Quand la pauvreté frappe les enfants
La politique d’austérité frappe non seulement dans l’Europe du Sud, mais également en Allemagne. Où plus de 2 millions d’enfants vivent dans la précarité. Ces enfants grandissent dans l’exclusion.

(KL) – Il y a des villes en Allemagne, comme le relève une étude de la Fondation Bertelsmann, où 4 enfants sur 10 grandissent dans la pauvreté. Si la situation générale est particulièrement alarmante dans l’est du pays, c’est une ville ouest-allemande, Bremerhaven, qui détient le triste record de 40,5% des enfants qui vivent dans la précarité. Ces enfants n’ont pas le même accès à l’éducation, à la culture, au sport, à la vie de société que les autres enfants. L’Allemagne se paie le « luxe » d’exclure environ un cinquième des prochaines générations.
Le triste palmarès des villes présentant le plus fort pourcentage d’enfants pauvres, est surprenant. Sur les 5 villes où il fait le moins bien vivre pour les enfants, on trouve 4 villes se situant à l’ouest du pays – derrière Bremerhaven, on trouve Gelsenkirchen, Offenbach, Halle (à l’est du pays) et Essen, toutes enregistrant un taux de pauvreté chez les moins de 18 ans qui se situe largement au-dessus des 30%. Dans les « nouveaux Länder », donc les Länder de l’ex-RDA, le taux global d’enfants vivant en dessous du seuil de la pauvreté est de 21,6%, tandis que dans les Länder de l’ouest, le taux est de 13,2%. La différence s’explique par un taux de chômage supérieur dans les « nouveaux Länder » – ceux qui sont nés dans la misère, restent généralement dans la misère.
Ce sont les enfants des monoparentaux qui sont les plus concernés par cette précarité, suivis par les familles ayant trois enfants ou plus. L’aide sociale (le tristement célèbre Hartz IV) s’élève actuellement à 236 € par mois pour les enfants de moins de 7 ans, à 270 € pour les enfants de 7 à 15 ans et de 306 € pour les adolescents de 15 à 18 ans. De quoi vivoter, mais pas de quoi vivre. Déduisez de ces sommes l’alimentation, les fournitures scolaires, les habits, et il ne reste plus rien pour payer l’adhésion dans un club de sport, des places de cinéma, d’autres loisirs qui font partie de la vie sociale.
De plus, les enfants concernés sont plus souvent malades, car ils sont très mal nourris, souvent sans fruits et légumes, ils ne mangent pas régulièrement, pas non plus à la cantine scolaire considérée comme trop chère. Ces enfants grandissent dans une prison qui s’appelle « pauvreté » et dont on ne peut échapper que très rarement. Cette prison nuit également au comportement social, car ces enfants qui souvent, ne disposent pas d’une chambre à eux, n’invitent pas leurs camarades d’école, par honte ou par manque d’espace pour jouer, par exemple. Ceci engendre un comportement souvent agressif et violent, l’isolation de ces enfants augmente d’année en année.
2 millions d’enfants dans la précarité, un cinquième des générations à venir exclu de la société et par le même biais, aussi de la possibilité de contribuer aux systèmes sociaux et ce, dans une société vieillissante qui est l’Allemagne. Humainement parlant, il est honteux qu’une économie aussi forte que l’Allemagne laisse partir un tel pourcentage de jeunes partir à la dérive, économiquement parlant, c’est le même désastre qu’en Grèce, qu’au Portugal, en Espagne, en Italie…
Si ce cinquième exclu de la société pouvait développer une conscience politique et aller voter pour ceux qui prônent une société plus juste, il représenterait une véritable force. Mais, comme le relèvent plusieurs autres études, les exclus de la société ne vont que rarement voter. Ils ont décroché de cette société, ils font profil bas pour ne pas s’exposer au risque de se voir pénaliser pour « comportement non conforme » et restent donc figés dans l’état des choses. Et puisque ces exclus n’ont pas de voix au niveau de la politique, Angela Merkel et Wolfgang Schäuble peuvent continuer à mener cette politique qui favorise ceux qui en ont le moins besoin, tout en pénalisant ceux qui auraient vraiment besoin d’aide. A quand, le revenu de base inconditionnel, comme le demandent de nombreux experts ?
Demain, mercredi, Alain Howiller comparera dans son édito, la situation en Allemagne avec celle en France.
Kommentar hinterlassen