Spécial Cannes (9) – « Marcello Mio » de Christophe Honoré…

Esther Heboyan a vu pour vous « Marcello Mio », un film de compétition - ...et Chiara se fait son cinéma.

"Marcelo Mio", un film avec une distribution impressionnante... Foto: © FDC 2024

Logo klein(Cannes, Esther Heboyan) – Les enfants de stars sont, qu’ils le veuillent ou non, une population à part. À Paris ou à Hollywood. Et quelques uns/unes suivent la voie tracée par leurs célèbres parents. Cette année à Cannes, dans la compétition officielle, Christmas Eve in Miller’s Point, une comédie douce-amère de Tyler Taormina, met en scène Francesa Scorsese, fille de Martin, et Sawyer Spielberg, fils de Steven. Scorsese et Spielberg – des patronymes mondialement connues. Le phénomène perdure depuis la dynastie des Barrymore dont Drew Barrymore est la descendante la plus accomplie. L’édition 2021 du Festival avait fait une place à Charlotte Gainsbourg qui venait de réaliser son documentaire intimiste Jane par Charlotte sur sa mère Jane Birkin.

Avec Marcello Mio, Christophe Honoré nous fait entrer dans la vraie-fausse vie de Chiara Mastroianni, fille de Marcello Mastroianni et de Catherine Deneuve. Actrice mal traitée dans un remake d’une scène de Fellini, mal à l’aise dans la peau d’Anita Ekberg pataugeant dans la fontaine de Trevi à Rome, Chiara connaît une crise identitaire qui va la conduire à devenir son père. C’est de la fiction, mais les acteurs jouent leur propre rôle. Chiara au présent et Chiara enfant – il leur arrive de se retrouver côte à côte pour regarder le patinage artistique à la télé. Catherine Deneuve joue Catherine Deneuve. Nicole Garcia est la réalisatrice Nicole Garcia, Fabrice Luchini l’acteur Fabrice Luchini. Le musicien-acteur Benjamin Biolay, qui a été le mari de Chiara, et Melvil Poupaud, l’ami de longue date, réagissent au travestissement de Chiara. Colin (Hugh Skinner) est le seul personnage fictif, lui aussi en crise, que Chiara croise sur un pont par une nuit d’errance, comme le personnage de Marcello avait croisé le personnage de Maria Schell dans Les nuits blanches (1957) de Visconti.

On n’apprend pas grand-chose sur le couple Mastroianni-Deneuve, ni sur Chiara et Catherine. L’idée n’est pas de faire des révélations sensationnelles, ni même de révéler quoi que ce soit. Dans le dossier de presse, Christophe Honoré clarifie son projet : « Mais Marcello Mio n’est pas un biopic avec tous les dangers afférents de l’indiscrétion ou de l’obscénité. J’ai reconstruit cette histoire familiale du point de vue du romanesque, par échos et analogies, en rendant flou la frontière entre le romanesque et le réel. » Soit.

Que Chiara-fille-de, veuille se prendre pour Marcello (costume noir, petite moustache, chapeau, lunettes à grosse monture, mimiques, gestes, parler) au risque de choquer et d’agacer son entourage, est une idée originale mais le film peine à convaincre. Pourtant, Chiara Mastroianni met tous ses atouts dans le jeu. L’idée originale une fois en place, le film s’enlise. Il ne deviendra intéressant que dans la partie qui se déroule en Italie, d’abord à Rome, ensuite dans une station balnéaire où Chiara est rejointe par toute sa bande. Et tout le monde joue le jeu, semble croire en la nouvelle identité de la jeune femme.

Christophe Honoré commente le film dans le film :

« D’autant que c’est le vrai sujet principal du film : comment transformer sa vie en comédie ? Le voyage à Rome et le séjour dans une station balnéaire de la Riviera m’a beaucoup stimulé et a inspiré aux acteurs une joyeuse envie de s’amuser. Notamment à l’occasion d’une scène dans un émission de télé-réalité, genre où la télévision italienne excelle. L’émission s’appelle Da noi… a ruota libera (Avec nous… en roue libre) et évidemment tout y est trucages, faux semblants, mensonges, mises en scène, et partant d’une mine de gags involontaires pour la plupart hilarants. L’effet d’abîme sera encore plus puissant pour les spectateurs italiens du film car la présentatrice de l’émission est jouée par la somptueuse Francesca Fialdini, une star de la RAI italienne et qui, elle non plus, ne manque pas d’humour. L’Italie c’est aussi ce moment où le film bifurque, emprunte des chemins de traverse, sans pour autant se perdre. Des itinéraires bis où l’on croise le hasard, le mystère. Des fictions dans la fiction. Pour moi, un film est un organisme vivant donc mutant où ce sont les acteurs qui entraînent les scènes et pas l’inverse. »

Dans Marcello Mio, il n’y a pas que le film qu’invente Chiara dans le film, mais plusieurs bouts de film de Mastroianni où Chiara joue Mastroianni. On reconnaît, par exemple, La Dolce Vita, , Les nuits blanches, Divorce à l’italienne. Cette quête du père par la fille s’inscrit dans le parcours artistique du père qui a marqué le cinéma indéniablement. Christophe Honoré a trouvé là un procédé efficace, et par moments amusant, pour rendre hommage à l’une des grandes figures du cinéma européen. Mais le triomphe est celui de Chiara Mastroianni.

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