Séisme politique (annoncé) en Grande Bretagne

Lors des élections anticipées en Grande Bretagne, Labour avec son chef Keir Starmer a remporté la majorité absolue. Mais quid de la démocratie au pays ?

Keir Starmer (Labour) sera le nouveau chef du gouvernement britannique. Un poste pas exactement enviable... Foto: © UK Parliament / Maria Unger / Wikimedia Commons / CC-BY 3.0

(KL) – Les Tories et le premier ministre sortant Rishi Sunak le savaient – leur défaite cinglante avait été annoncée dans tous les sondages. Si la défaite était finalement encore plus grave que prévue, les vrais gagnants de cette élection ne sont pas Labour et Keir Starmer, mais le populiste Nigel Farage avec son « Reform Britain » qui arrive en troisième position. Mais là, le système électoral britannique arrive à ses limites – cette formation n’a gagné que 4 sièges, malgré son score de 14,3% des votes, tandis que les Libéraux-Démocrates, avec 12,2% des votes, obtiennent 71 sièges dans le « House of Commons ».

Labour n’a pu totaliser « que » 33,8% (+1,6%) des votes, mais cela est suffisant pour gagner 411 sièges sur 650, une majorité absolue confortable. Les Tories de Rishi Sunak obtiennent 120 sièges pour 23,7% des votes et perdent 19,9% des votes par rapport aux dernières élections – un désaveu. Mais le vrai gagnant de cette élection est effectivement Nigel Farage, le fantasque populiste qui avait forcé le Brexit à partir de 2016. Son parti « Reform Britain » gagne 12,3% pour se situer maintenant à 14,3%. Le fait qu’un sixième des votes ne lui donne que 4 des 650 sièges, n’est pas exactement démocratique, surtout en considérant que les Libéraux-Démocrates disposeront de 71 sièges pour avoir obtenu 12,2% des votes.

Si Keir Starmer peut maintenant gouverner comme il l’entend, avec une majorité confortable au parlement, le système « first past the post » est aussi dépassé que le système électoral français. Les deux systèmes empêchent une représentation de la moitié des électeurs et électrices, ce qui donne une composition non-représentative au parlement. De plus, ce système est censé supporter une alternance droite-gauche au parlement, en empêchant de petits partis de grandir et de demander leur place au parlement. Mais dans la nouvelle « House of Commons », 13 partis seront représentés, ce qui est aussi une indication d’instabilité politique.

Le fait que le premier ministre sortant ait perdu 19,9% des votes, ressemble à la situation dans d’autres pays européens où les gouvernements sont aussi désavoués par l’électorat. Visiblement, les peuples attendent davantage de la part de leurs gouvernants que de belles paroles en période électorale – face aux multiples crises mondiales, les gens demandent à ce que les gouvernements soient efficaces. Ce qui n’est malheureusement pas le cas.

Keir Starmer aménagera donc au 10 Downing Street à Londres, mais il se trouve face à une montagne politique. La Grande Bretagne va mal, l’économie ne décolle pas et les conséquences du Brexit pèsent encore lourd sur le pays. A cela, il faut ajouter le souhait de l’Ecosse de se rendre indépendante pour pouvoir se rapprocher à l’Union européenne, les guerres dans le monde, l’appauvrissement de la société – et personne ne sait comment le nouveau chef du gouvernement compte s’attaquer à ces problèmes. En tout cas, sa majorité absolue devrait lui permettre d’agir rapidement.

Mais si 33,8% des votes suffisent pour décrocher 411 (éventuellement 412) des 650 sièges au parlement, c’est qu’il y a réellement un problème démocratique. Labour a obtenu 2,5 fois plus de votes que « Reform Britain », mais gagne plus de 100 fois plus de sièges que les populistes. Il serait temps que des pays comme la Grande Bretagne et la France s’orientent vers un système à la proportionnelle, qui reflète davantage le souhait des électeurs et électrices.

Maintenant, il ne reste plus qu’à souhaiter bonne chance à Keir Starmer. Il en aura besoin.

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