Pays-Bas : non, surtout pas de Nexit !

Victoire des travaillistes aux Européennes

A Strasbourg, intervention de deux députés d'extrême-droite Foto: Rama/Wikimédia Commons/CC-BY-SA 2.0France

(Marc Chaudeur) – On n’a sans doute pas suffisamment relevé l’exemplarité négative qu’a représenté le Brexit lors des élections européennes de la semaine dernière. Beaucoup de résultats ont été déterminés par la peur des citoyens qu’une pièce tragi-grotesque similaire ne gangrène leur pays.

Les petits Pays-Bas (que peuplent tout de même 17 millions d’habitants) sont l’un des 3 Etats membres qui ont voté majoritairement pour les Sociaux démocrates, avec l’Espagne et la Suède. Bien peu de points communs relient ces 3 pays, et les raisons qui ont fait que le Parti travailliste néerlandais a gagné ces élections sont donc aussi singulières que celles des deux autres pays mentionnés.

On a parlé de « l’Effet Frans Timmermans »… Euh, en partie, certainement, mais il est peu probable que les braves citoyens néerlandais aient été transportés d’enthousiasme par la personnalité du vieux dirigeant ; même si Timmermans est premier vice-président de la Commission européenne et bénéficie ainsi, pour le dire naïvement, du prestige du pouvoir. Au moins d’un certain pouvoir… Et la perspective de le voir choisi pour diriger la Commission joue évidemment un certain rôle ici.

Dans l’ensemble de la gauche européenne, Timmermans l’expérimenté n’est pas nécessairement très bien vu : on l’y juge souvent trop « technocratique » (une critique sans doute fondée…). Il n’est guère apprécié par la Confédération européenne de syndicats. Et, pesanteur bruxelloise y aidant beaucoup, il a beaucoup ralenti le mouvement de dénonciation de ce véritable cousin indigne de la famille, de ce mouton noir qu’est le PSD roumain, très corrompu et autoritaire : une arme saisie au bond par le PPE auquel la gauche reproche sans cesse son soutien ou ses ambigüités face au Fidesz hongrois…

Bref, Frans Timmermans est plus apprécié par les électeurs néerlandais que par l’ensemble des partis de gauche européens, bien que son éloquence et sa polyglottie, admirées lors des débats télévisuels notamment, représentent un atout important partout. Mais il ne l’a, en définitive, emporté que de 4 points sur son concurrent d’extrême-droite, avec seulement 19 % des suffrages… Et pourtant, on se prend à espérer (non, pas à rêver!) d’une reconnaissance de la pertinence d’un programme social-démocrate, plutôt bien ficelé et qui fait la part de choses, entre exigences écologistes et attention portée aux classes moyennes – gilets jaunes français obligent… Ce programme n’innove pas, mais il est pertinent.

Pour l’essentiel, la rumeur (faut-il l’appeler « projet »?) la plus intéressante laisse entendre que pourrait se former sous la direction du Néerlandais, dans les prochains mois, une coalition « progressiste » (le mot est de lui), c’est-à-dire, qui rassemblerait la gauche des libéraux de gauche à l’extrême-gauche. Excellente idée, malgré les problèmes que cela posera(it).

En tout cas, les résultats néerlandais aux Elections européennes ont obéi à une autre motivation importante : la crainte de voir se rejouer sur les polders à goudas les scènes d’horreur et de stupéfaction rance qu’on peut voir se dérouler chaque jour en Grande-Bretagne. C’est cette crainte qui explique sans doute l’échec de l’un des partis d’extrême-droite eurosceptiques en lice (car il y en avait deux, dont les programmes ne différaient pour ainsi dire pas!), le FvD, Forum pour la démocratie, le parti de Thierry Baudet.. Ce parti qui « défend l’identité néerlandaise » contre les méchants migrants et la perfide « Bruxelles » a tout de même rassemblé 10,9 % des suffrages contre… 4 % pour son rival, le Parti pour la liberté de Geert Wilders ! L’extrême-droite lave plus blanc, et pas seulement l’argent sale : une fois n’est pas coutume, aux Pays-Bas, on a préféré la copie à l’original.

Les Verts (c’est-à-dire la Gauche verte, Groen Links), quant à eux, ont réalisé le score de 10,5 % (progression de 2 à 3 sièges à Strasbourg), ce qui est moins que l’Appel chrétien démocrate, qu’on peut situer au centre droit, et qui de manière surprenante, avait eu les meilleurs résultats dans le pays en 2014.

Des résultats mi figue, mi raisin, donc : une participation un peu moins que moyenne (41%), un nombre ébouriffant de partis de droite et d’extrême-droite sur le plateau, et un score honorable de la gauche. Espérons que cette dernière saura se renouveler encore un peu plus !

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