Pologne : où souffle le vent

L’opposition reprend les thèses de la droite la plus conservatrice

Malgorzata Kidawa-Blonska lors des Primaires de décembre 2019 Foto: Platform Obywatelska RP/Wikimédia Commons/CC-BY-SA/ PD

(Marc Chaudeur) – En quelques jours, la candidate déclarée aux prochaines présidentielles polonaises a tourné casaque. Désormais, Malgorzata Kidawa-Błońska clamera sur toutes les estrades des bateleurs électoraux qu’elle préfère la sécurité de «l’Europe» au respect des principes humanitaires. Pêche électorale oblige ?

A la fin 2019, le parti national-conservateur au pouvoir, PiS, a largement gagné les municipales. Un résultat prévisible, puisque la bonne tenue de l’économie polonaise depuis 2015 se renforce dans l’esprit du Polonais moyen (ou plutôt, du Polonais de la moyenne) par les efforts de propagande du régime : les principaux médias lui appartiennent ou sont plus ou moins discrètement à ses ordres – ce que PiS a réussi partiellement à accomplir aussi avec les institutions judiciaires polonaises. Dans la foulée de cette victoire, lors des Primaires de début décembre 2019, Małgorzata Kidawa-Błońska est investie candidate de la Plateforme Civique, la formation de l’opposition libérale, pour les prochaines présidentielles.

Les présidentielles auront lieu les 10 et 24 mai : est-ce cette proximité qui explique le revirement de la belle Małgorzata ? La semaine dernière encore, elles déclarait dans la presse que l’immigration n’était pas un problème, que la Plateforme civique acceptait les quotas – pour la Pologne, concrètement, 7000 personnes – que demande la Commission Européenne, et que ce nombre de personnes qui arriveraient en Pologne ne représentait aucun danger pour ce pays somme toute assez vaste.

Eh bien, patatras, Madame Kidawa-Błońska a changé d’avis mardi dernier. Ah et puis non, hein, au fond, ce qui arrive actuellement est très dangereux,estime-t-elle aujourd’hui ; il faut arrêter les migrants, soutenir la Grèce et l’Italie et protéger les frontières de l’Europe de « l’arrivée de ces personnes désespérées qui essaieront par tous les moyens de rejoindre l’Europe ».

La candidate de l’opposition de centre droit reviendra-t-elle sur cette déclaration et sur son contenu ? Deux choses la feront plutôt maintenir cette position toute récente et qui fait (modestement, mais de manière sûre) sensation.

D’une part, le fait qu’à l’intérieur même de sa formation, la Plateforme civique, beaucoup ne partageaient pas l’option alors humanitaire de la candidate et son acceptation des quotas que proposent les institutions européennes. A commencer par Grzegorz Schetyna, le dirigeant de ce parti. Un homme à l’envergure et au charisme limités, mais évidemment très influent.

D’autre part, le poids de la propagande médiatique et surtout, télévisuelle de PiS est tel que le passage en boucle sur la chaîne du pouvoir, TVP1, de grappes humaines agglutinées contre les barbelés grecs et son association perverse sur les écrans, jusqu’à mardi, du visage de Madame Kidawa-Błonska, ne peuvent manquer de faire durablement leur effet sur l’opinion publique de la majorité silencieuse polonaise.

En tout cas, l’attitude et la prise de position de la cheftaine libérale est désastreuse, puisqu’elle entraînera l’opposition démocratique dans son sillage, pour envisager et peut-être (sans doute) mettre en œuvre une politique de fermeture qui risque très fort de reléguer au vingt-cinquième plan toute mesure humanitaire concrète.

Et qu’elle rendra toute marche arrière vers un retour à l’acceptation du quota de réfugiés extrêmement difficile.

En attendant, la situation aux frontières gréco-turques est toujours aussi catastrophique, et l’intervention humanitaire de plus en plus difficile.

A consulter : Notes from Poland  https://notesfrompoland.com/

 

 

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