Rester « Charlie » est plus difficile que d’être « Charlie »

Le 7 janvier 2015, mouraient Cabu, Charb, Honoré, Tignous, Wolinski, Elsa Cayat, Bernard Maris, Franck Brinsolaro, Mustapha Ourrad, Michel Renaud et Frédéric Boisseau sous les balles de terroristes.

"Rester Charlie" est plus difficile que d'avoir été Charlie. Et pourtant, "rester Charlie" serait tellement important... Foto: Pierre Bergandion / Wikimedia Commons / CC0

(KL) – Le 8 janvier 2015, le lendemain de l’attentat, le monde entier était « Charlie ». L’attentat sur l’hebdomadaire satirique « Charlie Hebdo » était vécu comme une attaque sur les valeurs fondamentales de la démocratie. L’exécution des dessinateurs qui avaient accompagné notre adolescence et ce, non seulement en France, mais partout en Europe et dans le monde, déclenchait une horreur indicible. Tout le monde était Charlie, tout le monde se rendit compte de l’importance d’une presse libre, du droit de dire, d’écrire et de dessiner justement ce qu’il nous ne plaît pas. Depuis, les attaques sur la presse libre se multiplient, les médias sont la cible permanente de tous ceux qui ne retrouvent pas leur « communication » souhaitée dans les médias et finalement, il ne reste pas grande chose de « l’esprit Charlie ».

Deux ans plus tard, le constat est triste. Après une courte vague de solidarité avec les médias indépendants, tout le monde est revenu à la normale et les victimes du terrible attentat du 7 janvier 2015 se retourneraient dans leur tombe en constatant à quel point l’indépendance des médias dérange à nouveau.

Les médias, on les aime bien lorsqu’on y lit ce qu’on veut bien y lire. Lorsqu’ils parlent positivement des politiques qu’on aime bien. Lorsqu’ils défendent des idées qui sont les nôtres. Autrement, journalistes et médias sont des « journalopes » et des « merdias » ou, en Allemagne, tout simplement la « Lügenpresse ». Et « l’esprit Charlie » dans tout ça ?

S’attaquer aux médias, les mettre sous pression parce qu’on n’y retrouve pas ses propres convictions, cela revient à insulter la mémoire de Cabu, Charb, Honoré, Tignous, Wolinski, Elsa Cayat, Bernard Maris, Franck Brinsolaro, Mustapha Ourrad, Michel Renaud et Frédéric Boisseau. Ne pas défendre les journalistes et médias qui se font attaquer en France et ailleurs, c’est nier le travail des victimes de ce terrible attentat.

Il ne reste que peu de médias indépendants, la plupart des médias se trouvent entre les mains de grands groupes financiers, des banques, du grand capital. Les victimes de « Charlie », eux, faisaient partie des indépendants. Et on les a pleurés. Et on les a oubliés. Et on s’attaque à nouveau aux médias. Et on aimerait bien voir les dessins d’un Cabu, d’un Charb, d’un Honoré, d’un Tignous ou d’un Wolinski montrant ce qu’ils auraient pensé de ceux qui estiment nécessaire de mettre la pression sur les derniers médias indépendants…

La liberté de pensée est celle de ceux qui ne pensent pas comme vous. La fin tragique de Cabu, Charb, Honoré, Tignous, Wolinski, Elsa Cayat, Bernard Maris, Franck Brinsolaro, Mustapha Ourrad, Michel Renaud et Frédéric Boisseau devrait nous le rappeler quotidiennement. Comme quoi, « être Charlie » était facile face à la monstruosité de ce meurtre – « rester Charlie » est beaucoup plus difficile.

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