Showdown à Berlin

Le chef de la CSU bavaroise Horst Seehofer défie la chancelière Angela Merkel. La coalition au pouvoir à Berlin risque d’éclater ces prochains jours. La politique d’immigration déchire le gouvernement.

Horst Seehofer et Angela Merkel se livrent un extraordinaire bras-de-fer. A la fin, ils perdront tous les deux... Foto: Harald Bischoff / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(KL) – Horst Seehofer, le chef de la CSU bavaroise, vient de défier Angela Merkel. La Bavière entend refuser des réfugiés à ses frontières, ce qui ne correspond pas du tout à la politique d’Angela Merkel qui elle, souhaite trouver des solutions européennes pour gérer cette question. Mais force est de constater que les deux se trompent, autant Seehofer et Merkel. Et pendant ce temps, les extrémistes de l’AfD continuent à grimper dans les sondages. Actuellement, la « Grande Coalition » CDU/CSU-SPD ne dispose même plus d’une majorité dans les sondages.

Rarement l’ambiance était aussi mauvaise entre les deux partis-sœurs qui sont la CDU et la CSU. La raison en est simple – la Bavière élit cette année son nouveau gouvernement régional et la CSU craint, à juste titre, de perdre encore plus de terrain face aux extrémistes de l’AfD. Donc, pour se positionner, la CSU tente d’adopter des positions encore plus radicales que celles de l’AfD, sans doute dans l’espoir de récupérer l’un ou l’autre électeur extrémiste. Et puisque le refoulement de réfugiés ne fait pas partie de la politique du gouvernement, la CSU entend instaurer cette règle CONTRE l’avis du gouvernement, ce qui ne laisse que deux options à Angela Merkel : soit elle limoge son ministre de l’Intérieur Horst Seehofer, soit elle pose la question de confiance au Bundestag, au risque d’être limogée elle-même par le parlement allemand.

La position de la chancelière est aussi irréaliste que celle de Horst Seehofer. Pour faire cesser les agissements de Seehofer, la chancelière vient de demander 2 semaines de temps pour « conclure des accords bilatéraux avec les autres partenaires européens », car elle préfère une « solution européenne ». Quel manque de réalisme ! Depuis 2015, l’Union Européenne n’arrive pas à trouver une position commune face à l’arrivée massive de réfugiés, et il est donc assez invraisemblable qu’Angela Merkel puisse trouver ce genre d’accord en deux semaines (la date butoir étant le prochain sommet européen).

Par contre, Horst Seehofer, en rêvant à voix haute d’un nouvel axe « Vienne-Berlin-Rome » (quel manque de tact de vouloir ressusciter l’ancien axe des nazis et des fascistes italiens…), se trompe tout autant, comme le prouvent les sondages. La dispute entre les deux partis-sœurs dégoûte les électeurs et électrices qui, ce n’est guère surprenant, se tournent de plus en plus vers les extrémistes de l’AfD. Pourquoi voter pour la copie, en effet, quand on peut voter pour l’original ? Au lieu de se distancier de l’AfD, la CSU commet l’erreur monumentale de se présenter comme une sorte de « AfD light ».

Seehofer et Merkel sont en train de se rendre eux-mêmes obsolètes. Les sondages du week-end montrent que la CDU/CSU se situerait aujourd’hui à 30% des intentions de vote, le SPD plonge à 16%, tandis que l’AfD grimpe à 15%. Avec 46% des intentions de vote, la « Grande Coalition » CDU/CSU-SPD ne pourrait pas être reconduite en cas d’élections anticipées, donc, Seehofer et Merkel prennent le risque extraordinaire de créer une situation qui permettrait aux extrémistes de l’AfD de peser encore plus sur la politique allemande, au point où un autre gouvernement serait difficile à mettre en œuvre contre la volonté de l’extrême-droite.

L’Allemagne est en train de rater le train de l’Histoire. Le nombrilisme des partis autrefois appelés « populaires » les met hors-jeu et renforce les extrémistes, phénomène observé dans de nombreux autres pays européens. Mais à quoi servent les meutes de « conseillers » grassement payés qui gravitent autour des responsables politiques ? Personne n’a donc le courage de leur dire la vérité ?

L’Allemagne a besoin d’un changement de génération de ses élites politiques. Les dinosaures comme Seehofer, Merkel, Schäuble & Cie. sont en train de ruiner l’Allemagne et l’Europe, en s’agrippant à leurs postes et à une vision du monde et de l’Europe qui date du précédent millénaire. Il suffit de regarder les chiffres pour se rendre compte que CDUSPDCSU ont tout faux – ils offrent l’Allemagne à l’extrême-droite, et ce, sur un plateau d’argent. On sait comment de telles évolutions se terminent en Allemagne. Il serait temps que ces dinosaures se retirent ensemble pour laisser la place à d’autres qui, eux, comprennent le monde d’aujourd’hui. De préférence avant qu’il ne soit trop tard.

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