Pologne : Alliance entre la gauche et la droite libérale

La carpe et le lapin s’entendent contre le grand méchant loup

Barbara Nowacka au Sejm (Parlement polonais) : une grande figure de la gauche féministe en Pologne. Foto : Adrian Grycuk / Wikimédia Commons / CC-BY-SA 3.0Poland

(Marc Chaudeur) – En Europe centrale, ça bouge, nous ne cessons de le répéter. Le 17 février dernier, à Varsovie, les socialistes de l’Alliance de la gauche démocratique, associés aux Verts (Zieloni, membres du Parti vert européen), ont annoncé qu’ils allaient rejoindre une coalition composée de la Plateforme civique, parti du centre-droit et principal parti d’opposition, et rejointe par 7 anciens Premiers ministres. Leur but commun : battre ensemble le PiS national-populiste.

La coalition d’opposition comportera en définitive le SLD (Alliance de gauche), la Plateforme civique de centre-droit, Initiative Pologne (le parti de Barbara Nowacka), les Verts et sans doute bientôt le PSL (Parti Populaire Polonais, un drôle de vieux parti agrarien affilé au PPE) et Nowoczesna (Moderne) ; un parti libéral affilié à l’ALDE. Rassemblement hétéroclite, voire contradictoire ? Sur bien des points, assurément ; mais au moins, l’ensemble de l’opposition a enfin reconnu son but commun, impératif : vaincre le national-populisme et son autoritarisme, ses manquements démagogiques à toute politique sociale, ses atteintes à la liberté d’expression et à la séparation des pouvoirs. Le SLD, mené par Włodzimierz Czarzasty, a voté massivement pour cette coalition électorale droite-gauche : 111 voix contre 3 et 6 abstentions.

Jour important et même exceptionnel pour l’opposition démocratique, puisque c’est sur les braises de la division interne de l’Alliance de gauche (SLD) et de celle de la Plateforme civique que PiS (Droit et Justice) a pu accéder au pouvoir, voici presque 15 ans (en 2005). Barbara Nowacka , naguère figure de proue de la gauche féministe et aujourd’hui proche de la Plateforme civique, et Grzegorz Schetyna, président actuel de cette dernière, ont vivement félicité le SLD de les avoir rejoints. Schetyna a déclaré : « Nous discutons maintenant entre partis pour lesquels la question de la démocratie et de la raison priment sur toute autre chose ». Et Barbara Nowacka a proclamé : « Ensemble, luttons pour un avenir valable en Pologne ! »

Printemps (Wiosna), le parti de Robert Biedroń (http://eurojournalist.eu/pologne-lopposition-et-ses-espoirs-reels/) n’a pas rejoint cette coalition, sans doute pour éviter la « banalisation » de son dirigeant et son ingestion dans un estomac trop large, et parce que Biedroń se pose comme le vrai dirigeant potentiel de l’opposition. L’un des membres éminents de Wiosna, Adam Traczyk, a déclaré avec quelque ironie que maintenant, les choses étaient claires : on aurait maintenant selon lui 3 courants, le PiS, destructeur et eurosceptique, la nouvelle Coalition démocratique qui veut préserver l’Europe telle qu’elle est aujourd’hui, et Wiosna qui veut,lui, introduire une nouvelle dynamique européenne… Ce qui, pour ce qui concerne la Coalition, n’est pas entièrement faux ; mais encore faut-il déterminer avec précision l’ordre des priorités…

Même problème pour ce qui concerne un autre parti de la gauche, Razem (Ensemble) : le petit parti socialo-écolo, membre du groupe européen Diem25, a déclaré dans la presse que ” Passer sous la botte de Schetyna et se dissoudre au sein des libéraux, ce n’est pas une solution ! C’est bien plutôt une capitulation” . Razem, qui ne représente certes qu’environ 1% de l’électorat, s’alliera pour les élections européennes avec le petit Parti socialiste polonais.

La Coalition est l’occasion de rappeler à l’Union européenne que la Pologne existe bel et bien, et que l’avenir de la Pologne ne peut nullement se trouver dans un populisme dangereux. Une ancienne Première ministre, Ewa Kopacz, avait déclaré lors du lancement de la Coalition : « Nous voulons reconstruire notre autorité qui, depuis quelques années, a été amoindrie par le gouvernement actuel. Nous voulons montrer que la Pologne est un pays pleinement démocratique ». Schetyna, lui, en annonçant la formation de la Coalition, avait déclaré : « Durant ces 3 dernières années, le gouvernement PiS a déplacé la Pologne vers l’Est ; et le travail de générations de Polonais et leurs ambitions occidentales ont été gaspillés. Maintenant, nous voulons nous trouver au centre des décisions de l’Union européenne ! »

Voilà qui est clair et qui, lié à l’importance de la Coalition, suscite de grands espoirs. Même si les résultats électoraux sont incertains : il est probable que le PiS emporte au moins 40%  des suffrages, tandis que l’opposition atteindrait peut-être jusqu’à 38 %… Et pourtant, ce qui se passe est d’une importance capitale. Il se passe des choses très positives en Europe, y compris en Europe centrale. Si si !

 

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