Parfois, il faut choisir ses amis avec plus de précaution

L'Union Européenne se jette dans les bras de la Turquie de Recep Tayyip Erdogan – dans l'espoir que ce dernier puisse résoudre notre problème des réfugiés. Un pari hasardeux.

Ce sont donc les gardes côtes qui seront chargés de résoudre notre problème avec les réfugiés syriens. Lamentable. Foto: (c) Guillaume Piolle / Wikimedia Commons / CC-BY 3.0

(KL) – Recep Tayyip Erdogan montre à ses compatriotes comment négocier avec l’Union Européenne. Cette dernière a accepté de verser 3 milliards d’euros à la Turquie qui, en échange, promet de mieux protéger ses côtes et d’intensifier le combat contre les passeurs d’hommes. Lors d’un sommet spécial à Bruxelles, cet accord a été trouvé, mais sur le terrain, il est difficile de concevoir comment les choses pourraient s’améliorer.

«Le combat contre les passeurs d’hommes» – pendant cette phase d’avent, cette expression semble relever du vœu pieu. Car actuellement, face aux bombardements intensifiés de la Syrie, face à l’envoi d’un nombre croissant de soldats, la logique veut qu’il n’y aura pas moins de réfugiés qui tenteront d’échapper à l’enfer syrien, mais davantage. Que qui, tout aussi logiquement, fera fleurir les affaires des passeurs d’hommes. Donc, on peut se poser la question comment ce «combat contre les passeurs d’hommes» se présentera sur le terrain. Est-ce que cette belle expression fort honorable ne traduit pas, en réalité, le «combat contre les réfugiés» tout court ?

Et cette «protection des côtes turques», cela veut dire quoi ? Chasser les embarcations de fortune qui arrivent devant les côtes turques ? Les couler ? Est-ce que le monde a vraiment envie de voir encore davantage de gamins noyés échouer sur ces côtes turques ?

Les 3 milliards d’euros devraient également servir, comme l’a annoncé le président du Conseil Européen Donald Tusk, à «permettre à la Turquie d’accueillir des réfugiés syriens chez elle», sans toutefois préciser ce que cela veut dire concrètement. Malgré ce manque de précision, on comprend une chose – l’Union Européenne veut se décharger sur la Turquie en fermant les deux yeux sur ce qui se passe là-bas. Même la position d’Erdogan vis-à-vis du Daesh est tout sauf claire, mais si on peut troquer la solidarité européenne contre de l’argent, l’Union Européenne accepte tout.

Même de reprendre les négociations portant sur l’adhésion de la Turquie dans l’Union, même un allègement concernant les visas demandés aux ressortissants turcs qui veulent se rendre dans l’espace Schengen – chose que surtout les pays de l’est de l’Europe avaient toujours catégoriquement refusée, prétextant que la Turquie, en tant qu’état d’orientation musulmane, n’avait pas sa place en Europe. Aujourd’hui, on préfère caresser Erdogan dans le sens du poil, en lui passant les violations des droits de l’homme, son combat contre les Kurdes, son commerce avec le Daesh, à condition qu’il fasse en sorte à ce que les réfugiés syriens qui fuient nos bombardements, ne puissent plus venir en Europe.

Ce «commerce avec des vies humaines» est cynique – et force est de constater que ce sont les autant les bombes américaines, russes, françaises et celle d’Assad que la terreur du Daesh qui obligent la population syrienne à quitter son pays. Dans une telle situation, se remettre à un état qui est soupçonné de soutenir clandestinement un groupe de terroristes meurtriers, constitue une sorte de dépôt de bilan de l’UE. La solidarité européenne et l’humanisme en Europe sont en voie de disparition.

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