Parents-enfants : quand les smartphones devraient inquiéter !

Alain Howiller sur un phénomène qui intervient aujourd’hui dans la vie de (presque) chacun. Mais là où il faudra regarder attentivement, c’est l’utilisation de ces appareils par les plus jeunes.

Les enfants passent beaucoup de temps sur les "smartphones" et ce, sans que les parents comprennent ce qu'ils font. Foto: Biswarup Ganguly / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Alain Howiller) – La Covid-19 nous a fait entrer, de confinement alterné en restrictions malheureusement de moins en moins acceptés, dans une société où le « présentiel » l’avait, de plus en plus, cédé à ce qu’on appelle -merci internet- le « distanciel ». C’est devenu une réalité telle qu’au-delà d’une pandémie qui fait toujours de la résistance, elle laissera des traces profondes qui pèseront sur notre vie de tous les jours, au travail, à l’école comme à la maison ! Aujourd’hui, il n’y a plus guère que quelque obstinés pour contester, dictionnaires en mains(!), qu’on peut être… « présent » et « distant » à la fois et pour nier cette réalité, banale désormais : la communication se fait de plus en plus par écran interposé et le concours Lepine 2021 a couronné cette invention : une table basse adaptée à la fois au salon et au… télé-travail !

Hier, la radio primait encore sur la télévision, le téléphone fixe s’était effacé devant le portable et aujourd’hui, le smartphone, auquel on prépare déjà un successeur, équipe 80% des foyers en France, éliminant le courrier postal au profit des courriels ! La technologie permet désormais « à n’importe qui, de dire n’importe quoi » (bonjour le complotisme, le harcèlement et les fake news) et nous sommes entrés dans la « société du commentaire ». Il n’est pas étonnant que, selon les sondages, plus de 60% des Français utilisent davantage leur smartphone depuis la crise sanitaire, alors que plus de la moitié d’entre eux vont jusqu’à lui consacrer 3 heures par jour !

Paix et guerre sur le « smartphone » – Des affaires en justice, de plus en plus nombreuses, des crises dramatiques, des issues fatales attirent l’attention sur les risques (harcèlements, diffamations, dénonciations, mises en circulation de photos intimes, images de violences, pornographie…) qu’entraîne une utilisation abusive du smartphone. Il n’est évidemment pas question, ici, de contester ses apports positifs (liens intergénérationnels, ouverture vers la connaissance ou l’information, facilitation de l’intégration dans le corps social…) de l’utilisation des technologies numériques. « Ce n’est pas le smartphone qui est en cause, mais l’utilisation qu’on en fait… D’où l’importance d’apprendre aux enfants à savoir et surtout pouvoir raccrocher. » (Antoine Engels sur Huffpost) Vecteur de relations distanciées, outil d’ouverture et de connaissance, le smartphone peut aussi devenir un instrument de torture.

L’institut « YouGov » a publié, pour le compte de la société « Lemon » (comparateur de box et forfaits, installé dans la région nîmoise), une intéressante étude sur le thème : « Leurs enfants et le smartphone : harcèlement, pornographie, photos intimes : les parents s’inquiètent. »

Des parents trop souvent absents ! – L’intitulé de l’étude aurait dû, à vrai dire, plutôt être : « Les parents devraient s’inquiéter davantage, car apparemment, ils ne se semblent vraiment impliqués qu’à la marge ! » En effet, l’analyse, s’appuyant sur une série de questions posées dans le cadre d’un sondage, démarre sur ce constat : « 2 parents sur 3 pensent que leur enfant leur cache l’usage qu’il fait de son smartphone, mais 9 sur 10 n’utilisent pas de contrôle parental. » Un constat : 79% des parents craignent que leur enfant puisse être harcelé ou harceleur. A la question de savoir comment ils réagissent face à ce constat, ils ne sont finalement que… 20% à avouer que cela les inquiète beaucoup et 41% à ne pas être inquiets du tout !

Des données qui prennent davantage de relief encore si on les rapporte à l’âge des utilisateurs de smartphones ! 25% des parents estiment que les enfants de moins de 12 ans doivent pouvoir disposer d’un smartphone : à peu de choses près, c’est le pourcentage de ceux (27%) qui pensent que l’âge normal pour posséder le smartphone est de 12 ans.

Certaines études du « Centre de Recherche pour l’Etude et l’Observation des Conditions de Vie » (CREDOC) soulignent : « qu’une fois sur deux, les internautes de moins de 20 ans se sont connectés pour la première fois à l’âge de 10 ans. » Des chiffres qui interpellent lorsqu’on note que, toujours selon le sondage « YouGov », seuls 21% des parents connaissent les applications dont leurs enfants font usage sur leur smartphone, 24% avouant qu’ils ne connaissent que quelques-unes des applications utilisées !

Un constat de l’UNICEF ! – Et si 86% (!) des parents ont pris l’heureuse initiative d’interdire l’utilisation du smartphone pendant les repas, ils sont 62% à autoriser l’usage du téléphone dans la chambre, y compris à l’heure où les enfants vont se coucher « alors que », soulignent les auteurs de l’étude, « l’impact sur l’endormissement et la qualité du sommeil est avéré. »

L’analyse de « YouGov » renvoie à cette étude de l’UNICEF, le fond des Nations Unies, portant le titre évocateur de « Les enfants dans un monde numérique : Quelle soit utilisée à bon ou à mauvais escient, la technologie numérique fait partie intégrante de nos vies et ce, de manière irréversible », constate l’étude pour conclure par : « Il faut cesser de ne penser qu’au temps qu’ils passent sur leur smartphone pour essayer de savoir ce qu’ils y font ! » Un rappel qui tombe à pic. Alors que l’ordinateur souffre d’un certain désintéressement au profit du smartphone, un chiffre illustre l’évolution : il y a dix ans, moins de 20% des Français utilisaient un téléphone mobile.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste