Plus ça va, plus l’Allemagne rejette Angela Merkel

Pauvre chancelière – pour la première fois de son mandat, elle agit sous le coup de l’empathie – et tout le monde se retourne d’elle. Et son parti, la CDU, baisse avec elle…

Est-ce que l'amour avec un grand "A" entre les allemands et "Mutti" touche à sa fin ? Foto: FNDE / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – Elle tient bon. En courant d’une réunion à l’autre, en passant d’un plateau de télévision au suivant, Angela Merkel se bat, comme elle n’a jamais du se battre pendant toute sa carrière politique. Prendre la succession de Helmut Kohl, c’était une partie de plaisir à côté de ce qu’elle vit actuellement. Mais elle tient bon. Dans le dossier des réfugiés, la chancelière refuse de céder aux faucons dans son propre parti, aux attaques de son partenaire de coalition, le SPD et également au «Stammtisch» qui se matérialise par le biais des manifestations xénophobes de la «Pegida» et d’autres groupuscules de l’extrême-droite. Mais chaque jour, le combat qu’elle mène, devient un peu plus compliqué.

Dans les sondages actuels, la CDU descend en dessous des 40%, ce qui ne s’est plus produit depuis presque toute une année, sa côte personnelle est au plus bas niveau depuis le début de son mandat actuel. La semaine dernière, elle a perdu sa place de «politique le plus populaire», pour retomber à la quatrième place, derrière son ministre des affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier (SPD), mais également derrière son ministre des finances Wolfgang Schäuble (CDU), le président allemand Joachim Gauck complétant le podium. Pour «Mutti», il ne reste que la quatrième place.

Ce qui doit inquiéter la chancelière, c’est le fait qu’elle se fasse dépasser par Wolfgang Schäuble – du coup, elle n’est plus le visage de la CDU, mais la chancelière détestée, celle qui a ouvert les portes aux réfugiés, celle qui est responsable de toute cette situation irritante qui chamboule la vie des allemands.

Les allemands ont l’habitude de voir leur chancelière critiquée à l’échelle européenne, et pour cause. Lorsqu’elle a défendu la politique d’austérité vis-à-vis des pays du sud de l’Europe, qui en fin de compte était plus la politique de Wolfgang Schäuble, les allemands l’avaient surnommé «la dame de fer» en faisant allusion à Margaret Thatcher – et en pensant que «Mutti» défendait le «droit chemin» européen. Aujourd’hui, les allemands sont pris par le doute – est-ce que la chancelière a réagi de manière trop émotionnelle ?

Quelle tournure des événements tragique ! La chancelière avait raison d’ouvrir la porte aux réfugiés malmenés dans des pays comme la Hongrie, elle a raison de qualifier l’accueil des réfugiés comme un «devoir chrétien», elle a raison d’encourager les allemands par des «nous allons y arriver !» (Wir schaffen das!) – et c’est juste à ce moment-là que les allemands l’abandonnent. Combien de temps tiendra-t-elle encore face aux faucons du genre Horst Seehofer, le ministre-président de la Bavière qui a annoncé une plainte devant la Cour Constitutionnelle contre sa chancelière ? Contre les Thomas de Maizière qui veut «dissuader» les réfugiés, contre la base des électeurs de la CDU qui lui écrivent pour exprimer leur désaccord avec sa politique ? Combien de temps supportera-t-elle la «trahison» du SPD qui, au lieu de s’allier à la juste cause de la chancelière, profite pour lancer des attaques contre Angela Merkel, perdant de vue qu’elle mène une politique qui devrait trouver l’approbation des socialdémocrates ?

Depuis des années, nous critiquons Angela Merkel – mais là, nous arrivons au point où nous avons envie de lui lancer : Tenez bon, Madame Merkel ! Vous êtes dans le vrai ! Ne vous laissez pas abattre par les petits esprits, par les xénophobes, par le «Stammtisch» allemand ! Et pour la première fois depuis trois mandatures, nous écrivons cette phrase : «Heureusement que l’Allemagne a une chancelière qui s’appelle Angela Merkel». Qui l’eut cru…

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