Social-démocratie en Scandinavie 1
Au Danemark

(Marc Chaudeur) – Curieusement, on ne l’a pas assez remarqué : les 3 pays scandinaves qui appartiennent à l’UE (on inclut ici la Finlande, qui fait partie de la Scandinavie géographique, et on exclut la Norvège, qui ne fait pas partie de l’UE) sont maintenant gouvernés par les partis sociaux-démocrates. Atavisme, fatalité, tendance profonde ? Le cas qu’on examinera ici, pour commencer, sera celui du Danemark. Un phénomène remarquable, puisque le gouvernement né la semaine dernière se compose de partis de centre-gauche et de gauche (voire d’extrême-gauche), exclusivement…
20 jours après les résultats des élections législatives, Mette Frederiksen, la dirigeante du vénérable parti des Sociaux-démocrates (fondé en 1871, 4 années donc avant le SPD allemand) a présenté fièrement à la Reine Margrethe II, qui l’avait chargée de former un gouvernement, l’ accord permettant de former un gouvernement qui se composera des partis de gauche (voire d’extrême-gauche) et de ce qu’on peut qualifier de centre gauche. (https://eurojournalist.eu/danemark-victoire des-sociaux-démocrates/)
Le parti de Mette Frederiksen a remporté 25,9 % des suffrages – ce qui peut sembler modeste (le quintuple cependant du Parti socialiste français) ; mais il est le premier parti du pays. Mette Frederiksen est le plus jeune premier ministre de l’histoire du Danemark – 41 ans – et c’est ce qui semble intéresser surtout les médias internationaux. La coalition se composera de 4 partis : les SD, le Parti populaire socialiste (SF) positivement de gauche et la Liste de l’Unité (coalition de partis), qu’on hésite à classer à gauche plutôt qu’à l’extrême-gauche (le Parti communiste danois s’y love confortablement). Que renforcent les troupes assez maigres du Parti social-libéral (RV), qui soutient le gouvernement sans y participer. Curieusement d’ailleurs, le gouvernement, n’est composé que de membres du Parti social démocrate, tandis que la coalition est majoritaire au Folketinget (Parlement).
« Den røde Mette » (Mette la Rouge), comme on l’appelait voici maintenant une vingtaine d’années, plaît aux rédactions européennes. Cette native d’Aalborg, au Nord du Jutland, est l’auguste descendante de toute une lignée de sociaux- démocrates, depuis les débuts même du parti. Certains la qualifient parfois d’ « idéaliste »… Ah, il existe d’autres motivations pour faire de la politique ?
Son programme, en tout cas, est plutôt pragmatique (les rêves danois ne sont pas ceux de socialistes français, comme en témoigne d’une façon toute onirique le roman génial de Peter Høeg, Histoire des rêves danois, paru dans les années 1990…). Mettons que Mette met au premier plan de son projet néo-social 70 % de réduction de gaz à effets de serre d’ici dix ans, la hausse des minimas sociaux, le recrutement d’enseignants.
Et pour ce qui concerne la question des migrants, on sait que Mette Frederiksen et avec elle son parti défendent une politique ultra restrictive ; au point de rencontrer à plusieurs reprises les dirigeants du parti d’extrême-droite, le Danske Folkepartiet… C’est la première fois qu’un parti SD assume avec tant d’opiniâtreté une telle politique dissuasive – au point que Frederiksen proposait, voici quelques mois, de garder en détention sur une île danoise les migrants ayant eu affaire à la justice et non extradables (https://eurojournalist.eu/danemark-les vilains-habiteront-avec-les-animaux- contagieux/).
Contrairement à la représentation que s’en font souvent les Français, cela tient à quelque chose de profond dans la mentalité scandinave, dont nous reparlerons à propos de la Suède : c’est l’image idéale, le souci de la communauté ; une communauté pensée quasi comme un organisme, où dirigeants et dominés forment très facilement un consensus, où les prestations sociales (et donc les impôts) sont très élevés afin de maintenir durablement (sinon à tout prix…) ce consensus. Mais intégrer sans cesse des arrivées massives de nouveaux arrivants bronzés et bruyants, ce la revient trop cher : les Danois , qu’ils soient sociaux démocrates étiquetés ou libéraux de droite, éprouvent cette crainte très vissée au corps de briser le consensus à cause d’étrangers, vus comme des facteurs de dissolution onéreux.
Mais simultanément, le souci d’intégrer les étrangers est ici très puissant, et très efficace – sans doute davantage encore dans la Suède voisine qu’au pays de la désespérante petite Sirène, dont la statue sur le port de Copenhague a été décapitée voici quelques années par un gang de féministes masquées. Puissant et efficace comme ils ne le sont plus depuis bien longtemps dans la République Française. Par défaitisme et par veulerie ?
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