Plein écran : « Les Intranquilles », une famille au bord du précipice
Si « Titane » de Julia Ducourneau a remporté la Palme d’Or, Esther Heboyan vous présente le dernier film de compétition montré à Cannes - « Les Intranquilles » de Joachim Lafosse.
(Cannes, Esther Heboyan) – Les Intranquilles du Belge Joachim Lafosse, dernier film à être projeté dans la sélection officielle, traite de la maladie mentale d’un parent qui met constamment en péril le quotidien d’une famille unie et aimante. En partie autobiographique puisque le père du cinéaste était un photographe maniaco-dépressif, le récit démarre à la saison estivale dans les eaux bleues de la Méditerranée mais très vite suggère une ambiance de terreur. Damien (Damien Bonnard) décide de rentrer à la nage, laissant son fils Amine (Gabriel Merz Chammah, petit-fils d’Isabelle Huppert) seul à bord du bateau. Lorsque sa mère Leïla (Leïla Bekhti) le récupère sur le rivage, elle lui demande s’il a eu peur.
Le film livre une suite d’épisodes montrant le père peintre agissant avec une énergie déroutante, faisant craindre la catastrophe. Cependant, la répétition insistante des péripéties constitue peut-être une faiblesse du récit. Pour contrebalancer, il y a les séquences de l’artiste au travail, inventant des idées, retouchant ses toiles magnifiques (fruit de la collaboration avec le peintre Piet Raemndock), projetant sa frénésie à la frontière de la folie. Il y a également les stratégies de l’épouse en détresse qui veut empêcher le désastre. Elle est secondée par son fils et son beau-père. Le drame est total, la famille sans cesse au bord de l’explosion.
Joachim Lafosse s’attache à décrire avec minutie les symptômes de la bipolarité, source de comportement excessif et incontrôlable, comme lorsque Damien décide d’offrir un plateau de cupcakes à la classe de son fils ou se met à cuisiner en toute hâte et s’énerve dans tous les sens. Seul le lithium, que d’ailleurs il refuse de prendre, lui impose une normalité qui parfois le plonge dans un état végétatif.
Dans la sélection officielle, de nombreux films questionnent les comportements, les sensations, les décisions, les souvenirs. On tente de percer le fonctionnement des structures cognitives. Avec Les Intranquilles – très beau titre qui rappelle Le Livre de l’intranquillité de Fernando Pessoa – on est du côté de l’observation clinique. L’intensité du drame nous amène à reformuler la question : comment vivre avec le déséquilibre mental qui frappe un membre de la famille ?
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