Pas un poisson d’avril – le cannabis est maintenant légal en Allemagne
Tandis que la légalisation du cannabis est entrée en vigueur à minuit, à Strasbourg et Kehl, on titube entre intérêt, rejet et approbation. Faudrait savoir...

(KL) – Aujourd’hui, c’est une petite révolution outre-Rhin. Depuis minuit, le cannabis est légal en Allemagne, y compris pour l’utilisation récréative, ce qui constitue un changement majeur. Si cette légalisation ne se passe pas comme dans le Colorado ou aux Pays-Bas (où le cannabis n’est techniquement pas légal, mais partout disponible dans les « coffeeshop »), ce changement fondamental ne peut pas rester sans impacter la situation en Alsace. La maire de Strasbourg, Jeanne Barseghian, trouve cette évolution allemande « intéressante » et veut la suivre de près. Tout en ayant rédigée conjointement avec son homologue kehlois, Wolfram Britz, une lettre destinée au chancelier allemand et son ministre de la santé exprimant leur « inquiétude » face à cette nouvelle loi.
Pourtant, Jeanne Barseghian a parfaitement raison en parlant de l’échec de la politique française en la matière. La France, pays appliquant la politique la plus restrictive en matière de cannabis en Europe, est aussi le pays où les gens en consomment, de très loin, le plus. Face à l’échec total de cette politique, Jeanne Barseghian a raison de vouloir suivre cette évolution en Allemagne, car on ne peut pas faire pire que la France en la matière. Alors, pourquoi avoir demandé aux autorités allemandes de revoir leur copie ?
Bien sûr, les autorités kehloises craignent un « tourisme du cannabis » en Allemagne, mais en vue de l’organisation de cette légalisation, il n’y aura pas de « points de vente » en Allemagne, mais des « clubs de culture » strictement réservés aux ressortissants allemands (et ceux qui sont domiciliés depuis au moins 6 mois en Allemagne), avec une interdiction stricte d’en vendre ou même d’en donner à des personnes qui ne seraient pas membres d’un tel club (qui ne verront le jour que le 1er Juillet 2024). L’émergence d’un grand marché noir du côté allemand est peu probable, car cette nouvelle loi autorise la culture de trois plantes à la maison et la culture dans les clubs mentionnés – l’usage du cannabis restera une affaire privée qui se pratiquera principalement, par ceux qui la pratiquent, à la maison et non pas dans l’espace public.
Ainsi, le gouvernement allemand vise à couper l’herbe sous les pieds des dealers qui perdront leurs clients qui eux, peuvent s’approvisionner dans un cadre privé et légal et ces utilisateurs ne seront pas enclin à vendre leur quota à des visiteurs d’outre-Rhin.
Si la majorité des Allemands n’est pas favorable à cette légalisation, elle risque de libérer d’importantes ressources policière et judiciaires – et la police aura davantage de capacités pour faire la chasse aux dealers de cocaïne et d’autres drogues dures, tandis que les tribunaux ne seront plus congestionnés par d’innombrables affaires anodines.
Mais pour pouvoir suivre cette évolution de près, il faut qu’elle ait lieu. Donc, on ne comprend pas très bien ce que les maires de Strasbourg et de Kehl demandent au gouvernement allemand. Mettre en œuvre une « zone d’interdiction du cannabis » dans la région frontalière semble exclu, même si théoriquement, le Traité d’Aix-la-Chapelle permettrait une telle démarche, mais ce serait assez contradictoire de vouloir invalider une loi allemande sur le territoire allemand, tout en voulant suivre attentivement les effets de la dite loi.
Les Français qui se rendraient sur la rive allemande, dans l’espoir de pouvoir s’y approvisionner en cannabis, feraient mieux de s’en abstenir. Car la nouvelle loi allemande ne s’applique pas à eux et si jamais, il se feraient coincer par la police allemande ou française, ils resteraient susceptibles à être assez sévèrement punis.
Maintenant, il faudra faire avec et espérer que nous disposions assez rapidement de données fiables des changements déclenchés par cette légalisation. A suivre. Des deux côtés de la frontière.
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