Pologne : les jeunes ont marché pour le climat

Un vieux puits de mine Foto: Celeda/Wikimédia Commons/CC-BY-SA 4.0Int

(Marc Chaudeur) – La Pologne est particulièrement concernée par la lutte contre le changement climatique : en effet, elle est le pays qui dépend le plus du charbon… et de ses mines de charbon pourvoyeuses d’emploi, et par conséquent, dans une certaine mesure, de paix sociale. La jeunesse polonaise n’a donc pas été en reste vendredi dernier, le jour où les jeunes du monde entier ont défilé dans les rues, de la Scandinavie à l’Australie en passant par le Kenya, 3 jours avant le Sommet Action Climat. Mais le gouvernement polonais sortira-t-il de son inertie ?

Durant tout le mois de juillet, Inga Sasowska, 13 ans, prend place devant le Parlement polonais, le Sejm. Avec quelques camarades, elle a fait la « grève des vacances » : au lieu de partir à l’étranger ou d’aller à la campagne et de se baigner dans les lacs de Mazurie, Inga a rejoint sa place chaque vendredi devant le grand bâtiment du centre de Varsovie. Elle brandissait un grand panneau : « Wakacyjny strajk klimatyczny », Grève des vacances pour le Climat ! Les premières marches de protestation des jeunes, en réalité, ont eu lieu dès le mois de mars, et Inga y a participé. Mais cette action lui semblait évidemment insuffisante : il fallait frapper les esprits.

Elle suit ainsi les traces de Greta Thunberg, qui est pour elle un modèle, celle qui a initié le mouvement. Elle rejoint de cette manière l’Allemande Luisa Neubauer, la Thaïlandaise Lilly, Leah l’Ougandaise et quelques autres, ces jeunes, toutes jeunes héroïnes qui ont décidé de crever l’écran de notre stupide passivité.

Les arguments d’Inga ont-ils quelque portée dans la population ? Dans son pays, les esprits sont divisés, et assez fébriles. La vague de sécheresse qui a frappé l’Europe centrale cet été, les dizaines de milliers de personnes qui souffrent de bronchite chronique et d’autres affections pulmonaires à cause des miasmes carboniques, la mobilisation climatique mondiale vont dans son sens. Mais le gouvernement populiste joue l’emploi à court terme et ne recherche véritablement aucune solution énergétique pour protéger la santé publique de ce véritable fléau qu’est la pollution, en particulier en Silésie. On a pu le constater en décembre dernier à Katowice, lors de la COP24 : le PiS, le parti au pouvoir, fait même obstruction et essaie de jouer de son influence pour empêcher tout changement.

Vendredi dernier, des dizaines de milliers de jeunes Polonais ont rejoint Inga dans sa lutte en défilant dans les rues. Ils ont crié : « Solidarité avec les mineurs, pas avec les mines ! » Ce qui exprime admirablement la nécessité environnementale d’une reconversion. Toutes les grandes villes polonaises ont marché ; à Varsovie, où 10 000 jeunes étaient dans les rues, on a scandé des slogans qui traduisaient la colère face à l’inertie des gouvernements, partout dans le monde – et plus encore dans ce pays, où la démagogie tient lieu d’ administration publique des biens et des hommes. La colère des manifestants a d’ailleurs été attisée cet été, déjà, alors que le Conseil européen promouvait un Accord sur une stratégie à long terme ; bernique : Pologne, République tchèque et Hongrie ont refusé de signer cet Accord.

Hier à New York, au siège de l’ONU, s’est tenu le Sommet Action Climat. Ce Sommet vise principalement à concrétiser l’Accord dit « de Paris » consécutif à la COP21, adopté le 12 décembre 2015 à New York et signé l’année suivante par tous les pays du monde, et notamment par la Hongrie et la Pologne…

Dans le pays de Lech Wałęsa, qui donc osera prendre le bison par les cornes ? Tant que le PiS tiendra les rênes du pouvoir, aucune chance. Il faut attendre l’après PiS et, soyons fous, une coalition libéraux-Verts pour entretenir quelque espoir. Ce n’est pas pour demain, mais au mieux, pour après-demain. Et pourtant, le temps presse, et le pays étouffe.

Pour plus de précisions : Gazeta Wyborcza http://www.wyborcza.pl/, Courrier d ‘Europe Centrale https://courrierdeuropecentrale.fr