Spécial Cannes (4) : Les Dardenne, Almodovar et Assayas et bien d’autres…

Les grands du cinéma mondial à Cannes et quelques trouvailles.

Coup de coeur - "Ma vie de courgette"... Foto: unifrance.org

(Par Nicolas Colle) – Ces deux premiers, on ne peut plus les rater. A chacun de leur films, le passage par le tapis rouge cannois est une étape sûre. Avec toujours la même question sur toutes les lèvres : « A quand la troisième (Palme d’Or) ? »

Avec « La Fille inconnue », Jean-Pierre et Luc Dardenne nous présentent une nouvelle œuvre sociale et humaine dont ils sont coutumiers, mais avec, cette fois-ci, une structure à mi-chemin entre le film policier et le thriller. Portée par une Adèle Haenel d’une justesse étonnante, cette chronique nous embarque dans la quête d’une jeune médecin généraliste, rongée par les remords, qui tente de retrouver l’identité d’une femme assassinée juste après avoir tenté de la voir à son cabinet médical. Mais elle ne lui avait pas ouvert.

Plutôt un bon cru dardennien, le film confirme aussi tout le bien que l’on pensait déjà de la jeune Adèle. Dailleurs, quel beau personnage que celui qu’elle interprète ici, en jeune médecin totalement dévouée aux autres. Elle les soigne, les écoute, sans jamais mettre en avant sa propre vie ou ses émois personnels .Tout en cherchant à réparer son erreur, elle va confronter chacun des personnages rencontrés dans sa quête (retrouver le nom de la fille inconnue afin qu’elle ne soit pas oubliée) à leurs propres troubles, sans jamais les juger, jusqu’à ce que la vérité soit révélée. En somme, un film qui pose des questions essentielles sur les valeurs de notre monde et de son époque. Malgré un rythme assez lent par moment, la narration se rapproche énormément du précédent long métrage « Deux jours, une nuit » des deux frères. Mais devant tant de sensibilté, on leur pardonnera bien volontiers.

De son côté, le maître du cinéma espagnol, Monsieur Pedro Almodovar, renoue avec le genre qu’il affectionne probablement le plus : le portrait féminin. En nous contant l’histoire de « Julieta » qui voit son époux périr en mer et son enfant renoncer à elle pour mieux vivre librement sa vie, le cinéaste nous offre une œuvre juste, sensible, colorée et lyrique. Cependant, on était peut être en droit d’en attendre un peu plus. Peut être trop ? Car malgré, notamment, la qualité de la direction artistique et de l’émotion qui s’en dégage, la folie, le mystère et la singularité qui habitaient les œuvres les plus marquantes du cinéaste telles que « Parle avec elle », « Volver » ou encore « La Piel que habito » semblent bien loin. Il reste un très grand. Nouveau ?

Olivier Assayas, quant à lui, deux ans après « Sils Maria », nous présente « Personnal Shopper » (expression désignant une personne chargée de la garde-robe d’une star) où il explore à nouveau, mais plus légèrement, les coulisses de la célébrité pour, beaucoup mieux, nous plonger au coeur d’un récit fantastique. Cette « Personnal Shopper », c’est Maureen (impressionnante Kristen Stewart qui aura fait coup double cette année, avec le film de Woody Allen en ouverture du festival), une américaine vivant à Paris depuis la mort prématurée de son frère jumeau. Étant médium, elle tente d’entrer en contact avec l’esprit de ce dernier pour mieux accepter sa disparition. Un film singulier, teinté d’une douce mélancolie, qui mélange habilement l’intime et l’épouvante pour mieux nous parler du manque et de l’absence. Une œuvre qui a profondément divisé les journalistes lors de la séance presse, les sifflets répondant aux applaudissements… Bon, il est vrai, et ce sera le seul reproche que nous ferons, que lorsque Maureen échange par texto avec un inconnu qui dit la connaître (peut-être son frère depuis l’au-delà ?), c’est très étrange… Mais observer un personnage qui écrit, lit et répond à des SMS pendant plus de vingt minutes, ça devient légèrement laborieux…

Dans « Un certain Regard ».

Enfin, nous pouvons évoquer deux autres films présentés dans les sélections parallèles de la Compétition Officielle avec, tout d’abord, dans cette section le nouveau film de Delphine et Muriel Coulin, « Voir du pays » qui traite un sujet bien difficile : le rapatriement des troupes françaises d’Afghanistan et le soin psychologique apporté à ces hommes et ces femmes qui ont été confrontés aux pires horreurs des combats. Durant trois jours, ils feront escale sur l’île de Chypre, dans un hôtel cinq étoiles, afin de se libérer de leurs démons et de mieux reprendre leur vie civile. Une œuvre forte et solaire malgré l’âpreté du sujet, totalement portée par les nouveaux et beaux talents du cinéma français, Ariane Labed, Soko et Karim Leklou en tête.

En conclusion, place à l’animation, avec la présentation de ce petit bijou qu’est « Ma Vie de courgette » présenté à la « Quinzaine des réalisateurs ». Un film entièrement réalisé en « stop-motion » avec des personnages uniquement conçus en pâte à modeler. Outre la qualité indéniable de la direction artistique, la grande force de ce projet réside, avant tout, dans l’authenticité de l’écriture de la scénariste Céline Sciamma qui, à l’instar de ses réalisations précédentes, traite à nouveau du thème complexe de l’adolescence. Autant dire qu’il est peu probable de trouver un film d’animation où les situations et les personnages soient aussi naturels, complexes et vrais que ces enfants placés en foyer d’accueil, soit parce qu’ils sont orphelins, soit parce qu’ils sont rejetés par leur famille. Ils sont en colère, tristes, amoureux, parlent de sexe, perdent espoir, reprennent espoir et vivent comme jamais, sous nos yeux tour à tour émus ou rieurs mais toujours ébahis.

Extrait de « La Fille inconnue »

Bande annonce de « Julieta »

Bande annonce de « Personnal Shopper »

Extrait de « Voir du pays »

Extrait de « Ma vie de courgette »

Cannes. Le cinéma mondial est au rendez-vous à la Croisette. Foto: Nicolas Colle

Cannes. Le cinéma mondial est au rendez-vous à la Croisette. Foto: Nicolas Colle

1 Kommentar zu Spécial Cannes (4) : Les Dardenne, Almodovar et Assayas et bien d’autres…

  1. Joli travail. Reste à aller voir.

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