Pologne : au pas, au pas !!

La Marche de l’Indépendance, un must pour les fascistes

Jaroslaw Kaczynski, le dirigeant du PiS, et Andrzej Duda, Pdt de la République, dévoilent la plaque en l'honneur de Lech Kaczynski (2018) Foto: Kancelaria Sejmu Krzysztof Bialokorski/Wikimédia Commons/CC-BY-SA/2.0Gen

(Marc Chaudeur) – A Varsovie, la Marche de l’Indépendance, qui célèbre une liberté polonaise durement gagnée sur les puissances voisines en 1918, a cependant depuis ses débuts, voici 10 ans, une signification ultra-nationaliste. A Varsovie, c’est le parti national-populiste au pouvoir, le PiS, qui la mène – mais bien davantage encore, l’extrême-droite raciste, ultra-catholique et/ou stricto sensu fasciste. Mais pourquoi les partis démocratiques et la Gauche ne se montrent-ils pas de manière beaucoup plus visible et plus profilée, lors d’une Fête dont ils affirment qu’elle les concerne autant que la droite musclée et les curés fiers-à-bras ?

Cette année, il y avait un peu moins de monde dans les rues de Varsovie que l’an dernier. Mais on ne peut pour autant en tirer une conclusion réjouissante, qui serait hâtive ; car l’an dernier, on fêtait le centenaire de l’Indépendance acquise sur l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie et la Russie : il est donc normal que la foule était plus dense et encore plus bruyante que cette année. L’aspect de commémoration historique y était donc aussi plus intense : en 2019, l’évocation du Maréchal Piłsudski qui s’exhalait de multiples bouches frappait beaucoup moins les observateurs présents. Ce dirigeant autoritaire a fait les beaux jours de la Pologne des années 1920 – du moins le croit-on ; car exactement comme en certain pays beaucoup plus… à l’Ouest, on tend à ne prêter qu’aux riches, c’est-à-dire aux personnages monolithiques, au prix d’illusions regrettables sur la puissance réelle du pays…

Quoi qu’il en soit, cette année, les camps étaient bien délimités – si du moins, il s’agit de camps réellement différents. En effet, les nationaux-populistes du PiS et les mouvements d’extrême-droite (Ruch Narodny, Młodzież Wsechopolską ou encore ONR) ne servent-ils pas, par un subtil jeu dialectique, à renforcer l’image du PiS autant qu’à lui donner l’alibi du « débordement droitier » ? On voyait cependant cette année une apparence de rangement, chacun à sa place et restons sages, l’UE nous regarde ! Insulter l’Europe, oui, mais l’insulter proprement, et sans nuire au versement des subventions.

D’un côté, les manifestations que préparent et que fréquentent le PiS et ses admirateurs : la cérémonie en mémoire du crash de Smolensk, où sans doute par le fait des Russes, toute la classe politique polonaise a été décimée, et en son sein, le frère jumeau du dirigeant, Lech Kaczyński ; le défilé à part des autres formations, la messe, les prières à Marie,etc. D’un autre côté, les formations susdites, qu’accompagnaient un nombre considérable de personnalités de l’extrême-droite européenne – venus des Balkans, d’Italie, de France, de Hongrie : du fameux Jobbik qu’on prétend « recentré » et avec lequel la gauche hongroise flirte depuis 3 ans maintenant !

Hier, à Varsovie, la Marche semblait bien rodée, contrairement à l’an dernier. Si en 2018, en effet, la célébration de l’Indépendance s’était fêtée dans la plupart des villes d’une manière relativement consensuelle par les principaux partis polonais, il n’en était pas de même dans la capitale. « Débordé » par les partis d’extrême-droite, Kaczyński avait fait interdire le défilé. Mais la justice lui avait donné tort… Alors, que faire ? Grâce à un consensus d’ailleurs aisément acquis, le gouvernement a décidé de partager la rue : le PiS devant, les fascistes derrière, avec leurs insignes parfois identiques à ceux des années 1930), leurs slogans racistes et antisémites, homophobes. Et tous beuglant à peu près les mêmes énoncés anti-UE.

Et sur l’arrière du cortège, juste derrière l’extrême-droite, le « peuple », qui voulait célébrer l’Indépendance tout en ne s’éloignant pas trop des diverses droites extrêmes…

En tout,selon la Gazeta Wyborcza, de 47 000 à 100 000 personnes. Dont le nombre s’étoffait assez considérablement, on l’a dit, de nombreux militants et dirigeants de l’extrême-droite européenne.

Ce sera l’une des hontes les plus graves que se sera attirée le PiS : celle d’avoir fait de Varsovie une sorte de… Mecque du fascisme européen, comme par exemple (bien plus modestement) Dijksmuide naguère, où l’extrême-droite compte ses forces et se retrouve joyeusement, haineusement. Fi donc.

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