Politique mondiale – mais qui sont nos vrais amis ?

Mordor à l'horizon - il est temps que ce centre de surveillance américain à Berlin soit fermé. Foto: Kai Littmann

(KL) – Les Etats-Unis sont en train d’intervenir contre l’IS, avec des attaques aériennes sur les positions de l’IS en Irak et on prévoit aussi des attaques en Syrie. Pour ce faire, les Américains ne veulent plus envoyer des troupes, mais mener une guerre technologique, comptant sur le soutien de leurs amis européens. Mais qui sont les amis des Etats-Unis et surtout, est-ce que les Etats-Unis sont les amis de quelqu’un ?

La politique américaine est compliquée. Lorsque le dictateur syrien Bachir al-Assad avait tué ses compatriotes par milliers en utilisant du gaz toxique, Barack Obama avait alors déclaré qu’Assad venait de franchir une “ligne rouge”. Conséquence de cette transgression – néant. Aujourd’hui, les Etats-Unis et la coalition des bonnes volontés se met à combattre les ennemis d’Assad – c’est compliqué. Idem en ce qui concerne les Kurdes, encore fichés comme potentiellement dangereux, mais cela n’empêche pas les livraisons d’armes.

Et pendant que les Etats-Unis cherchent le soutien de la part des Européens, ils continuent à les traiter comme des terroristes potentiels aussi. Les programmes de surveillance globale visent l’Allemagne au même titre que la Syrie, l’Irak et la Corée du Nord – avec des amis comme les Etats-Unis, on n’a pas besoin d’ennemis.

Le rôle des Européens ne peut pas se limiter à celui d’un agent des intérêts américains dans le monde. Surtout pas dans la mesure où l’action des Etats-Unis est difficile à comprendre et semble suivre davantage des inspirations présidentielles et non pas une véritable politique mondiale.

L’action des Américains vise surtout la géostratégie. Ils interviennent là où leur intérêts économiques sont menacés, ailleurs, les Américains s’en fichent. Ainsi, le Proche et Moyen Orient faisant partie de la sphère qui intéresse les Etats-Unis, compte parmi les zones d’intervention américaines. Mais nous, en Europe, nous avons un souci majeur qui n’entre pas vraiment dans la ligne de mire des Américains – l’Ukraine.

La paix en Europe n’est pas vraiment menacée en Irak – elle est menacée en Europe, à l’interface entre la Russie et l’Europe, là où Vladimir Poutine, tout en parlant de paix, est actuellement en train de mettre une bonne partie de ses troupes (et de ses ministères) en état d’alerte. L’OTAN qui s’active maintenant en Estonie et en Pologne, ne pourra pas intervenir en Ukraine, le pays ne faisant pas partie de l’OTAN – il manque donc le fond juridique permettant une telle intervention. Devons-nous donc joindre nos efforts à ceux des Etats-Unis ?

L’intérêt premier des Européens doit être la situation en Ukraine. La guerre y a commencé et le monde regarde, impuissant, les agissements de Poutine dont l’action sur le terrain diffère de ses actions sur le terrain. Pendant qu’il parle de paix, multipliant ses “appels” aux séparatistes qui sont effectivement des soldats russes ayant pénétré le territoire ukrainien pour y semer la guerre, il crée des réalités sur le terrain qui seront impossibles à corriger par la suite.

Pour les Américains, la situation en Ukraine représente un problème qui concerne les Européens. D’accord. A nous de jouer. Mais à ce moment-là, que les Américains s’occupent des autres crises, du combat avec l’IS, de l’Irak. Négliger la situation en Ukraine, c’est regarder les bras croisés le début de la IIIe Guerre Mondiale.

Il est grand temps que l’Europe s’émancipe des Etats-Unis. On pourra parfaitement coopérer là où les intérêts se rejoignent, et on devrait faire bande à part là où nos intérêts ne sont pas les mêmes. En attendant, il serait temps que les Américains cessent la surveillance de la population européenne – les temps où les Etats-Unis pouvaient tout se permettre, sont finis.