Pourquoi Julian Assange n’obtiendra pas le Prix Nobel de la Paix

Reporters sans Frontières manifeste pour la libération immédiate de Julian Assange. Et l'Europe regarde ailleurs... Foto: Manon Levet // Reporters sans Frontières France / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – L’engagement de l’Union Européenne en faveur d’Alexej Navalny est exemplaire. Appels, sanctions, mesures – l’UE ne lâche pas la Russie qui elle, considère toute remarque concernant Navalny comme une « ingérence ». Mais l’UE est courageuse et ne cesse pas de réclamer la libération de Navalny. Quelle belle occasion pour faire du « Poutine-bashing » ! En même temps, la même Union Européenne n’est jamais intervenu de manière aussi musclée en faveur de Julian Assange, le lanceur d’alerte australien qui lui, subit de la torture dans une prison à haute sécurité en Grande Bretagne. La procédure concernant une éventuelle extradition d’Assange vers les Etats-Unis, est aussi scandaleuse que le « procès » contre Navalny. Et une fois de plus, l’UE applique le « deux poids, deux mesures ».

Julian Assange, le lanceur d’alerte incarcéré depuis 9 ans, d’abord en asile à l’ambassade de l’Equateur à Londres, ensuite dans la prison à haute sécurité de Balmarsh, n’a commis aucun crime. Au contraire, il a dévoilé au monde, les crimes de guerre commis par l’armée américaine en Iraq, en Afghanistan et au Pakistan. La procédure lancée contre lui en Suède, pour un présumé viol de deux femmes, s’est évaporée – il ne s’agissait que d’un prétexte pour mettre la main sur un lanceur d’alerte qui dérangeait le monde occidental. Pourtant, il subit encore ce que l’ONU qualifie de « torture ». Ce ne sont pas les appels demandant sa libération qui manqueraient – mais l’Union Européenne se tait, depuis le début de ce scandale. Dénoncer des procédures frauduleuses en Russie, c’est facile. Dénoncer la torture pratiquée en Grande Bretagne, l’Europe institutionnelle n’en avait pas le courage.

9 fois de suite, Julian Assange a été nominé au Prix Nobel de la Paix et oui, il le mériterait. Mais le comité du Prix Nobel n’ira pas en ce sens – il préfère accorder ce Prix plutôt à l’Union Européenne ou à Barack Obama. Mais ignorer ainsi Julian Assange, ne fait que dévaloriser ce Prix prestigieux. Maintenant, Julian Assange, lauréat d’un nombre incroyable de distinctions, pourrait bien se passer du Prix Nobel, pour lui, il sera plus important de retrouver la liberté dont il est privé depuis de longues années. Et surtout, de ne pas être expulsé vers les Etats-Unis où 175 ans (!) de prison l’attendent.

Quelle hypocrisie ! Julian Assange se trouve en prison pour nous tous. Et on attend maintenant, aussi tard qu’il soit, que l’Union Européenne trouve enfin le courage pour réclamer de la Grande Bretagne, la libération immédiate de ce « héros des temps modernes ». Il suffirait déjà d’appliquer les mêmes procédures que celles actuellement décidées contre la Russie – en sanctionnant la Grande Bretagne, en interdisant l’accès à l’UE aux hauts responsables britanniques et en gelant les comptes bancaires des « gros bonnets » britanniques. Avec le même acharnement que l’UE affiche actuellement en faveur de l’ultra-nationaliste Alexej Navalny, Julian Assange serait déjà en liberté. Alors, pour garder un minimum de crédibilité, l’Union Européenne se doit maintenant d’exercer la même pression sur Londres que celle exercée sur Moscou. Après 9 années d’inertie, il serait grand temps.