les 650/700. Cette évolution a amené le gouvernement du Land à prendre des mesures d’urgence. Dans les trois districts concernés (Biberach dans la Forêt Noire, Schwarzwald-Baar-Kreis et Ostalbkreis), le gouvernement a décidé d’un couvre-feu entre 21 et 5 heures du matin, mais uniquement pour les personnes non-vaccinées qui par ailleurs, sont déjà exclu de quasiment toute vie publique. Désormais, les personnes vaccinées ne peuvent quitter leur logement pendant la nuit, uniquement en cas d’urgence médicale ou pour se rendre au travail.

Pourtant, on n’en restera pas là. Déjà mercredi, le gouvernement annonce un nouveau « règlement Covid » qui risque d’étendre ces mesures à d’autres districts qui présentent déjà aujourd’hui, un très fort taux d’incidence et une évolution pandémique dynamique. L’Ortenau voisine, avec un taux d’incidence aux alentours de 450, en fait partie.

Les prochains jours seront décisifs pour la suite de cette période d’Avent qui s’annonce plus que tendue. Le « patchwork » des mesures prises n’arrange rien dans cette situation, car le périmètre de validité de ces mesures se rétrécit presque tous les jours. A quoi bon prendre des mesures strictes, par exemple dans les districts qui jouxtent des villes comme Freiburg ou Offenburg, si quelques kilomètres plus loin, d’autres mesures sont en vigueur ? Est-ce que les responsables s’attendent à un miracle, comme à l’époque avec le nuage de Tchernobyl ? L’actuelle vague qui avance très rapidement de l’est vers l’ouest, s’étend de plus en plus et il serait illusoire de penser qu’elle s’arrêtera aux bords du Rhin. Les dizaines de milliers de frontaliers et les nombreux visiteurs allemands en Alsace, assureront que cette vague atteindra dans les jours qui viennent, aussi l’Alsace, pour se répandre ensuite partout en France.

Face à une telle évolution, on ne peut que regretter que deux ans de crise sanitaire n’aient pas suffit pour décider les responsables politiques d’essayer de combattre ce virus ensemble. L’absence de concertation transfrontalière, de mutualisation des ressources médicales et des services d’urgences, après deux ans de cette crise pandémique, est non seulement triste, mais remet en question le fonctionnement transfrontalier de nos institutions de part et d’autre du Rhin.

Le transfrontalier ne devrait pas seulement fonctionner lorsque tout va bien, mais surtout quand il y a des problèmes communs à régler. Ici et là, on peut lire des commentaires sarcastiques sur les réseaux qui semblent se réjouir du fait que le sud de l’Allemagne se trouve de plus en plus sous pression pandémique. « On pensait que les Allemands étaient tellement bien organisés… », se moquent les auteurs de ces commentaires, soulignant à quel point la pandémie est superbement gérée en France et en Alsace. Mais malheureusement, dans quelques jours, cette vague arrivera aussi en Alsace et en France et mettra les responsables politiques devant les mêmes choix difficiles que dans le sud de l’Allemagne.

Faut-il maintenir les marchés de Noël et d’autres grandes manifestations ? Faut-il confiner les personnes non-vaccinées ou carrément toute la population ? Faut-il décréter à nouveau des couvre-feu ? Est-ce que les ressources hospitalières suffisent pour faire face à une nouvelle vague assez violente? Que faire en cas d’apparition de nouveaux variants ? Faut-il remettre tout le monde au télétravail ? Faut-il intensifier le schéma des tests, en les étendant également sur les personnes vaccinées et guéries qui elles, se sentent encore souvent et à tort « en sécurité » ?

Bien sûr, tout le monde espère échapper à la violence de cette nouvelle vague. Comme les gens en République Tchèque, en Autriche, en Bavière, en Saxe et dans le Bade-Wurtemberg. Mais est-ce une raison de refuser depuis deux ans, de gérer cette crise en concertation avec ses voisins ? Est-ce que nous ne sommes pas tous concernés par un virus qui ne connaît ni frontière, ni nationalité ? Au bout de deux ans, le constat est amer : la coopération franco-allemande n’est pas assez solide pour faire face à cette crise ensemble. En cas de doute, chacun préfère « tricoter » ses mesurettes locales et régionales, le plus souvent pour ne pas froisser son électorat.

Seul bémol dans cette approche locale, régionale et nationale : c’est pas comme ça qu’on arrivera à combattre ce virus. Quand on voit le « patchwork » des mesures entre les 16 Länder allemands et l’absence d’une stratégie européenne, on se rend compte que ce virus pèsera encore très longtemps sur nos vies. Refuser la coopération internationale dans une telle situation, c’est refuser l’idée européenne et même l’idée de combattre efficacement ce virus. Cette pandémie aura montré bien plus de choses que nous avions envie de voir…

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