Shamsia Hassani : des couleurs face à l’inhumanité

« Art can change people’s mind. People’s mind can change society. », affirme encore et toujours la graffeuse afghane Shamsia Hassani.

Un sourire plein de courage, d’espoir et d’amour. Shamsia Hassani doit être protégée par la communauté internationale. Foto: Shamsia Hassani / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Jean-Marc Claus) – Identifiée magnifiquement dans une publication de l’artiste bretonne Paule Opériol, la graffeuse afghane de renommée internationale Shamsia Hassani continue à publier sur son compte Facebook. Compte sur lesquels les premières publications remontent à 2012, lors d’un atelier de graffiti animé par elle-même à l’Université de Kaboul.

Ommolbahni Hassani dite Shamsia Hassani, aujourd’hui âgée de trente-trois ans, est la première femme graffeuse en Afghanistan. Ses œuvres dépeignant les femmes afghanes vivant sous domination masculine, tournent beaucoup autour d’un personnage féminin pétri de fierté, de force, mais aussi de douceur et de persévérance, voulant apporter des changements positifs dans la vie des gens qu’il interpelle. Son œuvre inspire des milliers de femmes dans le monde et a donné de l’espoir aux artistes progressistes afghans.

Enseignant jusqu’à présent la sculpture à l’Université de Kaboul, elle s’est intéressée à la peinture dès son enfance. Enfance passée en Iran, car ses parents originaires de Kandahar, au sud de l’Afghanistan, ont émigré pour fuir les conflits armés. Elle aurait aimé étudier les arts, mais en Iran, ces disciplines étaient interdites aux étudiantes originaires d’Afghanistan. Elle a donc étudié la comptabilité. Mais dès 2005, à son retour avec sa famille en Afghanistan, elle s’est lancée dans l’étude de l’art traditionnel à l’Université de Kaboul.

Lors d’une interview donnée au Los Angeles Times en 2016, elle disait avoir commencé à graffer en 2010, à l’occasion d’une rencontre avec « Combat Communications », un groupe de défense des arts qui avait organisé un atelier-découverte. C’est là qu’elle a compris combien le street-art peut toucher les gens qui n’iraient pas dans une galerie. De plus, recouvrir les vestiges de la guerre de fresques aux couleurs vives, constituait aussi pour elle un moyen de panser des blessures non cicatrisées. « Je veux colorer les mauvais souvenirs de la guerre », affirmait-elle lors d’une interview pour The Guardian en 2014.

Seule participante du groupe à persévérer, elle fut rejointe deux ans plus tard par certains participants à cet atelier qui avaient alors changé d’avis. C’est là que Shamsia Hassani a considéré que son travail essentiel, était de travailler en permanence pour rendre l’art accessible à tous. Chose qui n’était déjà pas facile en 2016, car en plus du risque d’être victime collatérale d’un attentat, elle pouvait aussi être agressée par des personnes à l’esprit fermé.

Femme et artiste, était déjà un double handicap, qui aujourd’hui devient une double peine. Réalisant des œuvres dans son atelier, mais aussi dans la rue, elle s’exposait dangereusement lorsqu’elle peignait ces dernières, comme le rapportait un article de The Independent en 2014 soulignant qu’en plus d’éviter bombardements et mines terrestres, elle se faisait régulièrement agresser par des passants. Ainsi, ses fresques étaient-elles souvent recouvertes de peinture peu de temps après leur réalisation…

Dans un article publié par le Temps en 2013, elle disait non sans humour que chaque graffeur a ses problèmes dans son pays. En Occident, ils doivent échapper à la police, quant à elle, son principal obstacle est l’opinion conservatrice. Une opinion conservatrice dont les tenants se seraient réjouis, si Shamsia Hassani avait mis le pied sur une des nombreuses mines anti-personnel subsistant dans de nombreux sites de la capitale afghane. Le 19 août, l’Humanité publiait un article de Marine Lion intitulé « Shamsia Hassani, la première femme street-artiste afghane » – souhaitons vivement qu’avec l’arrivée au pouvoir de l’inhumanité personnifiée, elle ne soit pas la dernière…

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