SOS Britannic

Boris Johnson et la catastrophe au Royaume

Le heaume de Henry VIII, un autre agité du bocal anglais Foto: Matthew Bisanz/Wikimédia Commons/CC-BY-SA 4.0Int

(Marc Chaudeur) – Ces jours ci, le grand journal britannique The Financial Times a lancé un appel, signé très vite par les plus grands esprits du Royaume, à amortir autant que faire se peut la marche vers le « Brexit dur », c’est-à-dire le départ sans négociation supplémentaire hors de l’Union Européenne. Mais il est déjà très tard, et le Premier ministre Boris Johnson poursuit sa marche impulsive et brouillonne vers l’abîme. Que peut-on, que peuvent-ils encore faire ?

Depuis au moins un an, depuis Theresa May au moins, les grands responsables politiques britanniques laissent exsuder une inquiétude fondamentale, très apparente. Comment, maintenant que le vin aigre est tiré, lui donner un goût suave ? C’est la quadrature du cercle œnologique qu’aucun géomètre ne résoudra. Aucun œnologue ni aucun politicien non plus, et tout le monde le sait bien. C’est pourquoi cet enfant entêté et capricieux qu’est Boris Johnson a recours désormais à la menace : vous négociez, ou bien jamais la dette de la Grande Bretagne ne sera réglée. Na. Mais qu’est-e que cela signifie-t-il, au juste ?

Le Premier ministre britannique n’a pas de proposition ; il n’a aucune solution à proposer au problème que lui-même et ses petits camarades démagos, menteurs et d’une tragique incompétence ont introduit. Conséquences concrètes, en clair : en cas de Brexit dur à la seconde date prévue (le 31 octobre), c’est-à-dire sans traité avec l’UE, Londres refusera de régler la somme due, qui s’élève à 43 milliards d’euros. A cette menace, la Commission bruxelloise réagit plutôt sereinement : ses membres expliquent que le règlement de cette somme est de grande importance dans l’établissement d’une relation confiante dans l’après-Brexit. Plus précisément : qu’aucun accord commercial ne sera possible en cas de refus.

Malgré l’importance que la bande à Johnson prête aux Etats-Unis, l’UE en effet resterait le partenaire commercial principal du Royaume – du Royaume sans doute bientôt privé d’Ecosse, et peut-être à plus long terme, de Pays de Galles ! La bonne entente fondée sur le règlement de la dette de Londres, estime-t-on à Bruxelles, est une condition nécessaire pour pallier les conséquences catastrophiques du Brexit sur l’ Angleterre elle-même…

En bon boutiquier magouilleur, Johnson conteste d’ailleurs le montant exact à régler : il parle de 9 milliards d’euros, au lieu des 43 milliards (ou 36 si on comptabilise les mois entre la date de mars 2019 d’abord prévue et celle, peut-être effective, du 31 octobre).

Mauvaise manœuvre d’un politicien acculé au n’importe quoi. Car les 36 milliards dûs représentent un montant somme tout modeste : à savoir moins de 3% du budget septennal de l’ UE. En revanche, les conséquences risquent de coûter cher, très cher aux Anglais.

Mais le but de Johnson est-il réellement de forcer l’UE à la négociation, qui porterait sur des difficultés et des chicanes absurdes qu’il a lui-même engendrées ? Sans doute cherche-t-il plutôt à rejeter la responsabilité d’un No Deal Brexit sur l’Union Européenne. Sa stratégie (!) est donc plutôt à portée interne et vise l’électorat conservateur britannique.

Même chose pour l’un des problèmes les plus graves que pose cet irresponsable exit hors de l’Europe : celui de la frontière irlandaise interne. Michel Barnier avait posé les conditions du marchandage : si le Brexit introduisait cette frontière, tristement célèbre et cause de milliers de morts et de centaines d’infirmités, pas de Brexit : c’est la fameux backstop. Mais Johnson veut tout et les fesses de la crémière en plus : Bruxelles jouera donc les prolongations et installera un temps de latence donc le jusqu’à arriver à une solution et à un véritable accord sur ce point tragique et brûlant. Mais quel accord et quelle solution à ce problème de frontière/non-frontières ? Il n’y en a pas.

Prolongations infinies sans négociations supplémentaires, une très mauvaise chose pour Johnson !

Johnson, Premier ministre depuis un mois, ne peut donc que feindre de botter en touche et rejeter la responsabilité de ce damned Brexit sur Bruxelles. Cela plaira à ses électeurs, dont le nombre ira cependant en s’amenuisant, face à la réalité détestable qu’ils découvriront un peu plus chaque jour.

 

 

 

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