Serbie : Pour la démocratie municipale

Belgrade appartient aux citoyens !

En Serbie comme en Russie, le Canard Jaune est le symbole de la lutte des citoyens contre la corruption Foto: Daggets/Wikimédia Commons/CC-BY-SA 4.0Int

(Marc Chaudeur) – On n’en parle pas assez, comme d’habitude lorsqu’il s’agit de ce qui se passe de positif dans les Balkans, cette vaste partie un peu délaissée de l’Europe. A Belgrade, le week end dernier, a eu lieu la rencontre des Fearless Cities (Villes sans peur). Elle réunissait des représentants de villes de 22 pays européens, dans le sillage des premières manifs contre la destruction irréfléchie et peu transparente de Belgrade, voici 5 années déjà. Et aussi dans le contexte des 6 mois de manifestations nombreuses et ardentes contre le gouvernement « progressiste/populiste » au pouvoir, autoritaire et corrompu.

Le principal organisateur de cet événement, Ne davimo Belgrad (Nous ne céderons pas Belgrade), l’association au grand Canard Jaune, a engendré un phénomène particulièrement important d’abord dans la capitale serbe, puis dans l’ensemble de la société civile, pour finir par devenir un exemple à suivre partout dans les Balkans occidentaux. Du moins là où n’existaient pas encore de telles initiatives, cependant moins importantes numériquement que dans la capitale serbe.

Ne davimo Beograd était aussi une liste électorale, notamment lors des dernières élections municipales et locales de février 2018. Le mouvement est né en 2014 : il s’agissait de résister jusqu’au bout contre l’ entreprise de démolition d’une partie importante du patrimoine par la municipalité proche du SNS au pouvoir, surtout au bord du Danube : des hommes masqués que protégeaient le pouvoir et le maire détruisaient des quartiers entiers de la capitale serbe, en application d’ un « urbanisme » glauque, corrompu et délirant… Voici 5 ans, la résistance n’a pas vraiment été couronnée de succès ; mais depuis lors, Ne Davimo Beograd n’a cessé de se renforcer et de clarifier le sens politique de son action.

L’un des fondateurs de NDB, le jeune Dobrica Veselinović, tête de liste l’an dernier aux municipales, l’a expliqué le week end dernier : il s’agit d’un mouvement citoyen qui a pour but de rendre la ville aux gens, en passant en dessous (ou au-dessus) des partis politiques d’opposition, trop pris eux mêmes dans l’ engrenage des stratégies personnelles et hiérarchiques – et dans la visibilité de structures assez aisément réprimables par le parti d’Aleksander Vučić au pouvoir.

Les problèmes que rencontrent les citoyens des autres pays des Balkans occidentaux sont grosso modo les mêmes : de la Bosnie Herzégovine à l’Albanie en passant par le Monténégro et le Kosovo, même concentration de plus en plus préoccupante du pouvoir en quelques mains, même accaparement des bien publics, mêmes atteintes aux libertés de la presse et d’expression. Zagreb a d’ailleurs son association analogue à Ne davimos : c’est Zagreb je NAŠ (Zagreb est à NOUS). Seule solution valable, peut-être : la reprise de l’action politique par les associations qui propagent une effectuation « horizontale » de la décision, par une diffusion participative de la démocratie locale.

Dans les institutions européennes, on n’entend pour ainsi dire jamais parler de cette initiative Fearless Cities, cette action « municipaliste », qui aspire à fonder un nouveau rapport à la décision politique et à la ville. L’initiative est née dans quelques cités occidentales qui avaient réussi à se faire élire dans leur mairie : à Naples, à Madrid ou à Barcelone, notamment.

En Serbie, on l’a vu, une telle initiative est de première importance dans un pays où le pouvoir prend une allure de plus en plus concentrée et de plus en plus autoritaire, et où l’action des partis politiques est largement insuffisante et impuissante. Il s’agit maintenant d’y gagner en efficacité : c’est pourquoi plusieurs groupes locaux serbes oint appelé à former une plateforme qui liera une dizaine d’entre elles.

Le propos est bel et bien politique : on espère visiblement fonder un nouveau mouvement citoyen qui regrouperait l’ensemble des forces écologistes (de plus en plus puissantes ; elles croissent à vue d’œil dans tous les pays des Balkans occidentaux) et de la « vraie » gauche démocratique.

Il faut maintenant espérer que ce mouvement citoyen pourra lutter de plus en plus efficacement pour la démocratie participative et municipale. Et changer les modalités de l’exercice du pouvoir, Et changer aussi la société…

 

A lire : https://www.courrierdesbalkans.fr/

 

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