Que restera-t-il des années Merkel ?

Après 16 ans aux commandes de l'Allemagne, Angela Merkel effectue sa tournée d'adieux. Partout où elle passe, elle a droit à des éloges. Mais est-ce que son bilan est vraiment si bon que ça ?

Après 16 ans aux commandes, Angela Merkel prend sa retraite. Avec un bilan mitigé. Foto: Kremlin.ru / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – « Mutti » est sur le point de partir, le nouveau gouvernement allemand sous le chancelier Olaf Scholz (SPD) semble se constituer plus vite que prévu. Donc, il est temps pour Angela Merkel de faire ses adieux au monde politique qu’elle a marqué de son empreinte pendant presque deux décennies. Lors de ses « dernières visites », comme la semaine dernière à Bruxelles, les superlatifs pleuvent. On pourrait même avoir l’impression que sans Angela Merkel, l’Europe n’aurait pas fonctionné ces 16 dernières années. Pourtant, son bilan n’est pas aussi mirobolant que ça.

Le grand mérite d’Angela Merkel se situe surtout au niveau national où elle a su, pendant toutes les années de son règne, d’équilibrer la société allemande, d’éviter les excès extrémistes (même si l’émergence de l’AfD tombe aussi dans ces 16 ans…), elle a su garder le cap dans de nombreuses crises, elle a rassuré les Allemands par sa personnalité « normale » et non bling-bling. Mais en même temps, elle a poursuivi la « germanisation » de l’Union Européenne, tout en empêchant une réforme profonde des institutions européennes, réforme qui pourtant, serait plus que nécessaire.

Elle était sereine, Angela Merkel, autant dans ses bonnes décisions (comme celle fin août 2015 autorisant des réfugiés syriens à traverser le Danube et de trouver refuge en Allemagne) que dans ses mauvaises décisions (comme celle d’exsanguer la Grèce dans le cadre « d’aides » qui avaient surtout profité aux banques allemandes et internationales). S’il est vrai qu’Angela Merkel est une Européenne convaincue, l’UE n’a pas beaucoup évoluée pendant ces 16 ans, au contraire. Aujourd’hui, la Grande Bretagne a quitté la famille européenne et l’Europe ne pèse pas sur l’échiquier politique international.

Angela Merkel est une personne avec laquelle les Allemands ont pu s’identifier pendant toutes ces années. Sa « normalité » a fait que les Allemands se soient reconnus en cette femme qui confiait lors d’une interview, qu’elle utilisait les heures creuses la nuit pour faire tourner la machine à laver, histoire d’économiser de l’énergie.

Elle n’a pas vécu dans un palais berlinois, elle habite un appartement dont elle paie le loyer. Elle a un discours simple, compréhensible et, chose rarissime dans le monde politique, elle a passé 16 ans à la tête du gouvernement allemand sans scandale, sans compte en banque en Suisse, sans enrichissement personnel, sans corruption. Dans l’exercice de ses fonctions, elle a fait preuve d’empathie, mais il n’y a pas de raison non plus de glorifier la chancelière sortante.

Dotée d’un sens du pouvoir énorme, elle à su chasser pendant 16 ans, tout concurrent ou concurrente potentiel(le), et le résultat de cette omission est la dégringolade de son parti lors des dernières élections. Sans véritable successeur, les Allemands ont préféré voter pour Olaf Scholz (SPD) et on a presque l’impression qu’Angela Merkel préférait son vice-chancelier SPD au candidat de son propre parti, Armin Laschet.

Sous Angela Merkel, l’Allemagne s’est rapprochée un peu du centre-droit, après les aussi longues années sous Helmut Kohl qui lui, avait poussé l’Allemagne de plus en plus vers la droite. Mais est-ce qu’elle a modernisé l’Allemagne ? Est-ce qu’elle a fait plus que d’administrer le statut quo ? Est-ce qu’elle a donné des impulsions pour une restructuration des institutions européennes ?

L’Allemagne en cette année 2021 se trouve dans un état assez étrange. Si on a l’impression que l’économie reprend de l’élan, force est de constater que les infrastructures allemandes sont vétustes, que routes, rails, ponts, écoles, hôpitaux et d’autres infrastructures doivent être refaits ou assainis, et que des travaux herculéens attendent son successeur.

Le bilan des 16 ans Angela Merkel est donc mitigé. Et malgré cela, Angela Merkel manquera dans le paysage politique allemand. Car mine de rien, on s’était habitué à « Mutti »…

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