Pandémie : la crise prend 5 millions d’électeurs en otage !

Alain Howiller se penche sur le sort des « TPE » (Très Petites Entreprises), les plus mal loties pendant ces phases de confinement.

Par temps de crise, ce sont les TPE qui souffrent en premier... Foto: Louis Le Sidaner, Paris / Wikimedia Commons / PD

(Par Alain Howiller) – La pandémie a décidément des conséquences souvent inattendues ! C’est ce que peuvent (et doivent) se dire les employeurs et les salariés de ce qu’on appelle les « TPE », une notion qui, traduit dans la réalité économique, sont ce qu’on appelle les « toutes petites entreprises », celles qui emploient moins de… 11 personnes ! Employeurs et salariés de la catégorie représentent une « population » de près de 5 millions de personnes.

Ce qui est évidemment loin d’être négligeable, contrairement à ce que le label pourrait faire croire ! Les « TPE » devraient organiser, depuis le printemps, des élections pour pourvoir au remplacement des élus (délégués syndicaux, délégués du personnel, membres des conseils économiques et sociaux, candidats aux fonctions de juges prud’homaux) sortis des urnes en 2017.

Une compétition CFDT contre CGT – A l’époque, le résultat de l’ensemble des élections professionnelles avaient fortement consolidé le rang de premier syndicat du privé de la CFDT : le phénomène illustrait la montée des syndicats dits « réformistes » (CFDT, CFTC, UNSA…) face aux syndicats dits « contestataires » (CGT, Sud, FO…). La « Confédération Française Démocratique du Travail – CFDT » devançait notamment la « Confédération Générale du Travail – CGT ». Cette dernière, pendant longtemps premier syndicat français grâce à ses résultats dans le secteur public (mais aussi, en 2017, aux premières élections dans les TPE), devait céder (en Décembre 2018) sa primauté à la CFDT que son secrétaire général, Laurent Berger, avait défini comme le « syndicat humaniste des travailleurs, efficace dans l’amélioration de leur quotidien ».

Les élections dans les « TPE » auraient permis d’éclairer l’état de la représentativité syndicale à l’heure où la crise sanitaire pèse sur le climat social et économique et où, selon un sondage réalisé par le « think tank – Institut de l’Entreprise », 36% des Français sondés estimaient que les syndicats n’avaient pas été à la hauteur de la situation face au Covid-19 ! Un classement qui place les syndicats pas très loin des hommes politiques, puisque 25% des sondés étaient d’avis que ces derniers partageaient une « considération » du même ordre !

La faible syndicalisation française ! – Il est vrai que la faible syndicalisation en France où on cultive un peu facilement ce qu’on appelle la « gréviculture », est révélatrice d’une évolution qui ne cesse d’éroder l’adhésion aux forces syndicales et, partant à la qualité du dialogue social tant dans les entreprises que dans les échanges avec les pouvoirs publics. Alors que le taux de syndicalisation est proche de 20% en Allemagne, il est de 23% en moyenne dans l’Union Européenne, mais seulement d’un peu plus de 11% en France (8,4% dans le privé), alors qu’il y était de 20% en 1960 !

Les syndicats français, comme les partis politiques, sont entrés dans une crise d’identité qui les amènera inévitablement à des repositionnements qui mettent à l’épreuve les orientations (mises à mal depuis… l’élection d’Emmanuel Macron !) de la CFDT privilégiant le dialogue avec les pouvoirs comme de la CGT, cette dernière s’essayant de retrouver des racines qu’on avait abandonnées (essais d’investissement dans le mouvement des gilets jaunes, retissage d’anciens liens avec le Parti Communiste, tentatives de rapprochement avec le mouvement écologiste).

Des élections reportées au printemps 2021. – C’est dans ce contexte, aiguisé encore par la pandémie, que s’inscrit le report des élections professionnelles dans les « TPE ». Celles-ci devaient avoir lieu en Mars/Avril 2020 avant d’être repoussées à Juin en raison de la crise sanitaire. Le confinement et ses suites ont conduit à un nouveau report à une période entre Novembre et Décembre. La Direction Générale du Travail (DGT), émanation du Ministère du Travail, vient d’annoncer -Covid-19 oblige- un nouveau report de la consultation : celle-ci pourrait avoir lieu entre le… 22 Mars et le 4 Avril 2021, les résultats devant être publiés le 16 Avril 2021.

Une prévision à prendre en compte avec prudence au moment où on s’interroge sur le maintien ou non des élections régionales et départementales prévues au mois de Mars et dont 7 Français sur dix (sondage Odoxa pour la presse régionale), forts de l’expérience du report des élections municipales, souhaitent le report, craignant un… autre rebond de la Covid-19 !

Lors de leur première organisation, il y a un plus de quatre ans, les élections professionnelles dans les « TPE » avaient été marquées par un fort taux d’abstention. Les élections, prévues en début 2020, devaient relancer un dialogue social dans des entreprises plutôt habituées à la… verticalité du pouvoir ! La crise sanitaire est venue perturber cette ambition en laissant en plan 5 millions d’électeurs. A un moment où, au delà de la Covid-19 et d’une manière générale, la France vit mal une certaine absence de dialogue social !

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